Le Centre Pompidou-Metz est une belle machine qui propose à intervalles réguliers de magnifiques expositions qui font date. Depuis son ouverture avec « Chefs d’oeuvre », puis « Sol Lewitt » et « 1917 » qui vient de fermer ses portes, l’excellence a présidé au choix des sujets et des thèmes abordés ( ce qui n’est pas toujours le cas hélas avec les expositions intermédiaires comme l’actuelle exposition’« Frac forever » dont la réalisation indigente dans les ténèbres d’une salle plongée dans le noir total, le public éclaire les photographies avec un boitier électrique, le dispute à l’inepte).
2013 annonce de belles surprises avec trois intéressantes thématiques qui éclairent d’un jour nouveau l’aventure de l’art comme interprétation, représentation ou révolte .
Trois sujets: Une brève histoire des lignes, Vues d’en Haut qui nous permettra de prendre de l’altitude et Allen Ginsberg et la Beat génération dont l’influence bien au delà des cénacles artistiques a bouleversé le monde
Pierre- Alain Lévy
– Une brève histoire des lignes
Cette exposition propose un point de vue original sur la pratique du dessin, et, plus largement, du tracé, de 1925 à nos jours
du 11 janvier au 1er avril 2013
– Vues d’en haut
L’exposition revient sur un sujet de fascination : la vue de la terre depuis le ciel, des premières photographies aériennes au XIXe siècle jusqu’aux images satellites au XXIe siècle, tout en analysant la manière dont cette vue d’en haut a transformé le regard des artistes.
Depuis quelques années, la vue aérienne suscite un regain d’intérêt, comme en témoignent le succès des photographies prises par Yann Arthus-Bertrand depuis son hélicoptère ou la popularité de Google Earth. L’exposition Vues d’en haut prend appui sur cette actualité pour remonter aux origines de la photographie aérienne et explorer son impact sur la création artistique et, de fait, sur l’histoire de l’art.
Les premiers clichés aériens pris par Nadar, aux alentours de 1860, permettent aux artistes de découvrir pour la première fois le monde réel vu du ciel. La hauteur du point de vue brouille le relief, les saillies et les creux. La terre devient une surface plane, où les repères se confondent et se perdent. Elle devient méconnaissable.
Fascinés par ce basculement optique, les peintres impressionnistes tels Gustave Caillebotte, Camille Pissarro et Claude Monet commencent à faire disparaître l’horizon de leurs tableaux en aplatissant les paysages urbains, tandis que le photographe de la presse illustrée Léon Gimpel exploite l’effet spectaculaire de la vue plongeante.
Avec l’essor de l’aviation, la vue d’en haut séduit également l’avant-garde, des premières compositions cubistes de Pablo Picasso et Georges Braque jusqu’aux vues urbaines de Fernand Léger et Gino Severini, en passant par « La Tour Eiffel » de Robert Delaunay.
Suite au déclenchement de la Première Guerre mondiale, la peinture abstraite de Kasimir Malévitch et El Lissitzky, ou encore celle de Piet Mondrian, s’inspire des images aériennes de champs de bataille. Dans les années 1920, les photographies prises du ciel circulent au Bauhaus, où elles fascinent Paul Klee, Vassily Kandinsky et Laszlo Moholy-Nagy. En naît un nouveau style photographique, la Nouvelle vision, qui bascule chez Germain Krull, André Kertesz ou Alexandre Rodtchenko les perspectives pour faire apparaître un monde étrange et irréel. En parallèle, l’enivrement provoqué par la vue d’en haut, la vue des dieux et des puissants, marque aussi bien les collages dada que les tableaux italiens de l’aéropeinture futuriste. On le retrouve par ailleurs en architecture chez Le Corbusier.
À la fin de la Seconde Guerre mondiale, les grands espaces américains sont sublimés dans les peintures abstraites de Sam Francis, Lee Mullican et Georgia O’Keeffe. La vue aérienne se révèle constitutive du Land Art chez Robert Smithson ou Dennis Oppenheim. Elle permet de dévoiler les structures invisibles à l’œil, tels les réseaux d’urbanisation de la ville moderne qui intéressent autant les artistes que les architectes. Aujourd’hui, les images du monde vu du ciel prennent une fonction de veille face aux dangers écologiques par exemple. La vue d’en haut est devenue « super-vision ».
Suivant un fil chronologique jusqu’en 1945, puis abordant l’art d’après-guerre, le visiteur évolue, à travers huit chapitres thématiques, dans le temps mais aussi dans l’espace, au fur et à mesure des avancées technologiques, puisque les premières œuvres présentent une vue depuis un ballon, vue qui peu à peu s’élève à hauteur d’avion, puis de satellite.
Jusqu’à nos jours, plasticiens, photographes, architectes et cinéastes ne cessent d’explorer les facettes de cette vision insolite. Sur plus de 2000 m2, l’exposition plonge dans le rêve d’Icare et offre à travers plus de 350 œuvres en dialogue – peintures, photographies, dessins, films, maquettes d’architecture… – un panorama inédit à travers l’art moderne et contemporain.
du 17 mai au 7 octobre 2013
Grande Nef et Galerie 1
du 1er juin au 9 septembre 2013
Studio
– Allen Ginsberg et la Beat Generation
Reality Sandwiches
une exposition numérique sans précédent en Europe.
cette exposition dématérialisée se tiendra simultanément dans quatre lieux distincts :
– au Fresnoy-Studio national des arts contemporains à Tourcoing,
– aux Champs Libres à Rennes,
– au ZKM-Centre d’Art et de Technologie des Médias de Karlsruhe,
– et au Centre Pompidou-Metz.
Au Centre Pompidou-Metz, l ‘exposition aura lieu dans le Studio, un espace de 400 m2 dédié à la diffusion du spectacle vivant et de la performance.
Jean-Jacques Lebel son commissaire:
« L’exposition Allen Ginsberg et la Beat Generation, Reality Sandwiches est un collage virtuel en mouvement, un environnement multimédia déambulatoire, non pas linéaire, mais labyrinthique, déployé sur sept écrans, de façon à offrir aux visiteurs la possibilité de se promener dans et à travers une forêt d’images et de textes de la Beat Generation, guidés par le poète Allen Ginsberg, son principal catalyseur. Il s’agira de découvrir les nombreux aspects de ce que fut ce « soulèvement de la jeunesse » (d’abord américaine, puis mondiale), qui inventa non seulement une rébellion, une écriture, mais un mode de vie, une vision poétique du monde.
Cet assemblage inédit comprendra des extraits de films célèbres ou méconnus (de Robert Frank, Anthony Balch, François Pain, Jean-Michel Humeau, etc …), des vidéo reportages — dont d’importants inédits — et des entretiens divers filmés à Paris, aux USA, ou ailleurs, de nombreux documents photographiques historiques ou bien inconnus de Allen Ginsberg lui-même, de Richard Avedon, de Françoise Janicot, de Robert Chapman, de Gérard Malanga et bien d’autres qui constituent des portraits individuels ou de groupe des principaux protagonistes de cette galaxie, à commencer par Ginsberg, Burroughs, Kerouac, Corso, Ferlinghetti, McClure, Snyder et des entretiens inédits de Ginsberg par Jean-Jacques Lebel tournés à Paris par Alain Jaubert et Alain Fleischer. »
Illustration/ Lee Mullican (1919-1998). Section from the Burlap Plain, 1951. 40″x50″, huile sur toile