La Bibliothèque nationale de France souhaite acquérir un exceptionnel bréviaire réalisé pour le roi de France Charles V et lance une souscription jusqu’au 31 décembre 2023 afin que ce trésor, classé œuvre d’intérêt patrimonial majeur, rejoigne les collections nationales.
Première Bibliothèque royale française, la librairie de Charles V compta jusqu’à un millier de manuscrits qui furent largement dispersés au XVe siècle. Seuls 185 des volumes que contenait la Librairie royale entre 1380 et 1424 ont été identifiés à ce jour, dont près de la moitié sont conservés à la Bibliothèque nationale de France au sein de son département des Manuscrits. Ils constituent le cœur historique de ses collections. Le Bréviaire à l’usage de la Sainte-Chapelle y aurait donc toute sa place.
Un manuscrit liturgique royal à l’usage de la Sainte-Chapelle
Ce luxueux manuscrit contenant la partie d’été du bréviaire fut réalisé pour le roi Charles V, à Paris, dans les années 1370. Il constitue un volume inédit et méconnu à ce jour des spécialistes qui, depuis les travaux fondateurs de Léopold Delisle au début du XXe siècle, s’efforcent de reconstituer la librairie de Charles V.
Richement illustré de trente-trois miniatures et orné d’un décor secondaire des plus raffinés, l’ouvrage présente toutes les caractéristiques d’une commande royale. Ainsi, le calendrier, établi à l’usage de la Sainte-Chapelle de Paris, mentionne les services funéraires des rois et de plusieurs reines de France.
Un chef-d’œuvre de l’enluminure gothique française
L’apparition sur le marché de ce manuscrit vient étoffer de façon notable le corpus de l’une des productions les plus abouties de l’enluminure gothique, celle du Maître de la Bible de Jean de Sy. La majorité des peintures de l’ouvrage, qui témoignent du raffinement atteint par les enlumineurs travaillant pour la cour de Charles V, sont attribuables avec certitude à cet artiste ou à ce groupe d’artistes actifs à Paris entre 1350 et 1380. Le style, marqué par l’influence du célèbre peintre Jean Pucelle, se démarque par une tendance au naturalisme, dont témoignent les paysages ponctués de bouquets d’arbres, la vivacité des figures ou encore la variété des animaux. Les scènes, parfois peintes en semi-grisaille, dénotent un sens aigu de la narration.
Un second enlumineur, connu sous le nom de « Maître du Livre du sacre de Charles V », est l’auteur d’une douzaine des miniatures du manuscrit, dont celle représentant le roi de France agenouillé devant les reliques de la Passion du Christ, pour lesquelles Saint Louis fit édifier la Sainte- Chapelle entre 1241 et 1248 (f. 364v). Ce peintre fut l’un des collaborateurs habituels de l’artiste principal et participa à plusieurs grandes commandes royales entre 1350 et 1378. De par sa provenance ce bréviaire aurait, de fait, toute sa place dans les collections de la BnF, qui trouvent leur origine dans la librairie que le « roi sage » installa au palais du Louvre vers 1368.
La Bibliothèque est d’ailleurs engagée, depuis 2016, dans un ambitieux programme d’édition scientifique des inventaires de la librairie de Charles V et d’identification systématique des ouvrages conservés.
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