Mais quelle serait donc la cause à l’origine de la fin ( de «la chute» selon certains auteurs) de l’Empire romain ? Selon ses propres certitudes et les points de vue des historiens de nombreuses raisons sont avancées.
Depuis Montesquieu, les théories abondent. La décadence est un thème qui fait florès dans certains milieux, quand ce n’est pas le titre d’un tableau célèbre de Thomas Couture au dix-neuvième siècle.

Huile sur toile H. 472,0 ; L. 772,0 cm.. Achat au Salon, 1846
© Musée d’Orsay, Dist. RMN-Grand Palais / Patrice Schmidt
Nous connaissons bien sûr l’avancée des Barbares sur les limes orientales, la christianisation qui se répand sur le pourtour du Bassin méditerranéen, la démographie qui s’effondre. D’aucuns vont même jusqu’à incriminer une certaine forme de botulisme provoquée par les chaudrons métalliques dans lesquels des boissons fermentées et alcoolisées bues lors des bacchanales, étaient préparées, ce qui eût nuit à la fécondité de la gente masculine romaine.
Faut-il encore ajouter à tout cela, la crise économique et politique, les brandons de guerre civile à Rome, la corruption, sans méconnaître la situation sanitaire de l’empire et les pandémies telle la Peste de Cyprien (250) ou plus tard celle de Justinien vers 542. Le changement climatique est assez souvent évoqué, mais là a contrario de notre époque, car il s’agit de refroidissement.

Musée des Augustins. Toulouse
Il faut ainsi savoir qu’entre 536 et 547 après J.-C., trois éruptions volcaniques distinctes ont généré suffisamment de cendres pour amoindrir la lumière du soleil sur terre pendant 200 à 300 ans, refroidissant ainsi la surface de la Terre de plusieurs degrés. De nouvelles preuves de cette mini-période glaciaire ont été trouvées en Islande.
En étudiant des roches transportées par les icebergs du Groenland jusqu’à la côte ouest de l’Islande, une équipe de chercheurs a découvert ce qu’elle pense être une preuve supplémentaire de l’intensité de cette mini-période glaciaire. Leurs conclusions, publiées le 8 avril dans la revue Geology, indiquent que le refroidissement prolongé a joué un rôle clé dans le déclin de l’Empire romain d’Occident, même si tous les historiens ne sont pas d’accord.
Définir, dater avec précision et rigueur le moment quand aurait commencé ce déclin, est de ces absurdités, de ces paresses intellectuelles plus exactement, dont se pourlèchent les amateurs de nouvelles fortes, de fake news dirait-on de nos jours.
La date exacte de la chute de l’Empire romain d’Occident fait cependant l’objet d’un débat, certains estimant qu’elle s’est produite en 410 après J.-C., soit avec le sac de Rome par les Wisigoths, quand d’autres la situent en 476 après J.-C., avec l’abdication de l’empereur romain Romulus Augustulus. Selon les auteurs de l’étude, le climat plus froid engendré par la mini-période glaciaire aurait pu aggraver les tensions dans cette région instable au lendemain de sa chute, alimentant ainsi les migrations massives qui se sont produites à l’époque.
La dendroclimatologie, c’est à dire la datation de l’âge des arbres par l’étude de leurs cernes (dendrologie) et l’impact de leurs croissances provoquées par le climat, apporte certaines réponses. Ainsi il y a une dizaine d’années, en 2016, une étude publiée dans la revue Nature Geoscience avait conduit à parler de mini âge de glace.
La littérature et documentation historique de cette époque fournissent quelques preuves de ce semble-t-il, bouleversement climatique. On apprend ainsi rapporté par un historien byzantin du nom de Procope de Césarée, qu’un ciel sans soleil s’est produit comme « un présage de grande terreur » en 536, précédé par des périodes de froid inhabituelles et de mauvaises récoltes, de sorte que « ni la guerre, ni la peste, ni rien de ce qui apporte la mort ne manquait parmi les hommes ».
Soulignons que dans ces mêmes temps alors, à l’Extrême-Orient, pour ne pas dire en Chine, survenait la chute de la dynastie Wei, menacée elle aussi par des envahisseurs venus de l’immense steppe eurasienne. Un moment de bouleversement démographique et de rapports de force à l’échelle continentale. Des mouvements de population générés (et c’est le sujet même) par le changement climatique.
De la même manière, et de l’autre côté de l’Atlantique dans ce qui correspond aujourd’hui au Mexique, disparaissait pareillement la civilisation de Teotihuacan provoquée par une suite de catastrophes sismiques majeures. L’on parle d’une puissance sismique équivalente à 32 000 bombes du type Hiroshima !
Illustration de l’entête: Pierre-Jacques Volaire (1729-1799) – Eruption du Vésuve de 1782. Naples, Musée de Capodimonte.
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