Cette année nous commémorons le 900 ième anniversaire de la naissance d’Aliénor d’Aquitaine, reine de France, reine d’Angleterre. A cette occasion, l’abbaye de Frontevaux organise une exposition autour du gisant de cette reine, avec la reconstitution, enfin, l’essai de reconstitution, du monument du XVIème siècle qui l’avait recueillie ainsi que son époux Henri II, son fils Richard cœur de lion et sa belle fille Isabelle d’Angoulême.
Même si les historiens hésitent entre 1022 ou 1024 comme date de naissance d’Aliénor, c’est cette dernière qui est généralement retenue. De fait, depuis la biographie de Régine Pernoud, il y a eu peu d’études scientifiques sur cette reine, lacune que tente ici de combler Philippe Tourault.
Il ne s’intéresse qu’à la personne Aliénor et ne fait qu’effleurer le problèmes économiques, culturels, philosophiques, religieux de son époque. Il fait bien sûr allusion aux guerres d’Henri II, aux rapports entre Richard et Philippe Auguste, etc. Pour autant nous ressentons à travers les lignes, la révolution intellectuelle, théologique du XII siècle : Suger contre Bernard de Citeaux, l’apparition du gothique, la fascination de l’Orient. Et que dire de la complexité des liens féodaux qui structuraient la société d’une façon qu’il est devenu difficile de percevoir et de comprendre. Pour autant, à cette époque, ils étaient « naturels » car correspondant aux rapports sociaux qui existaient.
Philippe Tourault donc s’attache avant tout à combattre la « légende noire » autour d’Aliénor, légende créée essentiellement par le clergé de son époque, qui, non content d’être misogyne, essayait de trouver une explication divine aux faits : l’échec de la croisade : le soi-disant adultère avec son oncle ; la révolte des fils d’Henri II (elle était mariée avec un de ses cousins au troisième ou quatrième degré ); son caractère soi-disant volage : l’héritage de son grand-père Guillaume IX, et j’en passe. Il avait du mal à imaginer qu’une femme puisse être « libre », qu’elle puisse demander de se séparer de son mari, qu’elle puisse vouloir se détacher d’un mari dominateur (pour ne pas dire violent) et surtout qu’elle veuille défendre son héritage contre les empiétements d’Henri II, tout époux qu’il fut. Et cette « légende noire », a perduré durant des siècles, il suffit de lire Michelet ! Peu l’on défendue, sauf peut-être dans son Aquitaine natale .
Soit, Aliénor a une personnalité atypique suivant les critères de son époque. Et, comme bon sang ne saurait mentir, il en est de même en ce qui concerne sa petite fille, Blanche de Castille. Sauf que cette dernière, non seulement engendre un saint (ce qui empêche aux ecclésiastiques de la critiquer), mais n’a jamais fait l’objet de la « campagne de calomnie » dont Aliénor fut victime. Il faut dire que Blanche n’avait pas un immense territoire qui lui appartenait en propre à gérer et à défendre.
Soit le Moyen-âge est quelque peu misogyne, mais pour autant le système féodal donnait des droits importants à celles-ci, Mahault d’Artois n’était-elle pas Pair de France à la cour de Philippe le Bel et de ses rejetons ? De fait, nous voyons encore cette époque de notre histoire en général et la personnalité d’Aliénor d’Aquitaine avec les critiques de la Renaissance et les « fantasmes » du XIXème siècle. Heureusement que la recherche historique met fin à bien des lieux communs, même si les discussions restent ouvertes. Et il est certain que la figure d’Aliénor d’Aquitaine fera l’objet de bien des études tant elle est atypique. Philippe Tourault amène là une belle pierre à cet édifice dans cette intéressante biographie publiée aux éditions Perrin.
Aliénor d’Aquitaine
Philippe Tourault
éditions Perrin. 21€
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