A single life against the soviet steamroller
En Tchéquie,[** Jan Palach*] est une des grandes figures symbolisant la liberté. Plus d’un a fait le parallèle entre lui et [**Mohamed Bouazizi*] dont le suicide, l’immolation par le feu marque le début du « printemps arabe » qui a vu la chute du régime tunisien, mis aussi égyptien, libyen voire de la guerre de Syrie et le développement du terrorisme islamique. Il est certain que ces deux jeunes hommes sont morts de la même façon (le feu) qu’ils sont devenus le symbole de la liberté. Après, comme le relève [**Anthony Sitruk*], les motivations, le contexte, les conséquences de leurs gestes sont totalement divergents.
16 janvier 1969,[** le printemps de Prague*] a été maté par les chars soviétiques, la chape de plomb du communisme est retombée en Tchécoslovaquie, un jeune étudiant d’une vingtaine d’année s’immole par le feu pour réclamer la liberté d’expression. C’est un choc (on se demande comment à une époque sans réseaux sociaux, avec une presse soumise à un censure très dure cette information, ce fait divers a pu connaître une aussi grande diffusion, et ce n’est pas l’auteur qui répond à cette interrogation) dans le pays, Jan Palach a même droit à des funérailles quasi officielles. De fait son sacrifice sera suivi par d’autres dans son pays et dans d’autres, mais il faudra attendre 20 ans pour voir la liberté pour laquelle Jan Palach s’est sacrifiée s’instaurer en Tchécoslovaquie.
La vie brève de [**Jan Palach*] n’est pas une étude historique de cet événement. N’attendez surtout pas une mise en perspective économique, politique ou sociale de celui-ci et encore moins les conséquences à court et à long terme. Ce n’est pas que tout cela soit absent dans ce livre, mais il n’y a aucune analyse, simplement des faits. En soit rien de grave, La vie brève de Jan Palach est un roman et non un livre d’histoire, et ce d’autant plus que l’auteur reconnaît ne pas parler un mot de tchèque (en soi c’est loin d’être rédhibitoire) et que ses sources sont essentiellement Paris Match, Wikipédia et autre Google. Alors là, on est certain que l’Histoire avec un grand H n’est pas au rendez-vous.
Mais surtout [**La vie brève de Jan Palach*] est surtout et avant tout une « autofiction ». La quête de l’auteur à Prague sur les pas de Jan Palach est avant tout un quête personnelle. Il suffit, pour s’en convaincre, de lire page 144 : « Bon… et moi? Moi dans tout ça je deviens quoi ? Je fais quoi ici ? »
Et de fait Anthony Sitruk conte la vie de son héros, non comme elle s’est déroulée mais comme il (l’auteur) aurait voulu qu’elle se déroule, il la fantasme en quelque sorte. Et il revendique cette approche : « J’ignore le comportement qu’il a réellement adopté… Je (ego quand tu nous tiens) suis libre d’inventer, de fabriquer, de défendre l’existence d’une vérité de la fiction plus puissante que la simple relation des faits . (voilà un postulat que je ne partage pas, la fiction est nettement moins forte, puissante, belle que la réalité)… L’incohérence m’est interdite. Pas l’invention» Au moins le lecteur est prévenu (enfin au deux tiers du livre). C’est le choix de l’auteur et il est respectable comme tout choix. On peut le partager ou pas, mais on se doit de le respecter. N’est-ce pas aussi pour cette liberté que Jan Palach s’est sacrifié ?
Donc, je ne vais pas critiquer cette autofiction, cette sorte de psychanalyse écrite d'[**Anthony Sitruk*]. C’est sa vie, c’est sa quête. Par contre, parfois, son style qui n’est qu’autre qu’une retranscription fidèle d’un dialogue entre copains, avec une familiarité qui me dérange car confinant à une certain facilité, voire vulgarité, me gêne quelque peu. Il est vrai que je n’ai jamais apprécié ces familiarités qui essayent de bâtir une sorte de pont de connivence entre l’auteur et le lecteur.
Enfin, si vous souhaitez vous souvenir de[** Jan Palach*] et de son geste, lisez donc ce roman, quitte à chercher des ouvrages (et pas des sites sur la toile) pour approfondir vos connaissances sur ce qui s’est passé le 16 janvier 1969 à Prague.
[**La vie brève de Jan Palach
Anthony Sitruk*]
éditions Le Dilettente. 16€50
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WUKALI Article mis en ligne le 14/07/2018)]