At the origins of the Tachism movement


Cette rétrospective du Musée Granet d’Aix-en-Provence couvre la quasi-totalité du parcours de [**Pierre Jacob*] dit [**Tal Coat*] : 1925 à 1985

[**Tal Coat*] («front de bois» en breton) fut un artiste inspiré par Cézanne le père de l’art moderne, il choisit, dès les années 40, de s’installer dans la ville d’Aix, au coeur des paysages et des lieux emblématiques- notamment Château Noir – rendus célèbres par [**Cézanne*]. « L’exposition présente une très longue période d’activité et de création. » commente [**Bruno Ely*], conservateur en chef du musée Granet d’Aix-en-Provence, commissaire de l’exposition avec [**Jean-Pascal Léger*]. Il y a à peu près une vingtaine d’années, « à l’Espace 13 » lieu d’exposition aujourd’hui fermé, était organisée une jolie exposition sur la période aixoise de Tal Coat.. Il était vraiment important pour moi de restituer les années aixoises, en présentant au public ce qui avait précédé et ce qui avait suivi cette période. On mesure ainsi beaucoup mieux l’évolution de l’œuvre de l’artiste, le passage de cette figuration qui marque ses débuts vers quelque chose que l’on ne va pas appeler « l’abstraction » mais plutôt de la « non figuration » , précisera Bruno Ely.

En effet, ce qui est capital chez cet artiste, c’est ce rapport à la nature, ce lien à la nature qui sous-tend en permanence sa création, même si, par la suite, il réalisera des œuvres informelles ou non figuratives. « Il ne s’agit pas d’œuvres abstraites. Le public saisira la nuance, souvent très subtile, mais qui est une réalité » reconnaît Bruno Ely.

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[**Tal Coat*] est reconnu mondialement. Le sortir de l’oubli ne ne fut pas simple. Bon nombre de galeries ont essayé de le ramener sur le devant de la scène. En vain. Tal Coat, abandonné par l’institution française, va revivre dans le cadre de la création, à Kerguéhennec, d’un centre de recherche qui lui est dédié. La collection Tal Coat (1905-1985), initiée en 2007, est le fruit de l’engagement d’une collectivité et du soutien de collectionneurs et nous en profitons aujourd’hui à Aix. En effet, une vingtaine d’oeuvres de la collection départementale est présentée dans l’exposition.|left>

Tal Coat naît en 1905 à Clohars-Carnoët dans un petit village breton, à dix kilomètres de Quimperlé (Finistère) très loin de la Provence mais à quelques kilomètres de Pont-Aven. Un milieu favorable pour la peinture qui accueillera comme on le sait de nombreux peintres. Il est dans une famille qui n’a aucun lien avec l’art. Son père marin-pêcheur mourra à la Première Guerre mondiale. Tal Coat sera pupille de la nation, exercera plusieurs métiers, mais décidera de devenir peintre. Il « montera » à Paris dans les années 20. Comme les peintres de l’entre- deux-guerres, il se rapprochera de la figuration. Une figuration qui évoque la période bleue ou rose de[** Picasso*], explique Bruno Ely, avec des personnages esseulés, isolés, des saltimbanques, des rejetés de la société. C’est cette thématique qui domine véritablement à cette époque et qui inspire également [**Pierre Tal Coat*]. On pense également à [**Gauguin*], dont on peut voir sur certaines toiles l’influence très directe, dans la couleur et dans la morphologie des personnages.

Tal Caot vit dans le Paris de l’époque, dans le Paris où les Halles sont au cœur de la capitale. Dans d’étonnantes peintures on peut voir des quartiers de viande côtoyer des nus de dos, une peinture très concrète mais dans laquelle il y a également une forme de misérabilisme qui marque cette peinture figurative du début du XXème siècle.|center>

Dans ces années 20/30, il aura la chance de vivre dans un milieu artistique très favorable, déjà grâce à la porosité qui existe dans le cercle des artistes et aux relations que tous peuvent entretenir. Le tout jeune Tal Coat va fréquenter Picasso ou encore [**Gertrude Stein*], la sœur de Léo Stein, une famille américaine qui montera une collection fabuleuse d’œuvres d’art. On a pu découvrir au Grand Palais fin 2011/début 2012 bon nombre de ces chefs-d’œuvre : des Matisse, des Picasso, des Renoir, des Gauguin, des Cézanne, des Braque…

Tal Coat va représenter Gertrude chez elle et on admire ces magnifiques portraits, où il la peint, sans complaisance, ici, les cheveux coupés à la garçonne ou là encore, toute chevelue, ébouriffée et très colorée dans une facture expressionniste.

