A master art forger counterfeiting American Abstract expressionist painters
Nous avions dans un précédent article publié en avril dernier dans Wukali, rendu compte de ce colossal trafic de faux en peintures découvert aux USA et qui percute de plein fouet le marché international de l’art ( voir l’article intitulé: Un peintre chinois, au coeur d’un trafic de faux en peintures) (cliquer).
Si les différents protagonistes de cette affaire font l’objet de poursuites judiciaires (intermédiaires, marchands, galeries complices), l’artiste au coeur de cette escroquerie, Pei Shen Qian, s’est hâté dès les premières révélations du scandale de quitter le Queens à New York où il était connu et de retourner dare-dare retrouver ses pénates chinoises. Il faut savoir qu’il n’existe pas de convention d’extradition réciproque entre la Chine et les USA.
Pei Shen Qian a accepté pour la première fois de donner sa version de sa responsabilité dans une interview diffusée sur la chaîne de télévision américaine ABC News. C’est à Shanghai qu’un journaliste l’a retrouvé et interviewé. Il participait notamment à une exposition collective de peintres chinois. L’artiste (ô combien !) vit aujourd’hui dans un petit appartement encombré d’une multitude de châssis peints que manifestement il signe désormais de son nom.
Dans les attendus de l’acte d’accusation déposé par les autorités judiciaires new-yorkaises, Pei Shen Quian est accusé d’avoir peint 63 faux, d’être au coeur d’un dispositif criminel initié dans les années 90 avec pour complices la marchande d’art Glafira Rosales et deux ressortissants espagnols également dans le commerce de l’art, les frères Jose Carlos et Jésus Angel Bergantinos Diaz ainsi que la galerie Knoeder à New York. L’ensemble du trafic atteignant après de multiples plaintes la coquette somme de 80 millions $.
Dans des propos empreints d’une innocence virginale et candide, l’artiste s’est dit «choqué d’apprendre que les acheteurs et collectionneurs avaient acquis ces tableaux les croyant véritablement signés de Rothko, Pollock, de Kooning etc» et autres célébrités aujourd’hui au pinacle des ventes, il ajoute qu’il n’avait nullement l’intention de réaliser des faux, mais tout simplement des copies qui pourraient tout simplement et comme telles orner agréablement un intérieur. Il assure de sa bonne foi en excipant du fait qu’il ne touchait que 5.000$ à 8.000$ par oeuvre peintre et assure que son compte en banque est vide
Ce n’est au demeurant pas tout à fait le même écho qui apparait dans les instructions du grand jury fédéral, qui indique que non seulement Quian a menti aux agents du FBI, et pour l’US attorney Preet Bharara du district sud de New York cela est déjà très grave en soi car Pei Shen Qian a en conscience mis en vente ses propres oeuvres copiées ou inspirées de peintres et vendues malhonnêtement sous une autre identité que la sienne et présentées sous le nom et les signatures contrefaites de ces derniers trompant ainsi la crédulité des acheteurs potentiels.
Nul doute également que de nouveaux scandales du même type apparaitront en lumière dans les mois à venir, avec d’autres protagonistes, les mêmes causes produisant les mêmes effets.
Bien au delà de l’aspect criminel de cette affaire, ce qui est aussi particulièrement dérangeant pour le moins, c’est que des experts ou dits tels, ont un temps confirmé l’authentification des oeuvres incriminées nonobstant des signatures pour le moins erronées comme l’a révélé un article paru voila peu dans la revue américaine ArtNet News et sans procéder, ce qui est encore plus scandaleux, aux recoupements techniques et scientifiques, documentaires, financiers et patrimoniaux indispensables, ce qui constitue pourtant le B.A.Ba de leur métier.
Julius Kleiner du bureau Wukali à New York et Pierre-Alain Lévy
Illustration de l’entête: Pei Shen Quian dans son atelier. photo ABC News
WUKALI 23/07/2014