Leonard’s paintings, to be or not to be…?
- LA MADONE A LA GRENADE
Ce tableau a toujours été considéré comme l’un des meilleurs sorti de l’atelier de Verrocchio. Mais qui en est l’auteur, Léonard ? Huile sur panneau. Œuvre de petites dimensions : Détrempe et huile sur bois 15,5 x 12,7cm (1472-1476) Washington National Gallery of art.
Entre deux baies nues ouvertes sur un paysage se finissant par des montagnes au loin, la Vierge se situe sur un fond de mur monochrome. Son visage est incliné vers l’Enfant, effet accentué par la représentation des paupières aux cils marqués. La tête repose sur un long cou maniériste.
La composition pyramidale manque de densité volumétrique, ce trait si caractéristique de l’artiste, même si l’étroitesse dimensionnelle du panneau limite le peintre dans le développement de sa vision spatiale. Le manque de profondeur du tableau gêne la lecture de l’œil. Il y a étouffement de l’espace d’autant plus que le spectateur ne ressent aucune impression de mouvement en cours : la Vierge ne bouge pas et l’Enfant parait arrêté dans son action. Plus grave encore, la main de la Mère tenant le fruit est grossière. Elle présente un poignet épais et lourd, massif. Le petit doigt est pratiquement inexistant. Le peintre s’est montré très malhabile. Le résultat de ce manque de qualité expressive c’est que le geste devient antinaturel, chose impensable pour une œuvre de Léonard.
L’allongement du cou de la Vierge ainsi que le motif de l’enfant Jésus debout sont inconnus dans le corpus avéré de l’artiste. Revenons au paysage : les montagnes du fond sont trop paisibles, trop simples en comparaison de celles que le florentin peint habituellement et qui sont découpées, abruptes, violentes.
Les couleurs sont lourdes, inertes, fades que ce soit le rouge de la robe, le bleu du manteau ou le vert de l’intérieur de ce dernier. Le manque de luminosité assombrit le tableau. Le pire réside dans le fait qu’aucune lumière n’émane du panneau, à l’opposé de ce que nous voyons d’habitude.
Une comparaison avec « La Madone à l’œillet », chronologiquement proche, s’impose donc. La tête de la Mère est mêmement située devant un mur, entre deux fenêtres ouvrant sur des fonds de paysages se terminant par des montagnes au loin. Les deux visages présentent le même angle d’inclinaison, des yeux mi-clos aux paupières baissées, des joues lisses, une bouche fine aux lèvres étroites. En revanche le geste du bras et de la main droite, la position de cette main dans l’espace, la qualité picturale des doigts, sont inexistants ici, tout à l’opposé de la Vierge de Munich.
Nul ne s’étonnera de notre conclusion : ce petit panneau n’est pas de Léonard de Vinci. Une relation avec Lorenzo di Credi, condisciple de l’artiste dans l’atelier de Verrocchio, est probable. D’ailleurs les couleurs, notamment les bleus, se rapprochent de sa palette.
- LA PETITE ANNONCIATION
Ce panneau pose une seule question : est-il oui ou non l’œuvre de Léonard ?
En premier lieu : y eut-il collaboration ? Évidemment, non ! Le panneau a été créé d’un seul jet et son unité saute aux yeux. (Louvre Vers 1475 – 1478, 0,16 m x 0,60 m.)
Le dessin et le modelé sont assez finis. Une certaine cohésion organique due au dessin sous-jacent fait penser à Léonard. Que l’on observe la touche qui est l’écriture du peintre : elle court dans tous les sens, elle grimpe le long du mur, s’épaissit lourdement autour du pupitre. L’espace est beurré de couleurs inertes. Quant au tapis, il est illisible. Les gestes de l’Ange sont imprécis, comme dans le brouillard. Les mains de Marie sont correctement dessinées mais molles. Les regards sont vides. L’arrière-plan de paysage est noyé dans une brume verdâtre. Les arbres sont noircis, morts.
Quant à l’aspect lumineux du tableau, il est introuvable. Le spectateur ressent une sensation d’étouffement tant l’espace est anéanti. Il n’y a aucune transparence des couleurs.
Le mouvement des mains de l’Ange est bien le même que celui de l’Annonciation de Florence mais les doigts sont ampoulés, malhabiles à exprimer l’immatérialité. Les deux doigts levés de la main droite sont des caricatures, la main gauche retombe avec mollesse. Elle est irréaliste avec ses doigts trop longs, trop écartés, sans structure organique. La manche de l’ange sort d’un mauvais pressing. Le vêtement de la Vierge est pesant, aucun vent ne le soulève. Marie est mal peignée et il n’y a pas de boucles de cheveux.
Il n’y a pas de lumière spéciale mais une uniformité ennuyeuse de l’éclairage, preuve d’indigence.
Nous ne voyons rien de léonardien dans cette peinture en comparaison des œuvres avérées, examinées précédemment. Quelle lourdeur d’exécution ! Le génie du Vinci brille par son absence dans ce panneau : inexpressivité, indigence technique, incohérence des parties avec le tout…
Certains ont voulu voir dans cette peinture la main de Lorenzo di Credi. Elle nous semble indigne de ce condisciple de Léonard dans l’atelier de Verrocchio.
Jacques Tcharny
Prochain article: La Dame à la résille de perles, Léda et Bacchus
À suivre …!
Récapitulatif des précédents articles sur Léonard de Vinci parus dans WUKALI
La Madone Litta de Leonard de Vinci au musée de l’Ermitage
Léonard de Vinci au Louvre et à Londres
Le Baptême du Christ et l’Annonciation
Léonard de Vinci. Les cartons du Louvre et de la National Gallery (suite 9)
L’Adoration et Portrait d’un musicien
[La Madone Benois et Saint Jérôme
->http://www.wukali.com/La-Madone-Benois-et-Saint-Jerome-de-Leonard-de-Vinci-suite-7-1981?var_mode=calcul#.VRupS8anqEQ]
Autour de La Dame à l’Ermine et la Belle Ferronnière de Léonard de Vinci
[Le catalogue des peintures de Léonard de Vinci #3. Ginevra Benci, Dame à l’oeillet
->http://www.wukali.com/Le-catalogue-des-peintures-de-Leonard-de-Vinci-3-Ginevra-Benci-Dame-a-l-oeillet-1870#.VL5zesbc6EQ]
Le catalogue des peintures de Léonard de Vinci. #1 Mona Lisa
Analyse des peintures de Léonard de Vinci
LÉONARD DE VINCI s’invite à Buckingham Palace
[Authentification d’un dessin de Léonard de Vinci
->http://www.wukali.com/Authentification-d-un-dessin-de-Leonard-de-Vinci-157#.VL50vcbc6ER]
WUKALI 24/06/2015
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Illustration Annonciation: © Musée du Louvre/A. Dequier – M. Bard. M.I 598