A unique feast for all art amateurs
Après Tokyo, Kochi, Kyoto, Singapour, Pékin, Shanghai et Moscou… Aix en Provence !
Avec cette nouvelle exposition, on reste dans l’esprit « Caumont », une belle histoire de collectionneurs comme celle Jean-Baptiste Jérôme Bruny, propriétaire de l’Hôtel de Caumont, l’un des grands amateurs d’art et collectionneurs provençaux du XVIIIe.
Après Canaletto, quelle exposition au centre d’art Caumont ?
«Au final, et tout naturellement, nous nous sommes dit que ce serait formidable de trouver une collection privée qui nous rappelle notamment cette mémoire du mécénat et cette mémoire de collection privée. On s’est tourné logiquement vers la plus grande collection privée au monde d’art ancien, la collection de l’actuel prince du Liechtenstein
», confie Sophie Aurand-Hovanessian, directrice de la programmation culturelle. Le prince Hans-Adam II Von Liechtenstein est le quinzième souverain de l’un des plus petits pays d’Europe, ultime entité survivante du Saint Empire germanique fondé en 962. Le prince actuel, Hans-Adam II poursuit avec ferveur une politique d’acquisitions. « Nous avons d’emblée exclu les objets d’art ce qui est un petit peu dommage car la collection en bronzes, sculptures, objets d’art, meubles et tout ce que l’on pouvait trouver dans les cabinets de curiosités est absolument fabuleuse mais nous n’avions pas la place. Nous avons donc sélectionné ce qui représente l’ADN de la collection à savoir la peinture flamande, hollandaise, italienne, un petit peu française… » nous dit avec regret Sophie Aurand-Hovanessian. Effectivement, l’art français est peu représenté au sein de la collection. On note cependant un carrosse d’apparat des Princes de Liechtenstein qui arbore des décors de François Boucher. Si le carrosse n’a pas fait le voyage, faute de place, on s’en doute, un audiovisuel à la pointe de la technologie permet au visiteur de découvrir le dit-carrosse, ainsi que de nombreuses autres œuvres prestigieuses. On note parmi les représentants français, un tableau de Hubert Robert (1733-1808) paysage inspiré de l’antiquité Caprice avec le Panthéon devant le port de Ripetta ou encore celui de Claude Joseph Vernet (1714-1789) qui offre une vision exotique des Baigneuses. La grande galerie du XVI ème siècle ouvre le bal de façon magistrale avec Raphaël ou encore Giovanni Battista Moroni et des oeuvres acquises récemment pour certaines. On songe la Vierge à l’enfant de Jan Gossaert, un tableau empreint d’humanité et intime à souhait, acheté en 2015 par Johann Kräftner, Commissaire général de l’exposition et directeur des Collections. On songe encore à l’étonnante œuvre de Quentin Massys, Les Collecteurs d’impôt ». «Il s’agit souvent d’un véritable combat à mener, car face à lui pour acquérir ces œuvres, se trouvent ses amis des grandes institutions internationales, comme le Louvre ou encore le Métropolitan !» Précise la directrice de la programmation. A découvrir encore des joyaux de la fin du Moyen Âge, telle que La Vierge à l’enfant de Lorenzo Monaco (vers 1420). Une peinture spirituelle de toute beauté. Des peintres de la Renaissance nous étonnent toujours. Célèbrissime Vénus de Lukas Cranach l’Ancien (1531), d’un petit format devenu grand, puisqu’il s’agit de l’affiche de l’exposition. On reconnaît la marque de fabrique du peintre qui a peint de nombreuses Vénus dénudées, debout, assises ou couchées, le plus souvent des jeunes femmes porteuses d’un message moral à lire dans l’œuvre même. Ce n’est pas le cas dans cette Venus-là, que l’on retrouve sur fond noir, les pieds sur un sol caillouteux, la chevelure blonde ondulée, un collier, des petits seins, le corps gracile, à peine voilé… selon le canon féminin du peintre, qui n’a pas hésité à jouer sur l’ambiguïté. Le voile ne cache rien, et derrière ses yeux en amandes, le regard nous fixe, provocant. On aime encore le superbe Portrait d’homme (1502-1504) de Raphaël. Des sources d’inspirations prises dans l’antiquité ou encore la mythologie comme Diane et ses Nymphes se reposant après la chasse de Hans von Aachen. Le baroque est joliment célébré au sein de la collection, le plus souvent ce sont des œuvres de dimensions monumentales. Les Collections Princières possèdent un