Un livre au titre explicite: Un poison nommé saumon, un sujet on ne peut plus débattu sur ce salmonidé qui s’apprête à être servi sur nos tables de fête. La France est le pays d’Europe qui consomme annuellement le plus de saumons. Bien sûr, il y a le saumon sauvage de l’Adour et de quelques autres fleuves, mais, par rapport il y un siècle, la production est symbolique et ne peut répondre à une demande exponentielle mais surtout elle est d’un coût qui n’est sans aucun rapport avec celui du saumon d’élevage que vous trouvez sur n’importe quel étal de poissonnier.

Dans son livre particulièrement bien documenté (même si parfois les chiffres donnés datent quelque peu, mais le lecteur ne se fait aucune illusion, ils doivent être encore plus alarmants! ), Maxime Carsel nous décrit l’horreur de l’élevage des saumons. Contrairement à d’autres, il ne développe que peu les risques pour la santé humaine que représente potentiellement la consommation importante de saumons (et d’autres poissons d’élevage).
L’auteur pointe la responsabilité des quelques grands groupes d’aquaculture (Mowi, Cermaq, SalMar et bien d’autres, norvégiens, suédois, américains, chiliens, etc.) dans le désastre écologique que représente cette production.
A partir d’exemples précis et d’une documentation tirée de rapports de nombreuses OMG et de groupes locaux de citoyens manifestant leur rejet de l’implantation de méga fermes aquacoles, l’auteur dénonce deux grands faits : la maltraitance animale qui cause une surmortalité des poissons, qui les rend sensibles à bien des épizooties et aussi aux poux de mer, qui, horreur, les mangent vivants. Sans compter, parfois, les agissements des hommes qui ont un comportement indigne.
Mais il y a surtout les conséquences écologiques et sur la chaîne alimentaire de cette production. En effet le milieu marin autour des fermes d’élevage est ravagé du fait des déjections des poissons, mais aussi à cause des produits de toutes sortes qui leur sont donnés dont des antibiotiques qui finissent, pour certains d’entre eux à se retrouver dans l’organisme des consommateurs. De plus, les traitements dits naturels (emploi de poissons « nettoyeurs »), ont aussi un impact fort sur l’équilibre des océans (je vous laisse découvrir la gabegie de ressources halieutiques que représente de tels traitements). En outre, les saumons sont nourris d’un mélange de céréales (dont du soja OGM) et surtout de farines de poissons. Et pour obtenir cette dernière, des bateaux usines sillonnent les mers et causent d’importants dommages au milieu naturel. Au-delà de la baisse quelque peu inquiétante du krill, cette pêche intensive a des conséquences dramatiques pour les populations de pêcheurs locaux comme au Brésil ou au Sénégal. Qui plus est, le plus grand risque est représenté par les saumons qui réussissent à s’échapper et qui arrivent à se reproduire avec des saumons sauvages au risque d’appauvrir leurs gênes et remettre en cause leur façon de vivre et d’évoluer.
Si certains pays comme la Mauritanie ou l’Argentine ont interdit les fermes d’élevage, d’autres comme le Chili, la Norvège ou l’Écosse, ne voient en elles que les revenus financiers qu’elles engendrent. Bien sûr, ces pays édictent des normes, plus ou moins contraignantes mais ne font que peu d’actions quand il y a des désastres dans les fermes, se contentant des excuses des propriétaires et de leurs promesses de prendre les mesures nécessaires pour y remédier.
L’auteur a quelques réflexions sur l’action plus qu’ambigüe de certains organismes ou certaines OMG comme à une certaine époque le WWF ou le Marine Stewardship Council qui octroie le label «pêche durable» à des pêches faites avec des chaluts de fond et les dragues qui détruisent tout simplement les fonds marins. Mais ce n’est pas que dans ce domaine que de tels organismes ou ONG ont eu des attitudes plus que critiquables… !
Face à une demande mondiale de plus en plus forte, et aux bénéfices exponentiels qu’elle engendre, la production industrielle de saumons a de beaux jours devant elle. À cet égard, et après la lecture de cet essai, toute personne ayant une même très légère conscience écologiste réduira (ou cessera) sa consommation de saumon, voire de poissons d’élevage tout simplement.
Un poison nommé saumon
Maxime Carsel
éditions du Rocher. 20€
Illustration de l’entête: Geographical/ © Corin Smith/Wildfish
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