The Photo Novel, a bestselling genre of popular literature worldwide
De tous les genres littéraires, car oui, il s’agit bien d’un genre littéraire, le roman-photo est à la fois le moins connu et le plus méprisé. Il est souvent associé à la niaiserie sentimentale, à la frivolité ou considéré comme le « cinéma du pauvre ». Disons qu’il n’a pas bonne presse, mais après avoir vu l’exposition du Mucem, nul doute, vous allez changer d’avis car visiblement, le roman-photo a bien des choses à nous raconter. Ne vous attendez pas à voir une exposition uniquement constituée de magazines sous vitrines.
L’une des deux commissaires de l’exposition,[** Frédérique Deschamps*], s’en était étonnée un jour où elle tombait par hasard sur un exemplaire sauvé de la benne à ordures. « J’étais alors iconographe dans un groupe de presse, confie t-elle, et comme je m’intéresse beaucoup à l’image, j’ai décidé de faire une enquête sur ce curieux sujet… Au fil des découvertes, il m’a paru évident que cette histoire pouvait être racontée sous la forme d’une exposition ».
[**Marie-Charlotte Calafat*], également commissaire de l’exposition, confirme que le roman-photo mérite de ne pas être systématiquement subordonné à une image rétrograde. «Il tisse des liens avec les revendications sociales de son temps. Le sens de la révolte et des conflits sociaux, des questions autour du divorce, des droits des femmes au travail…»
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Parcours de l’exposition
1. Le roman-photo sentimental
2. Le salon de lecture
3. Avatars et détournement
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Né en 1947 en Italie, le « vrai » roman-photo est le roman-photo sentimental.
C’est le plus gros succès éditorial de l’après-guerre, et restera pendant plus de vingt ans le best-seller de la littérature populaire en Méditerranée. Les lecteurs – en majorité des lectrices – se comptaient par millions ; dans les années soixante, on estime qu’un Français sur trois lisait des romans-photos.
Jalousies et trahisons, tendres baisers et cœurs brisés, décapotables et micro-ondes, Dolce Vita et lutte des classes : « Roman-Photo », un feuilleton riche en surprises, rebondissements et coups de foudre (esthétiques). Cette première section de l’exposition met aussi en avant de petits chefs d’œuvre totalement inédits comme ceux de la collection de l’éditeur italien [**Mondadori.*] Elle fait aussi la part belle aux nombreuses célébrités qui ont tourné dans des romans-photos [**(Sophia Loren, Gina Lollobrigida, Johnny Hallyday, Mireille Mathieu, Dalida*], etc…) et retrace la mondialisation du roman photo qui s’est exporté —puis fabriqué— à Madrid, à Caracas, à Beyrouth ou à Buenos Aires…
L’exposition montre, dans sa deuxième partie, que le roman-photo n’est pas seulement une histoire à l’eau de rose.
[**Avatar et détournement.*]
Ce moyen d’expression, a été repris et détourné de façons très diverses. L’une des productions les plus importantes fut celle du genre « érotico-pornographique » – un sujet traité dans l’exposition dans une salle interdite aux moins de 18 ans. Abordé aussi le roman-photo satirique avec Hara-kiri et le [**Professeur Choron*]. On découvre encore le roman-photo qui aborde les sujets politiques. Etonnant du reste de voir dans l’exposition comment les détracteurs du genre, vont l’utiliser. Enfin, la dernière partie s’intéresse à la veine « artistique » du roman-photo à partir de La Jetée, le film de [**Chris Marker*] qui, faut-il le rappeler, est sous-titré « Photo-roman ».
A l’époque, les moyens mis à la disposition des réalisateurs étaient exceptionnels. Galvanisés par le succès, les éditeurs investissaient sans compter : on partait tourner dans des décors naturels, on utilisait les meilleures optiques, et les équipes étaient souvent aussi nombreuses que pour un film. Grâce au fonds Mondadori, l’expo du Mucem permet de nous faire découvrir ces images avant que celles-ci ne soient détournées pour la publication. « Dans l’exposition, nous mettons en miroir ces images originales avec leurs versions publiées, où celles-ci sont recadrées, données dans une version synthétique, et imprimées sur du papier de mauvaise qualité. » précise Frédérique Deschamps.
Un décalage qui s’explique. « En effet, ces compositions, très riches, étaient systématiquement modifiées, recadrées pour s’adapter au support. Dans le roman-photo, l’image n’a pas vocation à être belle. Elle doit avant tout servir un récit dont la lecture se veut rapide et simple. Les traits au crayon sur les contacts retrouvés attestent de recadrages sauvages avant publication, toute information superflue disparaissant pour ne privilégier que le premier plan. L’image se concentrait sur les personnages et leurs conflits intérieurs, puisque c’est presque toujours de cela dont il est question dans le roman-photo. Au second plan, un minimum d’éléments suffisait à illustrer le contexte : un palmier pour évoquer l’Afrique, un chandelier pour un château… L’image était savamment construite pour être simple, sans hors-champ ni contrechamp. » conclut la commissaire d’exposition.
Commissaires de l’exposition :
— Frédérique Deschamps, journaliste et iconographe, elle a longtemps collaboré au journal Libération. Elle a ensuite dirigé le service photo du Monde au moment du lancement de la nouvelle formule du quotidien. Elle est aujourd’hui iconographe free lance.
—Marie-Charlotte Calafat, adjointe du département des collections et ressources documentaires du Mucem, elle est responsable du pôle documentaire et du secteur Histoire du musée.
Scénographie : Cécile Degos
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WUKALI 23/12/2017)]