Vincent Van Gogh’s terrible sufferings
Hasards de calendriers, concomitances d’intérêts culturels partagés, qu’importe, la maladie (ou les maladies) de [**Van Gogh*] puis sa mort tragique suscitent la curiosité des chercheurs. A [**Amsterdam*] tout d’abord où vient de débuter au [**Van Gogh Museum*] une exposition consacrée aux pathologies qui entraînèrent Van Gogh vers l’aliénation ( [**On the Verge of insanity*]), puis aux Usa où vient juste d’être publié un livre qui révèle pour la première fois l’identité de cette femme qui recevra l’oreille coupée et dont rend compte [**The Art Newspaper*].
L’exposition d’Amsterdam tout d’abord pose d’intéressantes questions : pourquoi Vincent Van Gogh s’est-il coupé l’oreille, pourquoi s’est-il suicidé, avec à l’appui nombre de documents d’archives ainsi que 25 peintures et dessins.
Documents et peintures se répondent dans un échange subtil, on découvre ainsi Nature morte et Oignons, peint en janvier 1889, le superbe Portrait du Dr Rey du [**musée Poutchkine *] à Moscou comme Trois racines sur lequel manifestement Vincent travaillait encore le jour où il s’est donné la mort le 27 juillet 1890 à l’âge de 37ans.
Cette exposition présente par destination nombre d’oeuvres du peintre au public du temps de sa maladie et de ses crises, elle permet aussi un dialogue entre les historiographes du peintre, les historiens d’art ainsi que les médecins, car la question reste entière, patente et ouverte, de quoi souffrait vraiment Vincent Van Gogh ? Un colloque organisé en septembre prochain par le Van Gogh Museum devrait permettre d’apporter plus de précision, plus de lumières, cette lumière même que ce peintre hollandais devenu provençal recherchera toute sa vie et qui tournera comme des soleils dans sa tête.
Jusqu’à présent quand on parlait de la maladie de Van Gogh on l’identifiait comme épilepsie, reprenant ainsi la vénéneuse et fausse explication du neuvième siècle et encore hélas aujourd’hui toujours vivace, qui confondait allègrement et souvent dans le tragique, maladie du système nerveux et maladie psychiatrique, deux natures opposées pour ne pas dire antithétiques. Essayons dans ce maelström médical d’y voir plus clair !
Le cas van Gogh n’est d’emblée pas très facile à traiter car les origines et les symptômes sont multiples. Il ne fait nul doute pour commencer que Van Gogh souffrait d’hallucinations et de périodes de dépression qui l’isolaient totalement du monde, tout cela était en outre aggravé par une surconsommation alcoolique ( l’absinthe), du traitement de la syphilis qu’il avait contractée dans les bordels et du mercure qui lui était alors administré dans des médicaments prescrits. On parle aussi d’une pathologie associée, bi-polaire ( c’est une interprétation très à la mode aujourd’hui) et d’une épilepsie du lobe temporal gauche. D’autres approches médicales envisagent une porphyrie intermittente, peut-être aussi aurait-il été intoxiqué par les pigments de ses peintures. L’examen audiologique de ses symptômes est aussi à retenir et certains experts parlent de la maladie de Ménière qui touche essentiellement l’oreille interne et provoque douleurs céphaliques et déséquilibres. Cela peut ainsi justifier de son acharnement sanglant sur son oreille.
Cette exposition apporte la preuve que les peintures de Van Gogh doivent être estimées indépendamment des maux et des calvaires qu’il avait à souffrir et précise les relations qu’il avait durant sa période de maladie avec tous ses entourages. En d’autres termes, les peintures de Van Gogh ne sont pas des Rorschach de ses maladies. La lettre du Dr Rey fournit un compte-rendu précis sur la violence que Van Gogh se fit à lui-même. On y apprend ainsi que le peintre s’est sectionné l’oreille entière. En gratitude aux soins que le médecin lui prescrivit, Van Gogh lui offrit son portrait aujourd’hui à Moscou et prêté le temps de l’exposition. C’est à sa propre demande que Van Gogh s’est fait interné le 8 mai 1889, à l’asile Saint-Paul-de-Mausole, à Saint-Rémy de Provence.
[(C’est souvent par le petit bout de la lorgnette comme l’on dit plaisamment en français, que l’on en apprend sur les hommes, les individus et la société, une approche structuraliste en diable ! Tel est bien la subtilité du livre juste paru en anglais voila quelques jours en Grande-Bretagne et aux USA et intitulé : [**«Van Gogh’s Ear: The True Story *] » par [**Bernadette Murphy,*] éditions Penguin, Chatto & Windus. 36$ )] Voici que son identité est révélée, elle s’appelait en fait Gabrielle Berlatier, c’était une fille de paysans, une adolescente, une servante, et son extrême jeunesse l’a soustrait manifestement aux relations licencieuses, elle n’était pas enregistrée dans les registres des prostituées. Elle avait été quelque temps auparavant mordue par un chien enragé et avait été traitée par l’Institut Pasteur à Paris et c’est à son retour de la capitale qu’elle servit dans la maison close. On apprend aussi qu’elle travaillait de même au Café de la Gare que fréquentait Van Gogh, qui y avait aussi une chambre, et qu’il représenta dans le Café de Nuit . De ce café, Van Gogh écrivait à son ami [**Emile Bernard*]: « C’est un endroit où l’on peut se ruiner, devenir fou, commettre des crimes » [**De waanzin nabij/ on the Verge of insanity/ Sur le fil de la folie
Van Gogh Museum.*]
Jusqu’au 25 septembre 2016.
Museumplein 6, 1071 DJ Amsterdam, Pays-Bas
25/07/2016
*Courrier des lecteurs *] : [redaction@wukali.com