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Marrakech années 90, les silences de la chair et des apparences au coeur du roman de Leïla Bahsaïn

par Émile Cougut

Dans son roman Ce que je sais de monsieur Jacques, Leïla Bahsaïn entraîne le lecteur dans la ville de Marrakech une lumière faite d’ombres et d’apparences, un monde de silences et de drames humains dissimulés.

Loula , une jeune adolescente, vient avec sa famille d’emménager dans un quartier périphérique de la ville de Marrakech, les Palmiers. Quartier d’habitations collectives, proche d’une prison, il est peuplé de ce que nous appelons la classe moyenne., pas comme ses voisins, dont le seul surnom résume son peuplement : « les indigents ». En cette fin des années 1990 au Maroc, pas de problèmes de bande, de luttes entre quartiers pour des problèmes territoriaux, ce qui ne veut pas dire que la drogue, essentiellement le hachisch, n’en soit absente.

Loula est une jeune fille comme les autres. Elle lie des amitiés avec des jeunes de son âge, comme Zahira, aveugle mais musicienne de grand talent, en outre, elle a de bons résultats au collège et passe beaucoup de temps à regarder au judas de la porte d’entrée pour voir ce qui se passe. C’est un défilé de jeune garçons, de son âge, beaux et pauvres. ils vont à l’étage supérieur, chez le « français », celui qu’on appelle monsieur Jacques. C’est  un homme solitaire, se déplaçant en vélo, toujours vêtu de débardeurs et de shorts. Un solitaire qui ne parle à personne. Très vite, Loula comprend que ces garçons sont payés pour être ses amants. Mais personne ne dit rien, fait plus que tolérer, fait comme si rien ne se passait : pas vu, pas pris, il suffit d’être aveugle. Tout ce qui se passe chez lui, c’est invisible. Et puis, tout s’achète ici. Ce qui importe se sont les apparences et la réputation. Surtout pour une jeune fille. Fatima n’est elle pas exclue du quartier, de sa famille même après s’être fait violer ! Toutes les conséquences pèsent sur elle, sûrement pas sur ses agresseurs !

Loula connaît les premiers émois de l’amour, mais elle est vite déçue. Son expérience de vie lui apprend la violence de la société, celle contre les femmes qui perdent toute idée de liberté, celle des adultes contre les enfants. La violence des forts contre les faibles, la violence de l’argent qui permet tout et asservi les pauvres. Et pour survivre, il faut savoir louvoyer, serrer les dents, faire preuve continuellement de résilience à chaque coup dur. Le rêve est permis, bien sûr, mais la réalité est bien loin de les réaliser.

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Leïla Bahsaïn signe ici un beau roman dénonçant la violence de la société, dont les enfants en général et les femmes en particulier, sont le dernier maillon d’un système de domination. Une société dominée par l’argent et surtout par les apparences, une société hypocrite. Mais notre société actuelle du premier quart du XXIème siècle est-elle différente? A chacun d’apporter sa réponse.

Ce que je sais de monsieur Jacques
Leïla Bahsaïn

éditions Albin Michel. 19€90

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