Art market. Situation in France 2013


Artprice est devenu une référence dans le marché de l’art, et publie chaque année une analyse qui fait autorité. Nous vous en présentons la séquence ayant trait au marché français.


La France a de nombreux atouts, dont son rayonnement culturel et patrimonial international et des foires bien positionnées, telles que la Fiac, Paris Photo ou Art Paris . Elle cumule néanmoins les handicaps qui freinent son développement sur un marché mondialisé .

Son corporatisme et sa réglementation protectionniste lui ont fait perdre du terrain tandis que New York et Londres ancraient leur suprématie, que Christie’s et Sotheby’s posaient leurs jalons pour s’adapter aux mutations du marché . Elle est aujourd’hui la 4ème place de marché mondiale et Paris la 5ème place forte pour la vente d’art contemporain après New York, Londres, Pékin et Hong Kong. Les bons résultats de Christie’s, Sotheby’s et Artcurial permettent à Paris de regagner du terrain face à Shanghai : il s’est adjugé 29,2 m€ en œuvres contemporaines cette année, un chiffre record (progression de +35,6% par rapport à l’année dernière) généré grâce à un positionnement plus international des grands opérateurs parisiens. Car la France a de nombreux amateurs d’art mais compte peu de gros collectionneurs, d’où l’importance pour les grands opérateurs de ventes d’appâter les acheteurs étrangers.

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Leurs armes ? Qualité et diversité de l’offre, fichier clients, étude minutieuse des estimations, facilité d’enchérir en ligne pendant la vente physique . Christie’s et Sotheby’s Paris adaptent donc leurs catalogues et leur stratégie marketing pour éviter que le marché français ne se contente d’une offre et d’une demande locales.

Les ventes parisiennes doivent être alimentées en chefs-d’œuvre dignes d’intérêt hors des frontières pour stimuler les résultats. La plus belle réussite de l’année est le fait de Sotheby’s qui dispersait, à Paris, la collection Viviane de Witt . Cette collection comprenait une œuvre monumentale de Jean-Michel Basquiat intitulée Crown hotel (mona lisa black background) et adjugée 5 m€ (5.697.500€ frais inclus, le 5 juin2013.). Grâce à cette toile, Sotheby’s enregistre à la fois la meilleure enchère contemporaine de l’année en France et un record pour un Basquiat sur place. L’œuvre se serait peut-être mieux vendue à New York (son estimation haute laissait d’ailleurs espérer un résultat de 7 m€). Néanmoins, ce niveau de prestige s’avère si rare dans une vente parisienne que l’œuvre a bénéficié d’emblée d’une importante couverture médiatique, alors qu’elle se trouverait noyée au milieu d’autres pièces d’égale importance dans une vente à Londres ou à New York.

Pour intéresser les amateurs internationaux, la place de marché parisienne doit attirer des œuvres de cette trempe. Et pour les attirer, il lui faut maintenir son fragile équilibre et éviter les changements anxiogènes. Or, l’économie ralentie en France donne lieu à des tentatives de remaniements juridiques et fiscaux qui pourraient encore creuser l’écart entre Londres et Paris : un premier coup de tonnerre retentit à l’automne 2012 avec le vieux débat – régulièrement enterré et déterré – concernant l’extension de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) aux œuvres d’art . Si un tel projet avait été appliqué, les risques de délocalisation ou de revente à l’étranger auraient eu des conséquences néfastes pour le marché de l’art français. Le gouvernement souhaitant augmenter les recettes fiscales, un autre projet tombe au début de l’été 2013 visant à relever la TVA à l’importation des œuvres d’art ( Cette TVA n’est pas récupérable . La TVA à l’importation n’existe pas aux Etats-Unis) . Cette TVA encore à 5,5% en janvier 2012, est passée à 7% et devrait atteindre les 10% à compter du 1er janvier 2014. Encore une fois, un relèvement à 10% serait au double du taux fixé par le Royaume-Uni et impliquerait une perte de compétitivité et d’attractivité pour les exposants étrangers sur les foires et pour les vendeurs qui choisiraient plus promptement Londres que Paris pour se séparer de leurs œuvres. L’Espagne et le Portugal voient leurs marchés considérablement affectés par les taux les plus lourds d’Europe, supérieurs encore aux visées du gouvernement français (13% au Portugal et taux révisé de 21% à 13% en Espagne) .

Parmi les autres signaux d’alerte pointant la fragilité du marché de l’art en France, on notera la fermeture récente de plusieurs galeries, ne supportant ni la pression fiscale ni la compétition agressive à laquelle il faut se soumettre pour rester dans la course. Sur les douze derniers mois, signalons notamment le dépôt de bilan de la galerie Sollertis à Toulouse après 25 ans de vie, la fermeture de la galerie Gaillard après 38 ans d’activité et celle d’une des plus importantes galeries parisiennes, la galerie Jerôme de Noirmont (qui a notamment travaillé avec Jeff Koons, Pierre & Gilles et Shirin Neshat). Certains dénoncent un climat malsain et un premier marché en crise dans l’Hexagone . Tandis que des galeries reconnues vident la place, des géants mondiaux prennent position avec l’ouverture de nouveaux espaces propices aux expositions monumentales, au Bourget pour l’Américain Larry Gagosian et à Pantin pour l’Autrichien Thaddaeus Ropac .

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