Après Mazarin, Marie Antoinette ou encore Robespierre, La bibliothèque des illustres, une collection des éditions Perrin, vient de publier un nouveau livre ayant trait au Régent. La contribution de la Bibliothèque Nationale de France est toujours aussi riche au niveau de l’iconographie. Plus des neuf-dixièmes des illustrations proviennent de ses fonds dont personne ne peut remettre en cause sa qualité, sa quantité, sa diversité. Plus d’une centaine de reproductions (expliquées, mise en situation) viennent agrémenter la lecture. Parfois un dessin, un tableau, une lettre en disent bien plus que des dizaines de pages de mots.
Philippe d’Orléans, le fils de Monsieur, frère du roi Louis XIV et de sa seconde épouse, la princesse Palatine. Quelle plaisir au demeurant que de lire sa correspondance. Mais quelle femme, quelle mauvaise foi ! Une plume trempée dans le fiel, lucide quant au caractère et aux défauts de son rejeton, mais pleine d’amour maternel. On est loin de l’autre grand témoin du temps, le duc de Saint Simon, ami du Régent, mais pas toujours tendre avec lui.
Il y a eu, et il y a toujours, une « légende noire » autour de la personnalité du Régent : jouisseur, père incestueux, indécis et j’en passe… Mais depuis une trentaine d’années, plus d’un historien s’est penché sur cette période (courte, elle ne durera que huit ans) de notre histoire et sur la personnalité de Philippe d’Orléans. Et le constat est loin d’être le même !
C’est le résultat de tous ces travaux que nous livre donc Thierry Sarmant. Ainsii y voit-on un homme de son temps, quelque peu en rupture avec les « codes de la cour », un jouisseur, oui, mais pas plus que la haute aristocratie de l’époque et même à la fin du règne de Louis XIV.
Il est conscient de sa place dans la société, au sommet, où le destin l’a ainsi placé. Il a une très bonne éducation, même s’il passe pour être quelque peu paresseux. Qui plus est, il est doté d’une excellente mémoire qui en fait un homme cultivé et curieux. Il dénote, dans son milieu, par son amour pour les sciences en général et la chimie en particulier, d’où les soupçons de s’adonner à l’alchimie.
Il est brave et courageux, doté d’un vrai charisme, ce qui lui vaut une grande réputation aux armées où il se montre un grand chef de guerre (comme son père), à l’inverse de son cousin le duc de Maine. Succès qui, même s’ils sont reconnus, ne seront pas véritablement récompensés par le Roi. Ses relations avec Louis XIV sont assez « compliquées » à cause de son « libertinage » que le monarque combat.
On connaît tous la façon dont il procéda pour casser le testament de Louis XIV, la mise en place de la polysydonie (cliquer) avec les hommes de son oncle, mais aussi le retour de la haute aristocratie, la réforme financière et monétaire de Law qui, même si elle finit en banqueroute, permit néanmoins d’assainir les finances publiques et surtout la paix avec l’Angleterre qui va ouvrir une période de paix de plus de 20 ans et ainsi permettre le développement économique de la France.
Non, il n’a jamais voulu le pouvoir, il fut toujours très protecteur et respectueux avec le jeune Louis XV, mais quand, par la force des faits, le pouvoir lui échut, il s’est montré un travailleur acharné, sincèrement dévoué à la chose publique et doté d’un certain libéralisme. Soit, il ne revint pas sur l’abrogation de l’édit de Nantes alors qu’il montrait un « déisme » qui choquait à l’époque. Il était bon et affable, mais d’une grande fermeté pour que le droit s’applique. Qu’on se souvienne des bretons autour de Pontalec (cliquer), du comte de Horn, et de l’emprisonnement du duc et de la duchesse du Maine lors de la conjuration de Cellamare (cliquer).
Sa conception du pouvoir est celle de son oncle : le pouvoir absolu du monarque, il suffit de voir l’échec de la polysydonie et la non convocation des États généraux qu’il avait plus ou moins promis. Il a conçu son rôle de Régent comme étant le transmetteur de l’intégralité de l’héritage de Louis XIV à son arrière petit-fils comme le firent Catherine et Marie de Médicis et Anne d’Autriche. Lui n’a pas eu à gérer de crise liée à cet état de Régence.
La fonction fit l’homme : le neveu rebelle du Roi-Soleil n’a eu aucune peine de revêtir les habits du grand roi.
Comme le souligne Thierry Sarmante en conclusion : le Régent fut le premier maître de la France à décider que la gloire devait le céder au bonheur. Dommage que Louis XV n’eut pas la même conception du pouvoir !
Les amateurs d’histoire ne peuvent que se réjouir de cette collection, La collection des Illustres, publiée chez Perrin, et qui permet de mieux percevoir la société, tout comme le contexte de l’époque dans laquelle évoluait la personnalité étudiée. Nous attendons avec impatience les prochaines parutions.
Illustration de l’entête: Portrait de Philippe II, duc d’Orléans, en armure et portant le Grand Cordon de l’ordre du Saint Esprit. Peint par Jean-Baptiste Santerre en 1717 (détail). Birmingham museum and Art Gallery..UK
Le Régent
Un prince pour les Lumières
Thierry Sarmant
éditions Perrin. La collection des illustres. 25€
Illustration de l’entête:
Portrait de Philippe II, duc d’Orléans en armure et portant le Grand Cordon de l’ordre du Saint Esprit. Peint par Jean-Baptiste Santerre en 1717 (détail). Birmingham Museum and Art Gallery
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