Just gorgeous !
Ils sont venus, ils sont tous là ! Public de la première heure, jeune public venu découvrir le [**Ballet Preljocaj*]. Salle comble sur 3 jours. De vrais moments de bonheur et de grâce du 3 au 6 octobre 2018. Le bruit déjà courait que ce spectacle serait exceptionnel, depuis sa présentation à la Biennale de la danse de Lyon, il y a quelques semaines.
On peut l’affirmer : ce ballet est résolument magnétique et envoûtant. Et pour cause …
Dès les premières séquences, le public embarque sur une autre planète. La chorégraphie d’Angelin Preljocaj explore, à travers la danse, la notion de « gravitation », notion abstraite de prime abord, et pourtant, mise en lumière de façon tellement concrète par [**Newton*] et [**Einstein*]. C’est mathématique, c’est physique : forces, masses, vitesse, espace donnent le ton. Les deux scientifiques ont percé les secrets de la gravité. Ils l’ont démontré. Preljocaj aussi l’a fait ! Il l’a fait, en défiant les lois de l’équilibre, en s’intéressant à cette force d’attraction universelle qui questionne les fondamentaux même de la danse. Dans gravité, il y a cette notion de poids bien sûr, dans ces corps à corps passionnés, ces magnifiques duos et quatuors, dans ces séquences brillantes aux lignes acérées. Le chorégraphe fait encore entrer une part de lui-même dans Gravité, une part de son histoire à lui avec la danse. Plus largement encore, on peut dire que chacun des tableaux offerts, si différents les uns des autres, est un concentré d’histoire de la danse. Un magnifique et lumineux kaléidoscope qui dessine sur la scène des tableaux, des fragments de danses aux infinies combinaisons.
La bande-son elle aussi surprend. De[** Bach*] à [**Daft Punk*] en passant par [**Chostakovitch*] et [**Philip Glass*], sans oublier [**Ravel*] qui nous tient et nous attrape. Quelle audace cette séquence du Boléro ! Les treize danseurs à l’unisson.
A chaque gravité son humeur musicale. On admire les séquences où le mouvement s’étire à n’en plus finir, dans une infinie lenteur, une infinie douceur. Les danseurs allongés se dressent peu à peu, se libèrent de la pesanteur, semblent naître à la vie.
On comprend mieux, justement, comment les différents modes de danses ont utilisé la gravité, l’ont questionnée. Voyez comment la danse classique a tenté de s’émanciper de la gravité. Les pointes seraient nées de cette envie de s’échapper d’elle, de s’allonger à l’extrême, de s’alléger, de monter « jusqu’au bout de ses pointes ». Et toujours dans cet esprit d’élévation, les garçons portent les filles parfois à bout de bras pour les emmener le plus haut possible, au-delà de cette attraction liée à la gravité. [**Preljocaj*] utilise aussi ce langage classique à la perfection. On réalise à quel point la démarche de la danse contemporaine est tout autre. Elle fait de la gravité son alliée, sa partenaire. Elle cherche à descendre son centre de gravité vers le sol, vers la terre.
Quel langage développer pour exprimer la gravité ? A cette question, le chorégraphe apporte d’incroyables réponses !
Ce spectacle est juste magique. Pourtant il est, comme souvent chez Angelin Preljocaj, sans artifice, avec cette recherche de l’épure qui lui va si bien. C’est riche certes, mais c’est comme filtré pour aller à l’essentiel : la scène n’a de décor que les lumières qui se jouent de la pesanteur, se font écrasantes ou légères. Des lumières complices. Les musiques accompagnent avec pertinence cette « odyssée charnelle« , pour reprendre les termes du chorégraphe. Le ballet nous offre un sans faute dans l’interprétation – on songe à cette danseuse enceinte, qui s’engage passionnément.
Le mouvement est le principal vecteur à cette question de la gravité. Chaque séquence l’interroge.
La gravité comme outil de recherche, un outil d’exploration sur un terrain déjà « préparé depuis plus de trente ans » par le chorégraphe. Car il s’agit bien d’un territoire d’expérimentations pour Preljocaj qui partage avec nous, grâce à un travail remarquable, des sensations de gravités différentes. De découvrir ces corps ainsi mis en mouvements, ainsi soumis à la loi de la gravité fait que l’on flotte aussi, on s’envole, on décolle de nos sièges. Car il est aussi question de planètes, et de Saturne à la Lune, il n’y qu’un pas de danse, allégé ou pesant, aérien ou alourdi, c’est selon.
On s’étonne encore de cette séquence où l’homme au sol, emboite le pas de la danseuse qui le fait glisser, se retourner, serpenter. Ils inscrivent ainsi sur le sol, dans une douce pénombre, une calligraphie des plus singulières.
On se laisse emporter par les danseurs. La force d’attraction qu’ils exercent sur nous est quasi électromagnétique !
Attention à l’alunissage, puis au retour sur terre après avoir côtoyé les étoiles !
Illustration photographique © Jean Claude Carbonne
[(Dates à retenir :
Gravité : le 16 octobre à Mâcon
du 07 au 22 février 2019 à Paris (Chaillot)
http://www.preljocaj.org/
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WUKALI Article mis en ligne le 11/10/2018)]