Ce livre au titre guilleret La Souris, ne le manquez surtout pas chez votre libraire, et son auteur Ivan Philippov, retenez bien son nom !
Nous revenons au bon vieux temps de l’Union Soviétique, en pleine guerre froide où a été créé l’Institut de l’immortalité fonctionnelle dans le but de rendre encore opérationnels les soldats tués et de proroger ainsi la vie des oligarques. Avec la chute du communisme, grâce ou à cause de l’impéritie administrative, cet institut continue de fonctionner tout en s’adaptant à la dérégularisation économique. Jusqu’au jour où… on lui demande d’approfondir encore plus leurs recherches afin de rendre Poutine immortel.
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Mais un jour, à cause de moultes négligences, la souris blanche, BALB/c numéro MB1#99324, s’échappe porteuse d’un terrible virus qui se propage à une vitesse vertigineuse (comment ne pas penser à la théorie du virus échappé d’un certain laboratoire chinois à Wuyang en 2019), et cause une totale apocalypse à Moscou. La plupart des habitants meurent, d’autres se transforment en zombies. Ces derniers sont quasi aveugles, ils ne peuvent pas sauter mais ils courent très vite, ne mangent que de la chair d’humains non contaminés, chassent généralement en foule. Ils sont aussi dotés d’une ouïe très fine et d’un odorat particulièrement développé.
Poutine est dévoré, les députés de la Douma disparaissent, tout l’appareil d’état se disloque en quelques heures.
Les personnages de ce livre sont des survivants qui, totalement par hasard, n’ont pas été touchés par ce virus. Leur seule idée, sortir de cet enfer, et rester en vie. Pour les héros de notre histoire, la porte de sortie semble être le nord-est, dans la direction de la ville de Iaroslav. Ils ne se connaissent pas, parfois tout les sépare, mais il s’agit de survivre, de fuir l’enfer. Certains n’y arriveront pas, allant parfois à se sacrifier pour les autres. S’ils partent seuls dans leur fuite, certains vont se rencontrer et partager leur énergie pour la survie en commun.
Je ne vais pas tout vous dévoiler, loin de là, car se serait vous priver d’un plaisir certain de lecture. Cependant je ne peux que vous inciter à suivre les épreuves et le cheminement de deux enfants dont les parents ont été emportés par l’épidémie : Kostia, 5 ans et son « grand» frère Seva. Puis aussi Assia, la comédienne au chômage qui pour gagner sa vie porte un déguisement de souris rose pour attirer les touristes, c’est ce déguisement qui la sauve car son odeur est contenue dans cette enveloppe. Rassul, ce tchétchène au grand cœur, Tonia, la gardienne de prison, qui ne doit sa survie que parce qu’elle est restée dans le fourgon cellulaire avec Larv, un savant dont les recherches venaient d’être classées secret-défense et donc, comme il avait précédemment fait part des résultats de ses travaux, a été, postérieurement, accusé de trahison. Et tant d’autres : des profiteurs, des désespérés, des salauds et j’en passe…
Chacun, bien sûr découvre en lui des ressources qu’il ignorait posséder, son humanité, une remise en cause de ses certitudes. Heureusement que certains, face à l’urgence absolue, arrivent à sortir du carcan dans lequel ils évoluaient, et savent prendre des décisions radicales sans avoir peur des conséquences pour leur personne, pour leur carrière.
Mais l’acteur principal de ce roman est Moscou, cette ville merveilleuse, dépeinte avec réalisme et précision, malgré les ravages qui lui sont infligés. Moscou, tour à tour protectrice et menaçante, coeur de l’âme slave, de ses excès, en bien et en mal.
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La souris règle ses comptes avec la société russe en dépeignant sa violence et en dénonçant le retour à l’ordre moral que connait le pays actuellement.
Ce livre, qui a été écrit avant la guerre en Ukraine et la mort de Navalny, a bien sûr été interdit à la vente en Russie, et son auteur, Ivan Philippov, déclaré agent de l’étranger, a du s’exiler. Par voie de conséquence, comme au bon vieux temps de l’URSS, les ventes sous le manteau ont explosé en Russie et l’auteur est l’invité de tous les médias occidentaux.
Vous avez compris, il faut lire La Souris, un vrai pamphlet contre non seulement le régime actuel en Russie, mais, en filigrane, contre toutes les « démocraties a libérales » qui ne sont que des dictatures déguisées et que défendent les mouvements d’extrême-droite.
Une critique contre les « élites » qui en veulent encore plus, qui aspirent à l’immortalité, mais pour elles-seules, et méprisent leur propre population. Ici, un virus, ailleurs l’homme augmenté. Mais c’est exactement la même chose, le même but, créer à côté d’homo sapiens sapiens, une nouvelle race d’hominidés qui dominera l’autre race.
La souris
Ivan Philippov
éditions Blueman. 20€
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