Reality show programs as a resilient strength
Connaissez-vous [**Magali Berdah*] ? A titre personnel la réponse est simple : non ! Et pour cause, je ne suis pas un grand consommateur de télévision en général et de télé-réalité en particulier. Plutôt Arte ou la 5 qu’ NRJ12 ou C8. « Villa Médicis » plutôt que « Touche pas à mon poste ». Je n’ai aucune condescendance pour les personnes qui regardent ce que je ne regarde pas. Nous n’avons pas les mêmes choix et je ne vois pas en quoi les miens seraient supérieurs aux leurs. Des choix, mais aussi les résultats de ma culture personnelle due à mon éducation, à ma vie. Quand j’étais plus jeune, la télévision était en noir et blanc et les grandes émissions de divertissement étaient « la Piste aux étoiles » ou « Au théâtre ce soir ». Et en plus, il n’y avait pas de téléviseur chez mes parents, mais des livres, beaucoup de livres. Résultat : je fais des recensions critiques pour [**Wukali*] et je ne connaissais pas Magali Berdah. Et quelque part, après avoir lu son autobiographie, je me dis que j’avais peut-être tort, ou du moins qu’il faut savoir sortir de ses zones de confort pour essayer de voir ce qu’il y a ailleurs.
Magali Berdah est une jeune femme proche de la quarantaine qui, le moins que l’on puisse dire a un vécu que certains centenaires n’ont pas. Elle avait tous les atouts dés sa naissance pour être broyée par la vie, par la société et elle a su se battre et avoir une vraie réussite sociale ET privée. Qu’on en juge : elle est née dans une famille assez « bancale », un père quelque peu pervers qui quitte femme et enfants. Sa mère part refaire sa vie et confie ses deux enfants à ses deux grands-parents (qui habitent à Saint-Tropez). Elle n’a pas 10 ans qu’elle a été kidnappée par son père, subit le décès de son grand-père adoré, le retour de sa mère avec son nouveau compagnon : un pervers narcissique violent. Mais, toute jeune qu’elle soit, elle se bat, elle se bat avec ses moyens. Surtout, elle a compris que pour sortir de cette sorte d’enfer, il faut travailler : après son baccalauréat, elle veut faire la faculté de droit pour être avocate, prise dans le mythe du métier permettant de « défendre la veuve et l’orphelin ». Elle travaille pour payer ses études et ses loisirs. Mais surtout elle rencontre l’homme de sa vie, un carrossier avec qui elle se marie (et très vite, ils ont trois filles). Elle arrête ses études et se lance comme vendeuse de contrats de mutuelles. Sa formation se sont ses collègues qui la lui dispensent et elle réussit. Elle réussit si bien qu’elle devient courtier, monte son agence et crée des succursales. Sauf qu’elle travaille pour un pervers narcissique (relisez [**Hirigoyen*] et toutes les études sur les victimes de ces monstres, le parcours de Magali Berdah n’est pas original) et se retrouve surendettée, au bord de la dépression.
Une rencontre par hasard va changer sa vie. Elle fait la connaissance d’une jeune femme qui vient de faire une émission de télé-réalité. Son passage à l’écran fini, elle est laissée libre et toute seule. Après quelques tentatives infructueuses, Magali Berdah invente son métier qui est devenue un nouveau métier : elle gère la notoriété médiatique de ces « vedettes », elle les met en contact avec des marques dont elles font la promotion sur les réseaux sociaux, le concept même de la e-réputation, elle les transforme en « influenceur ». Elle fait l’objet d’attaques très dures sur les réseaux sociaux pour la déstabiliser voire la détruire (elle fait de l’ombre à certains), mais elle est aidée, aidée par certains de ses anciens collaborateurs, par ses « vedettes », mais aussi par [**Cyril Hanouna*] qui va lui donner un poste de chroniqueur dans son émission quotidienne.
