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Enquête de l’INED progression du niveau de diplôme sur trois générations d’immigrés

par Communiqué

Progression du niveau de diplôme sur trois générations : un écart persiste pour les petits-enfants d’immigrés d’Afrique du Nord

Des trajectoires éducatives suivies sur trois générations

Grâce aux données représentatives de l’enquête TeO2 (Ined–Insee, 2019–2020), les chercheurs ont comparé le niveau d’études des grands-parents, parents et petits-enfants dans plus de 4 000 familles, avec ou sans ascendance migratoire résidant en France. Cette approche a peu d’équivalents dans le monde : la plupart des études ne portent que sur deux générations. Elle permet de mesurer la mobilité éducative sur le long terme et d’évaluer la capacité de la société française à réduire les écarts selon l’origine.

Un rattrapage éducatif massif mais inégal selon les origines

Les résultats montrent que, dans toutes les familles issues de l’immigration, le niveau d’études progresse nettement d’une génération à l’autre, en partie parce que la première génération partait d’un niveau de scolarisation très faible. Les petits-enfants d’immigrés du sud de l’Europe, dont 55 % des grands-parents n’avaient aucun diplôme (contre 23 % dans la population majoritaire), atteignent désormais des niveaux de diplôme comparables à ceux des descendants de familles sans ascendance migratoire, avec un accès massif à l’enseignement supérieur. Malgré une forte progression au fil des générations, les petits-enfants d’immigrés d’Afrique du Nord, dont 72 % des grands-parents étaient sans diplôme, demeurent moins diplômés que la population majoritaire (46% ont accédé à l’enseignement supérieur contre 55%).

L’étude montre aussi que les diplômes se transmettent moins bien d’une génération à l’autre parmi les familles d’ascendance nord-africaine : à origine sociale égale, les déclassements (lorsque les parents ou grands-parents sont diplômés mais que les enfants obtiennent un diplôme moins élevé) et les ascensions (l’inverse) sont plus fréquents que dans la population majoritaire. Elles connaissent donc une reproduction sociale moins forte, mais sans la connotation positive généralement attribuée à cette situation, puisque cela aboutit au final dans ce cas à un niveau d’éducation en moyenne plus faible. La littérature anglophone parle alors de perverse openness ou mobilité en trompe-l’œil.

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Des obstacles historiques et sociaux encore présents

Si cette étude ne traite pas des facteurs qui pourraient expliquer ces différences selon l’origine, de nombreux travaux existants portant sur les enfants d’immigrés ont mis en évidence une combinaison de facteurs historiques, de formes persistantes de ségrégation résidentielle et de discriminations qui touchent plus fortement les familles originaires du Maghreb que celles venues d’Europe du Sud. L’héritage colonial, certaines représentations sociales liées aux origines ou à la religion, ainsi que les inégalités territoriales continuent de freiner l’ascension éducative des petits-enfants d’immigrés nord-africains. Des études sociologiques antérieures ont en effet montré que les enfants d’immigrés d’Afrique du Nord  vivent plus souvent dans des quartiers défavorisés  (et cela  a tendance à se renforcer ) et  sont scolarisés dans des établissements ségrégés  où les conditions de scolarisation sont moins favorables à leur réussite. Des opérations de testing réalisées par des chercheurs ont aussi montré que porter un nom à consonance nord-africaine  diminue les chances  d’obtenir une réponse lors d’une demande d’information à un Master.

L’égalité des chances à l’épreuve

En France, où un tiers de la population est immigré, enfant d’au moins un parent immigré ou petit-enfant d’au moins un grand parent immigré, ces résultats interrogent la capacité du modèle républicain à garantir une réelle égalité des chances. Les auteurs soulignent que la lutte contre les inégalités scolaires demeure un enjeu central des politiques publiques, notamment pour prévenir la reproduction intergénérationnelle des désavantages liés aux origines.

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