Chercher la femme, chercher ou se trouver, telles sont les questions lancinantes de ce roman de Boris Le Roy. Vous vous réveillez un matin et votre partenaire n’est plus exactement la même, « ni tout à fait la même, ni tout à fait une autre ». Encore si cela ne se produisait qu’une fois, mais le phénomène s’accélère, et elle change de plus en plus rapidement, allant jusqu’à changer de nom, de métier, d’histoire. Et pourtant, elle a des souvenirs avec Nathan (c’est le héros du livre). La métamorphose prend même une autre direction, elle se multiplie et il se trouve à vivre avec un vrai harem. Mais le phénomène prend un chemin inverse jusqu’à ce qu’un matin, elle disparaisse définitivement, ne reste que quelques cheveux dans le lit.
Bien sûr Nathan consulte : n’est-ce pas lui qui a un problème psychique (la tumeur au cerveau est vite retirée des symptômes après une IRM) ? Au fil des séances, au fil des jours, bien des certitudes de Nathan vont être remises en cause. Soit, au niveau sensuel et sexuel, l’expérience est plus que plaisante pour la libido du jeune homme, mais qu’est-ce que l’amour ? Car il aime cette femme, mais laquelle ? Qu’est-ce que la personnalité ? Comment définir la vie à deux ? Quelle est la place de l’homme dans un couple ? Qui est le dominant et le dominé, d’autant que lui préfère être le dominé (et cela grâce sûrement à l’éducation et au lien qui le lie à son artiste peintre de mère) ?
Mais au-delà, comme Nathan est physicien quantique, comment ne pas penser à la théorie des cordes et des mondes parallèles ? Et si, en fait, Nathan vit plusieurs histoires en même temps dans des mondes parallèles ?
Où alors, en plus, Nathan n’est-il pas un « consommateur » de femmes, qui change très régulièrement de partenaire mais qui pense n’en avoir qu’une ? N’est-il pas à la recherche de LA femme, en quelque sorte de son double perdu comme l’expliquait Platon ? D’ailleurs, un jour, en se réveillant, n’est-ce pas son double au féminin qui se trouve à ses côtés ? Des femmes résumées dans une femme, un idéal, une quête, un symbole.
Mais allez expliquer cela devant un jury quand vous êtes accusé d’avoir fait disparaître (tuer?) votre partenaire !
Dans cette sorte de parabole, Boris le Roy pose la question de la réinvention constante de soi dans le cadre d’une relation de couple. Rien n’est jamais acquis, il faut toujours être attentif à l’autre et à soi, car un couple recèle une dynamique propre qui interagit sur soi-même. On change dans le couple, l’autre aussi évolue : cette évolution peut séparer, mais elle peut lier encore plus fort les deux éléments du couple. Et quand la fusion parfaite arrive, un des deux éléments ne finit-il pas par disparaître (en l’autre?).
Celle qui se métamorphose est en quelque sorte un roman surréaliste, inclassable même, mais qui pose bien des questions sur les mutations intérieures, sur la force de l’inconscient, mais aussi sur les croyances de la société.
Celle qui se métamorphose
Boris Le Roy
éditions Julliard. 18€
Illustration de l’entête: Majus 5,76m x 5,76m, (1964 – 1975) Vasarely. Fondation Vasarely. ©photo : Xavier Zimbardo – . Carton collés.