Et en deux ans, le moins que l’on puisse dire c’est que ça fonctionne : elle rembourse ses dettes abyssales, et sa société s’adosse à celle de [**Stéphane Courbit*], propriétaire d’une des principales société de production mondiale. Elle a su intéresser et convaincre à son métier des personnalités hors de la sphère de la télé-réalité.
Soit, encore un témoignage, un livre d’une victime de pervers narcissiques, un livre sur la résilience. C’est le fond de son témoignage. Bien sûr ce n’est pas un livre avec des grandes théories, des dénonciations, des essais d’explication. Loin de là, Magali Berdah se présente « à nue », ne cherche pas à comprendre et savoir pourquoi elle est une victime ; comment elle est arrivée à sortir de son enfer. Non, elle décrit sa vie avec une naïveté confondante, elle est d’une empathie totale, elle ne fait des rencontres que de gens charmants, sympathiques, sensationnels, et j’en passe sur les adjectifs positifs dont elle les décrit. De fait une victime toute désignée pour les prédateurs. Soyons honnêtes, même si elle semble entourée de personne ne lui voulant que du bien, on perçoit qu’elle a acquis une certaine lucidité qui, nous l’espérons pour elle, lui permettra de se défendre à l’avenir. Cette naïveté, se ressent dans sa façon d’écrire. Des mots, des phrases simples, très simples « à la portée de tous » et surtout du public qui la touche avec qui, pour qui elle travaille. C’est loin d’être une critique, bien au contraire, car Magali Berdah touche un certain public qui ne va pas se plonger dans de graves livres théoriques. Par contre, il pourra être sensibilisé à ces problèmes à travers elle. Et il n’y a pas un moyen de communication à négliger pour que le plus grand monde possible soit sensibilisé aux dangers que font courir les pervers narcissiques.
Pour ceux, comme moi, qui ne connaissent rien à la télé-réalité, au fonctionnement des réseaux sociaux et à la haine qu’ils transmettent, ce livre m’a permis de percevoir ces univers. Magali Berdah a su rendre la vraie personnalité de ses « vedettes » ne les montrant pas comme des décervelés insouciants au vocabulaire très limité ne pensant qu’à faire la fête et plus si affinité, mais comme des jeunes sensibles, souvent à l’enfance difficile qui essaie de progresser dans la vie sans trop la subir.
Je ne vais pas parler de son rapport avec Dieu, indéniablement sa foi l’a beaucoup aidée à surmonter les épreuves qu’elle a du subir.
Et puis, comment ne pas saluer le « tweet » qu’elle reproduit, « tweet » qu ‘elle a écrit alors qu’elle faisait l’objet d’attaques visant à la détruire. Il est à lire au regard de l’actualité de notre pays. C’est une réponse forte aux revendications de certains, « tweet » qui devrait être repris dans bien des émissions qui n’arrivent pas à répondre à des hurluberlus qui veulent tout sans rien faire. Elle dit que pour réussir, pour être arrivée là ou elle est, elle a connu des jours très difficiles, a échoué, a été victime d’une réforme du droit du travail qui l’a obligée de déposer son bilan. Mais, elle s’est toujours battue et surtout a énormément travaillé. Oui elle gagne de l’argent et paie des impôts en France et elle souhaite en payer encore plus car c’est un signe de réussite. Grâce à son travail elle emploie une trentaine de personnes et permet à des jeunes gens lâchés dans la vie de continuer à travailler.
[**Magali Berdah*] montre que le fameux ascenseur social continue à fonctionner mais à condition que l’on ne subisse pas, mais que l’on se batte et travaille beaucoup, énormément, et parfois au détriment de sa vie de famille et des loisirs. C’est elle qui devrait venir répondre aux dires de certains « gilets jaunes ».
Et oui, j’ai pris du plaisir à lire cette autobiographie, cette auto-analyse et j’en suis le premier étonné… Je souhaite que Magali Berdah trouve aussi un public pour ce livre qui dépasse la sphère des réseaux sociaux.
[**Ma vie en réalité
Magali Berdah*]
éditions Archipoche. 6€95
[(
Contact : redaction@wukali.com
WUKALI Article mis en ligne le 04/05/2019
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