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La femme dans la littérature médiévale

par Pierre de Restigné

Quand on pense aux femmes célèbres de l’époque médiévale, comment de pas avoir à l’esprit les noms de Christiane de Pisan, d’Hildegarde de Bingen, d’Aliénor d’Aquitaine, de Blanche de Castille, voire de Pétronille de Chemillé ou d’Éloïse. Elles ont toutes marqué leur époque et même au-delà. Mais, elles furent peu nombreuses au regard de la longueur de la liste des hommes « qui ont marqué l’histoire » et non point parce que se sont ces derniers qui ont écrit l’histoire.

Une des raisons de ce triste constat se trouve certainement dans les mentalités, dans la culture de cette période médiévale. Celle-ci était marquée par le corpus chrétien issu de la Bible. A la base, seule Eve a péché en mangeant le fruit défendu, la faute d’Adam est moindre, il n’a fait que l’écouter au « lieu de faire son rôle de chef de famille ». Mais elle est aussi empreinte de l’héritage du droit romain (lui-même très influencé par le droit grec. On assiste, au niveau théologique (et par voie de conséquence dans le droit « civil »), à un vrai recul de la place des femmes dans la société à partir du XIIème siècle avec la découverte et l’étude approfondie des écrits d’Aristote pour qui la femme n’est autre qu’un homme inachevé et dépendant.

Pour autant, on remarque un grand nombre de saintes. Celles-ci sont admirées des hommes, enfin des clercs, car elles font montre d’une fermeté, d’une volonté, d’une force de caractère que l’on entendait pas chez les « faibles femmes ». Le plus souvent, ces saintes sont des religieuses, c’est à dire des femmes mariées, ce qui les place sous l’autorité de leur mari (le Christ), ce qui correspondait aux critères sociaux de l’époque.

Le constat que fait Pascale Bourgain dans son étude de la littérature médiévale, nous montre un tableau où les rapports homme/femme sont dominés avec bien des nuances par ces derniers. Il ne suffit que de lire certains des carmina burana pour percevoir que la femme est plus un objet de plaisir pour les hommes qui n’ont aucun scrupule à mentir pour les séduire et à partir une fois leurs désirs assouvis sans se soucier des conséquences pour leurs proies. C’est évident pour les paysannes. Même l’amour courtois n’est pas exempt de tout rapport de domination. De fait, les femmes n’ont pas tellement de liberté dans leurs choix.

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Pour autant, bien des écrits décrivent des femmes acariâtres qui font le malheur de leurs époux (on est loin de la femme soumise acceptant tout de son époux ) comme Grisélis, ou qui se révoltent contre les infidélités de leurs maris. Et puis, il y a celles, qui pour tromper le manque d’amour, l’indifférence, voire la violence de leur conjoint, n’hésitent pas à les tromper. On note même une certaine indulgence en ce qui concerne l’adultère ou tout du moins un début de compréhension et donc d’acceptation, comme un « juste retour des choses ». Il en ressort comme le montre l’autrice  que les auteurs de ces récits, chansons et autres écrits (auteurs essentiellement masculins et ce n’est pas le moindre paradoxe) ont, quelque part, compris et accepté, la dure condition des femmes de leur époque avec une vraie capacité de sympathie qui les oriente vers un peu de compréhension. Bien des longs monologues de femmes dans les romans sont de vrais essais d’étude de la psychologie féminine.

Ce petit essai de Pascale Bourgain, publié par l’école Nationale des Chartres, nous offre un tableau contrasté de la situation des femmes à l’époque médiévale à travers la littérature de cette époque où la condition féminine était peu valorisée (et c’est un euphémisme) et dont le quotidien de la grande majorité d’entre elles était avant tout orienté vers la survie. De fait, la Renaissance va, sous bien des aspects, faire régresser la condition féminine, mais c’est un tout autre sujet…!

Le malheur d’être femme
De la désinvolture à la compassion dans la littérature médiévale
Pascale Bourgain

éditions Propos/ École nationale des chartes/ PSL. 8€

Illustration de l’entête: Margareta van Eyck (Maaseik ?, circa 1390 – Bruges, 1441), Portrait de Margareta van Eyck, 1439, Huile sur panneau, 32.6 x 25.8 cm, Musea Brugge – Groeningemuseum © Musea Brugge, Photo: Hugo Maertens

                                                             

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