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Rameau et Mahler dans un même programme au festival de Pâques d’Aix-en-Provence

par Pétra Wauters

On y danse avec l’un et on y chante avec l’autre!

Mercredi 27 Mars 2024 – 20h30, au Grand Théâtre de Provence on retrouve le charismatique chef François-Xavier Roth . On n’a pas oublié son formidable Vaisseau fantôme de Wagner, l’un des moments les plus forts du Festival de Pâques d’Aix-en-Provence, l’année dernière, pour la 10ème édition. Il était à la direction de l’orchestre du Gürzenich ainsi que du chœur de l’Opéra de Cologne

Le chef d’orchestre revient avec un programme Rameau et Mahler, une audacieuse association de compositeurs. On reconnait la marque de fabrique de l’orchestre « Les Siècles ».

Il fallait oser, dans une même soirée, programmer Jean-Philippe Rameau (1683-1764) Les Indes galantes, suites d’orchestre et Gustav Mahler (1860-1911) avec son immense Le Chant de la TerreCela peut paraitre un peu surprenant de prime abord, car ces deux œuvres sont très éloignées l’une de l’autre en temps, déjà. François-Xavier Roth aime les mariages étonnants et trouve un lien évident à ces deux œuvres : l’idée de voyage et l’idée de l’ailleurs qui donnent à rêver. On va des Amériques à la Perse pour l’opéra-ballet, une évocation exotique,  et on rejoint l’Extrême-Orient pour Le Chant de la terre,  évocation chargée d’émotion et de poésie. 

En première partie, Les Siècles interprètent la pétillante Suite des Indes galantes de Rameau, œuvre majeure du répertoire baroque, tombée dans l’oubli pendant plus de deux siècles jusqu’à sa redécouverte progressive au XXe siècle. On a tous à l’esprit les danses superbes du ballet, et ce côté scénographique pourrait nous manquer, mais il n’en est rien. La magie opère, et tous les instrumentistes, une cinquantaine tout de même, nous font danser et voyager pour nous emmener loin. On est charmé par tant de précision et d’éclat de la part du chef très en forme, sautillant et dansant tout à la fois.  Il dirige d’une main, alors que dans l’autre il tient la baguette pour imprimer les pulsations de quelques danses sur un tambour. Les musiciens de son orchestre  « Les siècles » trouvent toutes les couleurs, tous les accents souhaités, à commencer par les vents juste fabuleux. 

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Après l’entracte, place au monument Le chant de la TerreLes musiciens changent d’instruments. N’oublions pas que dans cette formation,  chaque répertoire abordé est joué avec les instruments d’époque appropriés. 

Pour traduire toute l’énergie et la variété́ de couleurs de chaque lied, François-Xavier Roth a convié deux des plus belles voix de leur génération, le ténor Andrew Staples, magistral, et la contralto québécoise Marie-Nicole Lemieux, divine. On reste scotché par la voie ambrée, puissante, chaleureuse de la contralto qui restitue à la perfection la profondeur des Chants de la Terre de Mahler. On l’accompagne avec bonheur dans les moments de joie, de plaisir, de sensualité, mais aussi de souffrance, car une ombre menaçante et sombre plane en toile de fond. On vit l’œuvre entière, pris par cette grande réflexion sur l’existence humaine. Tout l’orchestre chante, pas seulement les chanteurs !  Chaque instrument est traité à la manière d’un soliste, la clarinette dans ses couleurs funèbres, le haut-bois dans l’interprétation de la peine, l’âme endolorie, le violoncelle pour le bonheur,  cuivres et timbales de la force et de la jeunesse, flûte de la joie et de l’insouciance. … Tous endossent plusieurs rôles.  

Andrew Staples et Marie-Claude Lemieux chantent l’amour de la vie, mais entrainent également vers un pessimisme profond. Leur voix et l’orchestre tout entier sont en quête d’absolu. L’homme face à ses contradictions, sa passion, dans ce monde si fragile. On le suit vers l’ailleurs qu’il entrevoit. Arrive l’« Abschied » (l’Adieu), le dernier titre du cycle, merveilleusement et savamment orchestré. Il nous parle de tristesse, de solitude.

Ewig, Ewig, Ewig… Éternellement, éternellement, éternellement…  La contralto Marie-Claude Lemieux éclaire cet « Abschied » de son timbre lumineux et vibrant. La musique part au-delà. Concert fabuleux. Chef, chanteurs, musiciens, ovationnés pour cette interprétation magistrale du « Chant de la Terre » .

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