Just imagine in the years to come a French President, terrorists blowing up with a nuclear weapon the North Pole, a French vaudeville-like family, you’ll get a good novel to read
Le cauchemar du président est un roman à ranger dans la catégorie de la « politique-fiction ». En effet, l’essentiel de son action se déroule de 2022 à 2046, c’est à dire de l’élection de Charles Chambrolles à la présidence de la République à son décès à 86 ans.
Charles Chambrolles, né en 1963 dans une famille de la grosse (son père est notaire) bourgeoisie bretonne. Après une enfance plutôt heureuse il devient médecin essentiellement par empathie vis-à-vis de la souffrance des enfants. Il se marie avec une (très) riche héritière espagnole, ils ont deux enfants (une fille Catherine et un fils Corentin), se lance un peu par hasard dans la politique au centre-droit et par un concours de circonstances dont il n’est strictement pour rien, est élu Président de la République contre le candidat d’extrême-droite.
La seconde partie s’articule autour de sa vie durant 5 ans à l’Élysée : sa vie privée avec sa femme qui le trompe, son fils qui s’avère être le pire des « fils à papa » (un jeune con insouciant et jouisseur), sa fille qui part vivre avec Christophe, journaliste quelque peu « habité » par la volonté de sauver le monde (la planète, pas l’humanité). Tous les deux (avec l’aval du président père) créent une association écologiste, «Kaktus», qui milite pour une consommation nulle au niveau carbone.
Charles Chambrolles est, dès son arrivée au pouvoir, confronté à un terrible problème : des terroristes font exploser une bombe atomique en Arctique ce qui provoque une fonte des glaces impossible à enrayer et une série de catastrophes naturelles comme l’élévation du niveaux des océans, des tempêtes de plus en plus nombreuses et violentes, etc. Le président qui a toujours eu une vraie fibre écologique souhaite agir, mais il bute sur un problème temporel : le temps politique est très court alors que les phénomènes naturels ont un temps très très long pouvant dépasser plusieurs générations. A cela s’ajoute l’égoïsme de chaque état surtout les développés qui ne veulent pas remettre en cause leurs manières de vivre ou la trahison de certains conseillers qui pensent bien plus à arrondir leurs fins de mois plutôt qu’à l’intérêt général. Charles Chambrolles se veut être un homme conscient et lucide mais est obligé de reconnaître son impuissance face aux catastrophes naturelles et humaines qui arrivent.
La troisième partie des « mémoires » du président Chambrolles concerne sa retraite : sa vie privée et la description de l’effondrement de nos sociétés : non seulement l’extrême-droite est arrivée au pouvoir en France, ce qui entraîne une baisse des libertés ayant pour conséquence une montée des violences, mais les dérèglements climatiques entraînent une crise économique, financière, humaine qui balaie les bases de nos démocraties. S’ensuit une longue litanie de ras de marée, de réfugiés climatiques, de paupérisation des classes moyennes, de l’écroulement des transports, de la fin de l’Union européenne, etc. Et ce, malgré un début d’un très timide espoir à la mort du président Chambrolles dont les dernières paroles furent : « Honte à ma génération! ».
Les deux premières parties sont plaisantes, la dernière est (du moins de mon point de vue), beaucoup plus faible. [**Denis Ralet*] n’invente rien, il se base sur des données actuelles voire des prévisions faites par des instituts faisant de la vraie prospective. Il n’est pas du tout dans le « y-a-qu’à-faut-qu’on », il constate et tire des conclusions pessimistes sur ce qui risque d’arriver. Mais c’est un catalogue, certes lucide mais sans vraie unité entre les éléments. Parfois le fil conducteur ou plus exactement la cause du désastre (l’explosion de la bombe atomique) est très lointain ce qui entraîne d’ailleurs une ou deux fois des contradictions entre les conséquences. De plus (mais est-ce important ?), il n’explique pas pourquoi cette association « Kaktus» qui ressemble à des dizaines d’autres associations écologistes devient si célèbre (et écoutée) au niveau international.
En revanche, les réflexions sur l’action politique et ses limites devraient faire l’objet de quelques cours à Science-Po !
Au final, Le cauchemar du président est un très bon roman pour passer des vacances intelligentes.
[**Le cauchemar du président
Denis Ralet*]
Telarcom éditions. 19€50
Contact : redaction@wukali.com
WUKALI 22/07/2017