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Alexander Malofeev et Debora Waldman pianiste et cheffe complices à La Roque d’Anthéron

par Pétra Wauters

Quand on aime Beethoven, c’était le concert à ne pas manquer, et pour nous, pas question de rater ce rendez-vous entre la fougue juvénile d’un jeune pianiste virtuose, l’expérience d’une cheffe d’orchestre remarquable, et ces monuments de la musique classique.

Le Concerto n°5, dit L’Empereur, et la Symphonie Héroïque représentent deux sommets du répertoire, chacun posant des défis distincts. Mais ce dimanche 27 juillet, les artistes ont relevé ces défis avec éclat !

On pense bien sûr à Alexander Malofeev, le jeune prodige russe. Il n’a que 24 ans, et déjà tout d’un géant.
Même si,  il faut bien l’avouer,  on s’est inquiété au début du concerto. Malofeev est parti comme un pur-sang, sang chaud, cœur de braise, le visage crispé, penché sur son clavier comme s’il voulait le pénétrer. Il s’est lancé au galop sur les lignes de la partition, et l’on a bien cru le perdre en route.

Mais soudain, son jeu s’est apaisé sans rien perdre de sa vitalité.
La belle et souveraine cheffe Débora Waldman, à la tête de l’Orchestre National Avignon-Provence, nous a conquis d’emblée par son élégance, sa grâce et la maîtrise de sa direction. Elle exprime tout, dans son geste comme dans ses regards et les échanges entre elle et le soliste ne nous ont pas échappé. C’était merveilleux de les voir ainsi dialoguer, et d’écouter une musique qui, tout à coup, s’est incarnée, impériale, vibrante, vivante.

La technique du pianiste est éblouissante. Et pour nous, qui ne l’avions encore jamais vu en concert, cette première découverte restera gravée dans nos mémoires.
Comment, à 24 ans, peut-il déjà posséder cette maturité, cette profondeur que l’on trouve chez les grands interprètes, qu’ils soient de l’école russe ou pas du reste ?

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Alexander Malofeev. La Roque d’Anthéron, 27 juillet 2025
©photo Pierre Morales

Ce qui frappe encore,  c’est ce contraste en lui : à certains moments, une fougue juvénile, et soudain, comme s’il prenait dix ans, il se voute et entre dans un dialogue profond avec son instrument et nous livre alors une interprétation ample, déliée, libre,  d’une intensité remarquable.
On se souviendra longtemps de cette cadence quasi infernale d’ouverture. C’est sans doute pour cela qu’il est parti aussi fort, avec une présence scénique, une autorité musicale qui nous a paru un peu excessive sur l’instant.
Mais très vite, on a senti qu’il savait aussi écouter, se tourner vers Débora Waldman, et vers les musiciens. Les défis sont nombreux dans cette œuvre, et nous admirons ce jeune pianiste pour avoir si bien exprimé la majesté et la grandeur de ces pages impériales.

Il est revenu plusieurs fois saluer son public. Un public aux anges. 
On parle souvent de la beauté du jeune homme,  mais il dégage bien plus que cela : c’est sans doute ce qu’on appelle,  la classe.

Après le monumental Beethoven, il nous offre deux bis de Glinka. Le contraste est saisissant entre le programme et les bis. L’intimité, la tendresse, la délicatesse caressent ces pages rares : Glinka Nocturne en fa mineur, La séparation, puis Mazurka en sol mineur,  du même compositeur.

Après l’entracte, place à la Symphonie Héroïque, qui résonne encore dans notre tête par ses audaces harmoniques et les exigences qu’elle impose à chaque pupitre sans exception. On entend tout ! C’est magnifique de suivre les cordes lyriques dans leurs déchaînements dramatiques, les vents,merveilleux solistes, dont le rôle est essentiel, et l’ensemble des musiciens qui, sous la conduite de Débora Waldman, ont fait preuve d’une cohésion remarquable et d’une précision indispensable pour ne pas se perdre dans les nombreux contrastes de couleurs musicales, les changements de tempo, les variations rythmiques…

Debora Waldman. La Roque d’Anthéron, 27 juillet 2025
©photo Pierre Morales

Rappelons que Debora Waldman, native de São Paulo, fut l’assistante de Kurt Masur à l’Orchestre National de France entre 2006 et 2009. Elle est aussi la première femme à diriger un orchestre national en région. Nommée à la tête de l’Orchestre National Avignon-Provence en 2020, son mandat a été renouvelé jusqu’en 2026. Nous l’avions déjà écoutée à Aix, au Grand Théâtre de Provence, en 2023, dans un très beau programme Mozart/Tchaïkovski aux côtés du pianiste David Kadouch.

Débora Waldman est brésilienne et israélienne, et connue pour ses messages de paix. En 2011, elle dirige le concert Thessalonique, carrefour des civilisations, en hommage à l’amitié arabo-israélienne, avec l’Orchestre de l’État de Thessalonique.

Ce 27 juillet à La Roque d’Anthéron, la rencontre entre ce jeune virtuose au sommet de son art et cette cheffe expérimentée fut simplement… phénoménale !

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