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Un remarquable film coréen sur les kamikazes japonais et leurs supplétifs coréens

par Pierre-Alain Lévy

Ce n’est pas la première fois que dans cette rubrique, j’ai à traiter du cinéma d’animation coréen, l’un des meilleurs au monde. Dans le tissu même de ses créations une certaine touche particulière de sensibilité et d’émotion. La mémoire y tient aussi un rôle essentiel.

Ce qui s’est notamment passé pendant la période de l’invasion japonaise de la péninsule avant et pendant la Seconde Guerre mondiale, est installé dans la mémoire de chaque citoyen coréen quel que soit son âge! Non seulement, s’agit-il de tisser du lien, de faire vivre ou plutôt revivre tout un passé douloureux dans la mémoire des plus jeunes générations, mais d’éduquer pour prévenir. Notons que le format de cette mémoire à travers le film d’animation atteint un public plus vaste que le seul public coréen.

Il faut oublier disent certains, assez de lamentations disent d’autres, que de jérémiades, assez… L’on ne connait hélas que trop ces arguments fallacieux qui au nom d’un piétisme sournois dissimulent en fait de toutes autres considérations glauques et misérables. Bien sûr je rapproche cela de ce qui s’est passé en Europe, de la shoah et des discours négationnistes qui fleurissent sans que d’aucuns n’y prêtent aujourd’hui une suffisante attention. La mémoire est au coeur même de ce qui fait humanité (avec un « s » éventuellement).

Le militarisme japonais et son corrolaire impérialiste ont été sanglants, immondes et infectes. La caste militaire au pouvoir à Tokyo a porté le glaive et le sang dans toute la région de la mer de Chine et du Pacifique. Nous avons par ailleurs traité à plusieurs reprises de ces sujets dans nos colonnes à travers différents focus et nous continuerons nos recherches sur ces sujets.

Massacres des populations ( Nankin 1937), asservissement des civils,« femmes de réconfort » 위안부, wianbu (selon la terminologie japonaise) c’est-à dire ces femmes coréennes ( ou chinoises en Chine) raflées et souvent mineures, pour satifaire « aux besoins » de la soldatesque nippone. Mais aussi soldats ennemis faits prisonniers « maltraités » et affamés.
Rappelons que l’invasion japonaise de la Corée a débuté dès 1910 pour ne s’achever qu’en 1945.

Moins connu, ces jeunes-gens des pays soumis contraints de servir sous l’uniforme nippon.

C’est de cela que traite ce film coréen.

Dès le début du film on est dans le mémoriel, un vieil homme, un père certainement, se recueille au mausolée de Yasukuni 靖国神社. L’histoire de son fils disparu au commande de son Mitsubishi A6M Zéro 零式艦上戦闘機, (médiocre avion au demeurant face à ceux utilisés par l’aviation américaine ), se déroule sous nos yeux.

L’on assiste à une cérémonie quasi initiatique rassemblant des pilotes destinés à offrir leur vie en holocauste ( le sens premier du terme) à l’Empereur. Le discours ( sous-titré en anglais) se veut lyrique et poétique, il n’est en fait que mortifère et noir. C’est ce truc qu’utilisent au demeurant les sectes, pour ne pas dire les religions, pour embobiner, décerveler, manipuler les esprits fragiles. Il me revient en mémoire ce mot de Napoléon: «un mendiant n’est qu’un moine au petit pied!  ».

Les pilotes se rassemblent comme un seul homme dans un chant qui dit: « une fleur qui s’ouvre finit toujours par tomber ». En fait c’est la justification pour ne pas dire la glorification du sacrifice mais à travers une image vertueuse. D’un temps, l’autre, on assiste au même phénomène aujourd’hui avec un terrorisme d’une autre origine.

Au sein de tout ce groupe japonais, un pilote coréen engagé dans l’Armée impériale, le héros du film. On lui fait miroiter l’honneur de mourir ( avec une bonne dose de saké tiède bien sûr), lui le Coréen adoubé, et de retrouver ses,frères d’armes japonais après la mort près du troisième cerisier au mausolée de Yasukumi… le saké a quand même du mal à passer mais il est bu …

Bien entendu l’on assiste à l’attaque aérienne de l’aviation japonaise sous le feu des avions américains qui mitraillent les Zéros japonais. Du point de vue de la technique cinématographique c’est plutôt réussi, sans toutefois atteindre l’excellence graphique du film polonais Paths of hate et que nous mettons régulièrement en ligne dans WUKALI.

In fine une scène fantastique, quasi grand-guignolesque, où l’on apercoit des morts, des damnés, leurs bras sortant de terre, agripper le pilote japonais. Si cela peut surprendre pour un spectateur occidental, il faut savoir que les littératures et la peinture, chinoise, japonaise et coréenne, regorgent d’histoires de morts-vivants ou autres créatures fantastiques, et pour le plus grand plaisir de lecteur ou du spectateur.

En guise de conclusion? Mais doit-on conclure ?

Quelques rappels historiques et quelques notes documentées sur ces officiers supérieurs de la caste militaire japonaise condamnés à mort par le tribunal militaire international réuni à Tokyo pour les juger. Tous honorés au mausolée de Yasukuni-jinja à Tokyo 靖国神社 ( en japonais cela sigifie littéralement: « le sanctuaire shinto du pays apaisé».
Apaisé vous avez dit ?)

Le premier d’entre ces officiers est bien sûr Tojo Hidekihiro Itagaki 東條 英機 qui fut Premier ministre de 1941 à 1944.
Heitarō Kimura 木村 兵太郎 surnommé le boucher de Birmanie
Kenji Doihara 土肥原 賢二 instigateur de tous les coups bas en Mandchourie et véritable parrain du traffic de drogue
Iwane Matsui 松井 石根 responsable du massacre de Nankin

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