Voilà une pièce de théâtre en vers. Pas en alexandrins, non loin de là, plutôt en vers libres de dimensions variées et inégales. Bon, les rimes ne sont pas toujours riches, mais comme on le fait remarquer dans l’opéra-bouffe La Belle Hélène du génial Jacques Offenbach : « La rime n’est pas riche mais la richesse ne fait pas le bonheur ». Ce qui importe c’est avant tout le rythme, la musique qui se dégage du texte, et à ce niveau, Antoine Le Grix réussit tout à fait à cet exercice. Voici donc un texte ayant une mélodie, une prosodie interne évidente, pas un long fleuve tranquille, non, plutôt un gave de montagne avec ses accélérations, ses pauses, ses reprises, parfois calmes, parfois tumultueuses.
D’un côté Siméon, taciturne, au lourd passé qu’il fuit, ne croyant plus en grand chose et surtout pas à lui-même. De l’autre Aurore, une jeune femme lumineuse, dont le prénom est à lui seul le symbole de sa personnalité : elle annonce, elle se bat pour un avenir meilleur, contre la tyrannie du cruel « Régent ».
Lui pense que l’amour n’existe plus, du moins pour ce qui le concerne ; quant à elle, elle considère que l’amour n’existe simplement pas, du moins pas pour elle qui se dévoue envers les autres et n’ayant pas de temps pour s’occuper de sa propre personne.
Bien sûr, leur rencontre interagira entre et au plus profond d’eux, leurs certitudes vont se trouver remises en cause, sauf qu’il faut se battre pour le bien commun, contre la tyrannie et pour l’égalité entre les hommes. Chacun d’entre eux va se battre avec ses armes propres, mais ensemble (l’union faisant la force), enfin, quand ils le peuvent.
Au niveau du traitement du sentiment amoureux, comment ne pas penser à Marivaux, voire à Shakespeare sous certains aspects. Comment ne pas penser aux stances du Cid dans le long monologue d’Aurore (acte IV, scène III) sur l’Amour et sur son engagement. On pense à ces grands moments, à ces géniaux auteurs, car ils font partie de notre culture. On y pense, mais il ne faut pas comparer, car sinon on ne jouerait que les « classiques » laissant la création aux grands absents. En littérature, tout a été dit dans la Bible. Comme l’a fait remarquer Céline, ce qui compte c’est le style et la façon de bâtir le récit. Si cela est vrai dans toute la littérature, cela l’est aussi au niveau des pièces de théâtre, que ce soit des comédies ou des tragédies, ce qu’est de fait, L’éclat de l’aurore. Alors ne boudons pas notre plaisir et laissons nous porter par la poésie d’Antoine Le Grix.
L’éclat de l’aurore
Antoine Le Grix
édition L’Harmattan. 14€
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