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Des femmes s’exposent au musée du Luxembourg

par Gabrielle Hirchwald

Environ 150 œuvres réunies pour un choix partiel et partial lors de l’exposition Pionnières au Musée du Luxembourg à Paris à voir depuis début mars.

À travers une visite thématique reconsidérée avec les codes d’aujourd’hui, les œuvres exposées couvrent l’ensemble des domaines artistiques, scientifiques, sportifs, politiques et sociaux dans lesquels ces femmes d’un nouveau genre et au tempérament affirmé se sont illustrées. S’y côtoient des personnalités aussi différentes que Joséphine Baker, Gabrielle Chanel, Suzanne Lenglen, Sonia Delaunay, Marie Curie, Gertrude Stein, Adrienne Monnier, Suzanne Valadon, Romaine Brooks, Tamara de Lempicka, Colette ou Marie Vassilieff.

exposition Pionnières les artistes femmes à Paris au temps des années folles

Autant vous le dire tout de suite : si vous recherchez l’exhaustivité d’un catalogue composé d’une liste de créatrices, la biographie complète de ces pionnières, la plongée précise dans l’histoire des droits des femmes, inutile de vous rendre à cette rétrospective. Si vous êtes féministes dans la lignée du mouvement #Me too, voulant mettre à bas le patriarcat, passez aussi votre chemin et allez militer dans la rue, dans les allées du jardin du Luxembourg en faisant entendre votre voix sous les fenêtres du Sénat.

Invitation au voyage durant l’entre-deux-guerres

L’intérêt de la visite est ailleurs. L’exposition Pionnières vous propose plutôt une invitation au voyage dans le premier quart du XXsiècle ainsi qu’à une découverte de destins exceptionnels entrevus sous le prisme du féminin. À l’orée de chaque salle, des panneaux affichent les droits que les femmes conquièrent peu à peu. En contrepoint, les œuvres exposées sont le fruit la plupart du temps de femmes de bonne famille, éduquées et cultivées, souvent émigrées, qui ont réussi à vivre de leur art, à force de travail et de courage. La réalité du quotidien vs l’avant-garde.

Olécio partenaire de Wukali

La visite est thématique : « Garçonnes », « Les deux amies », montrant au public des pratiques sexuelles libres où la tolérance est de mise. La dernière salle consacrée aux « Pionnières de la diversité » ouvre la voie à un humanisme universel dont les femmes se feraient les chantres. « American Picnic » de Juliette Roche clôt l’ensemble.

exposition Pionnières les artistes femmes à Paris au temps des années folles
Romaien Brooks / Au bord de la mer.
Huile sur toile (105 x 68 cm), 1923.
© Gérard Blot/RMN-GP/ Centre Pompidou, MNAM-CCI

Les œuvres sélectionnées mériteraient davantage de contextualisation : réunir des artistes femmes ne suffit pas en soi à comprendre les objectifs d’une telle manifestation. Ne disposant pas de collections permanentes, le Musée de Luxembourg offre un espace que les commissaires d’exposition investissent au gré de leurs envies. Pour le public il est bon aussi de savoir ce qui a motivé leurs choix. Des noms manquent forcément : on pense à la pionnière du cinéma Alice Guy qui ne figure pas parmi les invitées du musée. Des passerelles avec des événements antérieurs – Suzanne Valadon et ses contemporaines, peintres et sculptrices 1880-1940 au Musée des Beaux-Arts de Limoges en collaboration avec l’Abbaye de Brou – auraient été appréciées.

Mais comment en vouloir à quiconque ? Car encore une fois, c’est l’effervescence d’une époque – les années folles – qui l’emporte sur les individualités. Ce qui frappe, c’est la diversité étonnante des éléments convoqués : tableaux, vêtements, bijoux, marionnettes, collages, archives audiovisuelles…

Paris, capitale de tous les possibles

Paris est enfin au cœur de la visite. Autrement dit, c’est bien l’alchimie entre une ville, un temps donné et des femmes qui se retrouvent ainsi plongées dans un tourbillon cosmopolite et créatif. The place to be au cours de la décennie 1920-1930, à travers des quartiers devenus mythiques. La plupart d’entre elles vient d’ailleurs : Europe de l’Est, États-Unis, Afrique. La métropole française incarnait encore la capitale culturelle du monde comme l’ont montré des auteurs tels Karlheinz Stierle, Patrice Higonnet ou Christophe Prochasson

Un regret : que l’exposition eût été davantage immersive pour nous faire ressentir cent ans après les vibrations trépidantes de cette tranche de vie enchantée.

Un bonheur : celui d’apercevoir des œuvres uniques, parfois issues de collections privées, où la femme est montrée telle qu’elle est.

Exposition Pionnières – Artistes dans le Paris des Années Folles – Musée du Luxembourg – Paris
Du 2 mars au 10 juillet 2022

Illustration de l’entête: Marevna (Marie Vorobieff), La Mort et la femme, 1917, © Adagp, Paris, 2021 – Association des Amis du Petit Palais, Genève / Studio Monique Bernaz, Genève

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