des plus vastes ensembles de Rubens au monde : 35 œuvres. Bien sûr, seules quelques œuvres du peintre sont présentées, mais nous pouvons toutes les voir, grâce à un astucieux dispositif technique. On admire encore Mars et Rhéa Silvia, qui appartient à la collection depuis 1710. S’ajoute aux chefs d’œuvre à découvrir, l’admirable œuvre de Rembrandt, Amour à la bulle de savon, ou le Portrait d’homme de Frans Hals, on se réjouit encore de ces scènes de musique et de ripailles exécutées dans la meilleure tradition flamande. Quelques portraits: Portrait de la Princesse Karoline von Liechtenstein (1768–1831), née comtesse von Manderscheidt-Blankenheim, en Iris, 1793 par Élisabeth Vigée-Lebrun, (expo du 23 Septembre 2015 – 11 Janvier 2016 au Grand Palais). Pour la petite anecdote, ce tableau fit scandale en son époque à Vienne, car la princesse ne portait pas de chaussures ! Une solution fut trouvée par son époux : les royales bottines seraient posées sur la cheminée, puisque que le tableau se situait juste au dessus. La collection des natures mortes, particulièrement importante, se trouve dans les demeures privées. Monsieur Kraftner commente, non sans humour, « Si vous êtes invités à un repas chez les princes vous risquez de ne pas avoir très faim tant il a des natures mortes, des fruits et toutes sortes de victuailles sur les murs ! ». On n’annulerait pas pour autant une royale invitation ! On peut, par ailleurs admirer les intérieurs princiers grâce à une série d’aquarelles et de gouaches d’excellente qualité. Les extérieurs ont également fait l’objet de superbes études, encore un joli témoignage de ce passé. Pétra Wauters La collection des princes du Liechtenstein Caumont Centre d’Art
25 kilomètres de long sur 10 de large. Seulement ? Direz-vous. Mais des chiffres nous impressionnent au demeurant. Ce sont huit siècles d’histoire qui façonnent ce pays, et ce sont encore cinq siècles de chefs d’œuvres qui enrichissent l’une des plus importantes collections privées d’Europe. Car collectionner et collectionner encore, compléter des richesses avec beaucoup de sagacité et de finesse, c’est ce que firent toutes les générations de la famille royale, depuis le XVIIème siècle et ce, dans tous les domaines des arts : peintures, sculptures, mobiliers, orfèvreries, tapisseries, objets précieux. Des œuvres de qualité transmises de générations en générations, ce qui est assez rare quand l’on sait que le plus souvent les biens sont partagés, morcelés, ou tout simplement mal gérés par des héritiers moins intéressés dans les arts.
Les Collections Princières rassemblent aujourd’hui environ 1 700 tableaux allant du début de la Renaissance au romantisme autrichien. « L’équivalent de la collection du département d’art ancien du Métropolitain. C’est dire l’importance » précise Sophie Aurand-Hovanessian, A l’affiche, une sélection d’une cinquante d’œuvres. C’est déjà impressionnant. D’autant plus que l’exposition nous permet de découvrir des œuvres du Biedermeier, [[Le style Biedermeier se développe en Allemagne et en Autriche entre 1815 et la révolution de 1848. Au-delà de la référence à une manière de vivre calfeutrée, il renvoie à un artisanat qui fait la part belle aux matériaux et aux savoir-faire régionaux. En peinture, il se caractérise par une approche sensible de la nature, une manière précise et le goût des petits formats. La famille Liechtenstein joue un rôle décisif dans la diffusion de ce style.]] un mouvement qui s’étend de 1815 à 1848. Il est vrai que l’on n’entend pas beaucoup parler, dans nos musées français de ce courant du XIXe siècle en Autriche.
On s’attarde sur une œuvre admirable : Portrait de la Princesse Marie Franziska von Liechtenstein (1834–1909) à l’âge de deux ans, 1836 par Friedrich von Amerling.
Sans aucun doute l’un des portraits les plus touchants. L’enfant tient sa poupée fermement pendant son sommeil. Le soleil éclaire doucement ses boucles et illumine ses petites joues de reflets rosés. Les coups de pinceaux d’Amerling captent sur le visage de l’enfant, ce bien être, cette innocence… le bonheur somme toute.
du 7 novembre 2015 au 20 mars 2016
3, rue Joseph Cabassol -13100 Aix-en-Provence
08/11/2015
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