Venice, unique architecture, mass tourism, economy and environmental protection
Venise est un site naturellement fragile, et son lido tout autant. Voilà des années que des mises en garde sont régulièrement prononcées pour dénoncer les risques qui pèsent sur l’équilibre géologique de la cité des Doges. La ville menace de s’enfoncer et de disparaître sous les eaux, menaces induites par les installations industrielles notamment liées au raffinage pétrolier et au pompage des eaux souterraines, et plus récemment encore menaces provoquées par l’arrivée au coeur de la ville de ces colossaux bateaux de croisières qui non seulement défigurent le paysage mais dont le passage même détruit les couches sédimenteuses qui forment la lagune vénitienne.
Le gouvernement italien avait voilà quelques mois établi des restrictions sur l’arrivée de ces mastodontes des mers mais un tribunal a fait savoir que ces propositions n’auraient force de loi que dés lors des solutions alternatives pourraient être trouvées. Sept projets ont été présentés au ministre en charge des infrastructures, il doit donc dans un délai de trois mois faire connaître la meilleure solution retenue pour satisfaire aux exigences environnementales
Le 5 avril dernier le MSC Preziosa flamboyant bateau d’un tonnage de 139,400 tonneaux, inauguré en 2013, et équipé de 1751 cabines (ce qui le fait ressembler à un immeuble de plus de 10 étages, hauteur sur le pont) a pris son attache avec Venise et a fait escale pour la première fois de la saison touristique 2014 dans la cité. Son arrivée ne s’est au demeurant techniquement pas très bien passée ( voir vidéo). Les catastrophes maritimes, comme celle qui vient de toucher la Corée du Sud ou il y a quelques mois le Concordia, autre navire de croisière italien, relancent le débat sut la sécurité maritime.
Un certain nombre de propositions ont été avancées pour tenter de résoudre cette difficile équation entre contraintes géologiques et manne touristique.
D’un côté le maire de Venise souhaiterait que les bateaux puissent amarrer à Marghera, le site industriel de la ville sur la terre ferme plutôt que sur l’ile de Giudecca, tandis que le l’Autorité du port envisagerait le chenal en eaux profondes Contorta Sant’ Angelo à Venise sans avoir à naviguer dans la ville ce qui au demeurant lui rapporterait d’impressionnants droits d’accastillage. Notons que cette solution ne ferait qu’accélérer la dégradation de la lagune provoquée par la disparition des sédiments. Le bon sens tant partagé par les Vénitiens que les défenseurs de l’environnement voudrait que ce type de bateau soit totalement banni de la lagune.
De toutes ces propositions quatre d’entre elles impliquent la construction d’un nouveau terminal qui serait situé hors du Lido. Les passagers seraient conduits alors à Venise par de petits ferries. C’est dans cet esprit que revient en force le projet Venise Croisière 2.0 proposé voilà 10 ans maintenant; il implique un terminal flottant estimé d’une valeur de 128 millions € et consisterait en une jetée de 940m, large de 34m, et qui pourrait accueillir 5 navires de croisière. Les touristes seraient alors transportés par groupe de 800 vers l’actuel terminal à l’extrémité de Venise.
Pour Gherardo Ortalli, une des têtes pensantes de l’Instituto Veneto et qui travaille au sein de groupes de réflexion sur Venise sur des stratégies à long terme , «la question de ces immenses bateaux de croisière n’est qu’un symptôme et masque le vrai problème, toutes les solutions envisagées sont en fait néfastes pour la cité. La ville est devenue un parc d’attraction et cette espèce de tourisme coute plus d’argent qu’elle n’en génère»
Alessandro Goldoni correspondant de Wukali en Italie et Pierre-Alain Lévy
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