Comme tous les artistes de sa génération, il sera marqué par la guerre civile espagnole et réalisera une série des massacres dont on peut voir divers tableaux à l’exposition. A découvrir notamment un tableau de grand format, récemment acheté par le Centre Pompidou, musée d’Art moderne, dans laquelle Tal Coat va mettre au point une manière de peindre là encore très expressionniste. On peut le voir à travers le traitement des visages, les couleurs de la palette, la nature qui se fait agressive, elle est en feu… Ce même thème traité dans des petit formats

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Le peintre va fréquenter [**Giacometti*] qui deviendra lui aussi un de ses amis intimes. Dans une vitrine, on s’émerveille devant des petits bronzes chronologiquement antérieurs à ceux de Giacometti qui ne sont pas sans évoquer ceux du grand sculpteur. Un travail très intéressant que Tal Coat de son côté ne poursuivra pas. La peinture l’emportera. A rappeler que l’on peut voir dans la collection Meyer exposée au Musée Granet, de superbes œuvres de Giacometti.

Quelques mots sur l’affiche « La femme au manchon ». Un choix assez osé car cette peinture ne représente pas l’idée que l’on se fait de l’œuvre de Tal Coat. « Elle est à l’opposé de cette non figuration » soulignera Bruno Ely. « On voulait montrer que l’œuvre de l’artiste était pour moitié figurative, pour moitié non figurative. Ici, cette figuration est très marquée par le mouvement artistique qui nous mène à [**Bernard Buffet*], déjà dans cette façon de rehausser la peinture par un dessin. Celui-ci sera marqué d’un trait noir chez Buffet, et d’un trait plus rouge chez Tal Coat ».

L’exposition permet encore de prendre la mesure de Tal Coat, coloriste. Il y a par ailleurs une résonnance surréaliste dans le travail de l’artiste. Dans les escaliers, une œuvre immense de 1974 a trouvé sa place. Il s’agit d’une œuvre de la dernière période, mais à cause du format, il a fallu faire une entorse à la chronologie. Elle annonce la monochromie que l’on va découvrir dans les dernières salles. Pigments, couleurs, font partie de ses recherches principales. Mais avant, nous plongeons dans la période aixoise.

1940, Tal Coat est démobilisé. Il se retrouve à Montauban. Il rejoindra souvent Aix à pied ; c’est un grand marcheur. Il s’installera dans le sud, encore zone libre à cette époque-là. A Aix de 1940 à 1943, puis à Château Noir, de 1943 à 1956 sur la route du Tholonet, dans les paysages de Cézanne. C’est à partir de là qu’il passera de la figuration à la non figuration. La période aixoise est donc une période charnière.

L’exposition montre bien comment cet artiste est passé d’une représentation d’une certaine réalité vers quelque chose de non figuratif. On navigue dans une période troublée de l’existence à travers des peintures tourmentées voire dramatiques. Des paysages encore, et des personnages perdus dans une nature hostile, balayée par les vents. Aix jusqu’alors zone libre est occupée et Tal Coat fera partie d’un mouvement proche de la résistance. Sa fille, née en 1941 dira que des grenades avaient été attachées sous son berceau pour être sûr qu’on ne les découvrirait pas. Le milieu artistique d’après-guerre est formidable dans la région. Beaucoup d’artistes, de poètes, de philosophes, avaient transité par Aix et Marseille. Tal Coat deviendra l’ami du poète [**André du Bouchet*], ou encore d’[**André Masson*] revenu des Etats Unis qui achètera une maison sur la route du Tholonet, au pied de la montagne Sainte Victoire. Une belle période d’échanges autour de Cézanne, mais aussi autour de la peinture chinoise, découvert par Masson à Boston. Les Sainte Victoire exposées ne sont pas celles de Cézanne. Ils ne voulaient du reste pas se rapprocher artistiquement de Cézanne. Mais il s’agit d’une montagne mouillée, démultipliée, comme baignée dans des vapeurs de brouillard, donc bien différente. Et là encore, on peut voir comment on peut passer de la figuration à la non figuration de manière très compréhensible.
Pour l’anecdote, Tal Coat et Masson, tous deux aux caractères bien trempés finiront brouillés. |center>
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On peut découvrir tout au long de l’exposition des autoportraits très intéressants mais aussi très différents suivant les époques. L’exposition du musée Granet est un bel évènement qui clôture l’année dédiée à Tal Coat. A découvrir jusqu’au 11 mars 2018.

[**Pétra Wauters*]|right>


[**Tal Coat, la liberté farouche de peindre*].
Jusqu’au 11 mars 2018
[**Musée Granet. Aix-en-Provence*]

Le catalogue de l’exposition est publié par les éditions Somogy. Pierre Tal Coat 1905 1985: Près de deux cents reproductions et documents, souvent inédits, de textes de l’artiste lui-même, accompagnés des contributions de connaisseurs de son oeuvre, venus d’horizons très divers : Daniel Dobbels, Bruno Ely, Josef Nadj, Alain Paire, Georges Salles, Anne de Staël et Jean-Pascal Léger.
180 illustrations

[**Jean-Pascal Léger*], écrivain, éditeur, commissaire d’expositions indépendant, directeur du Centre d’Arts plastiques de Royan a connu Tal Coat en 1977, peu après sa rétrospective au Grand Palais, à Paris. Il a également conçu de très nombreuses expositions autour de l’œuvre de l’artiste.


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WUKALI 11/12/2017)]

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