Ils furent des pionniers, des guerriers, des héros, avant tout des hommes, P-E Cayral dans son roman au titre si étincelant Si vivant, nous fait revivre cette épopée des as de l’aviation pendant la Première Guerre mondiale.
Vivant, un beau prénom. Vivant Henri, fils unique mais doté de très nombreux oncles, d’une tante et de quelques cousins comme Edmond, lui aussi fils unique de l’unique tante mariée à un millionnaire, et René, encore un fils unique de son oncle Jean-Pou, cet oncle avec qui son père a créé une florissante usine de paratonnerre à Lyon.
Vivant a une enfance avant tout marquée par les vacances dans la propriété de ses grands-parents paternels avec ses cousins, tous quelque peu casse-cous. Au niveau scolaire, c’est loin d’être extraordinaire, il pense plus à s’amuser qu’à travailler. Et puis son père décède dans un accident, il aide sa mère dans l’entreprise familiale, s’installe à Paris, sous les conseils de son oncle Adrien, homosexuel, fonctionnaire au ministère de la guerre.
Mais il préfère s’inscrire à Saint Cyr, devient sous- officier, puis officier, et quand l’armée demande des pilotes d’avion, il se porte volontaire avec ses deux cousins.
Et arrive la Première Guerre mondiale. Ils sont tous les trois dans une escadrille, près du front à proximité de Reims, escadrille commandée par Edmond, puis par lui quand ce dernier a un accident mortel.
Nous sommes loin de la dureté de la vie dans les tranchées, on boit beaucoup de champagne, la hiérarchie est quelque peu « relâchée », même lui reste comme il a toujours été : il navigue en pyjama ou avec des accoutrements quelque peu éloignés de l’uniforme.
Mais c’est un excellent pilote, un as, doublé d’un vrai charisme auprès de ses hommes. Il voit l’évolution de la guerre aérienne qui passe d’un vrai respect de l’ennemi avec l’obsession, enfin plutôt l’ordre, de l’éliminer. Mais il voit les hommes mourir autour de lui, René et bien des amis. Il ne devient pas anti-militariste pour autant, tout en restant particulièrement critique, voire cynique avec l’idéologie militaire. On n’est pas loin de la série « Les têtes brûlées » qui ont fait les beaux jours de la télévision.
Vivant est avant tout un homme de devoir mais aussi un homme libre , surtout quand il est aux manettes de son avion. Il rencontre, dans sa jeunesse parisienne, la jouissance (en outre sexuelle), mais la guerre lui fait comprendre ce que la vie mondaine a de superficiel, et c’est tout naturellement qu’il noue un lien bien plus profond avec Margueritte, une jeune fille quelque peu délurée qu’il rencontre dans une cave de Reims dévastée. C’est elle qui se propose à être sa marraine de guerre et qui par ses écrits, par son enthousiasme lui permet de se découvrir, de murir et de sortir de ce statut d’adolescent attardé.
Si vivant est un livre qui nous amène vers une facette de la Première Guerre mondiale bien éloignée de « l’enfer des tranchées », mais où la mort est toujours aussi omniprésente. La beauté, la liberté, mais avec la mort en arrière-plan. C’est aussi un roman quasi initiatique, un roman du passage de l’adolescence à la maturité.
Si vivant
P.E. Cayral
éditions Anne Carrière. 20€90
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Illustration de l’entête: René Fonck devant son avion, un Spad XIII. Le pilote appartient à l’escadrille Spa 103. Fort de la Pompelle, 1918 • WIKIMEDIA COMMONS