Nous avons tous un jour ou l’autre eu l’occasion de voir et de découvrir dans un manuel, voire même très récemment dans WUKALI et oui ( Alexandre le Grand refait parler de lui Cliquer), la photo prise du visage d’Alexandre le grand tel il apparait dans la grande mosaïque de la Maison du Faune de Pompéi aujourd’hui exposée au Museo Archeologico Nazionale di Napoli (en italien dans le texte !).
Il y a ainsi dans l’histoire de l’art des rendez-vous d’évidence, des amours fidèles, des complicités durables et Pompéi est de tous ceux-là !
Alexandre, le Bel Alexandre, en a-t-il fait tourner des têtes, lui le séducteur, l’amoureux, le conquérant, et le souvenir de son épopée des terres grecques d’Europe jusques aux berges de l’Indus là-bas dans la mystérieuse et lointaine Asie, continue à émerveiller les générations qui se succèdent.
Cette grande mosaïque qui mesure 5,82 m sur 3,13 m, cadre compris, fait l’objet d’analyses et d’une restauration, l’occasion rêvée pour revenir sur son histoire.
Un transport bien chaotique
La mosaÏque qui représente le combat entre Alexandre le Grand, roi de Macédoine et Darius III, roi des Perses a été découverte en 1831 dans la maison du Faune et dont Chateaubriand qui l’avait visitée disait d’elle qu’elle semblait comme intacte et non touchée par les ans.
Ferdinand II, roi des Deux Siciles, avait alors pris conseil auprès du mosaïste romain, Vincenzo Raffaelli, directeur des « mosaïques du Vatican», afin de savoir s’il fallait ou non transporter ce chef d’oeuvre à Naples pour le mettre à l’abri et l’étudier. Les avis étaient contradictoires et les discussions passionnées, chacun y allait de sa théorie, du moindre maître maçon aux doctes personnalités toutes plus averties les unes que les autres, il va de soi ! Pompéi la silencieuse bruissait du tintamarre de leurs débats. Cette éminente personnalité, ce grand expert, bref cet homme de l’art, était alors « fermement convaincu que la mosaïque devait rester in situ, c’est là dire là-même où elle où avait été travaillée et était restée inchangée pendant tant de siècles ».
Le temps passa et le Roi Ferdinand II s’impatientait. Rafaelli en diplomate madré et prudent, suggéra alors que si transport il devait y avoir, alors serait-il plus sage de transporter la mosaïque en plusieurs tronçons afin d’en prendre le plus grand soin. Le Roi demanda à son architecte chargé des fouilles de Pompéi et qui s’appelait Pietro Bianchi, d’être très précautionneux, « de faire attention à ce que l’on fait, car ce monument n’était pas le nôtre, mais celui de l’Europe, et toute l’Europe doit avoir un compte-rendu de nos opérations ».
Tel il fut dit, tel il fut fait, et un caisson en bois aux dimensions de la mosaïque fut élaboré pour sa protection et son acheminement. Ainsi, le 16 novembre 1844, il fut alors décidé de la transporter à Naples jusqu’au Real Museo Borbonico, soit un parcours de près de 31km. Elle prit donc place pour ce voyage sur un chariot tiré par un attelage de 16 boeufs. Le voyage va durer 9 jours, on eût aimé voir la scène ! À Torre del Greco, peu avant Naples, un incident eu lieu et le caisson tomba à terre.
Le chargement précieux arrivé enfin à bon port à Naples, la mosaïque fut sortie de son emballage qu’en janvier suivant. Par bonheur, plus de peur que de mal, elle était intacte !
Hautes technologies et Histoire de l’art font bon ménage !
Près de deux-cent ans depuis la découverte, il est grand temps de scruter ce chef d’oeuvre unique composé de 2 millions de tesselles qui à la lumière des dernières recherches proviennent de carrières disséminées aux quatre coins de la Méditerranée.
Une étude juste publiée par PLOS (Public Library Of Science) fait un point d’étape sur l’avancement des travaux de recherche, source au demeurant de notre documentation scientifique.
Tout d’abord elle liste les différentes techniques non invasives utilisées : vidéomicroscopie, thermographie infrarouge (IRT), imagerie multispectrale, Fuorescence par rayon X portable, Spectroscopie infrarouge à transformée de Fourier (FTIR),Spectroscopie Raman. En outre, dix couleurs de tesselles ont été distinguées, et des hypothèses sur leurs provenances géologiques proposées.
Cette mosaïque de la bataille entre Darius et Alexandre est une reproduction que l’on peut dater entre la fin du IIe siècle av. J-C et le début du Ier siècle avant notre ère, d’une célèbre peinture hellénistique de 315av. J-C très probablement attribuée à Philoxène d’Érétrie. Elle utilise une technique bien connue des archéologues et nommée Opus vermiculatum, soit des cubes de toute petite taille et dont certains sont de l’ordre d’un millimètre, on pourrait croire à de la peinture! L’excellence du rendu et la perfection du savoir s’apparentent avec une décoration de type nilotique qui orne le sanctuaire de Fortuna Primigenia à Palestrina, près de Rome.
Les tesselles utilisées dans la Rome antique étaient principalement constituées de roches calcaires obtenues à partir de sources locales de pierres naturelles, auxquelles s’ajoutaient des briques, des tuiles et des poteries concassées, créant ainsi des nuances colorées à dominante noire, rouge, blanche, bleue et jaune, formant couramment des motifs polychromes.
Les analyses ont fait apparaitre une cire qui recouvrait l’ensemble de la mosaïque, un usage courant au demeurant au long des siècles
Les chercheurs ont établi des hypothèses quant aux origines minéralogiques et géographiques d’extraction
Les tesselles blanches pourraient provenir de carrières italiennes situées dans les Alpes, extraites d’un marbre le Marmor Lunensis proche de celui qui sera utilisé bien des siècles plus tard à Carrare.
Les tesselles rose-pâle sont associées au marbre Breccia Nuvolata, une origine aussi utilisée pour le temple de Leptis Magna en Libye.
Les tesselles de couleur rouge-intense font l’objet d’une controverse, soit elles proviennent du marbre Marmo Rosa du Portugal, soit de la même origine italienne et du marbre Breccia Appenninica du massif des Alpes apuennes au nord-ouest de la Toscane.
Deux hypothèses pour les tesselles jaunes dont certaines portent des linéaments noirs : un marbre Giallo di Siena d’origine italienne, ou alors Giallo Antico (Marmor Numidicum) que l’on a notamment extrait avant J-C en Afrique du nord et plus précisément en Tunisie au lieu de la moderne Chemtou.
Pour les tesselles d’autres couleurs et ne pas être trop disert, les chercheurs évoquent, la Sicile, la Grèce et notamment la Tunisie pour ses carbonates noirs de type Nero Antico.
Pompéi n’est pas prêt à assoupir notre curiosité, plus encore toutes ces découvertes la stimulent. Gageons que le Vésuve reste calme, nous avons tant à apprendre ! Je regarde encore la mosaïque, les lances annoncent déjà la Bataille de San Romano de Paolo Uccello, et les chevaux, le sublime étalon noir de droite en particulier, Géricault ou Delacroix ! La peinture vous dis-je !
Vous souhaitez réagir à cet article et nous contacter
Vous souhaiteriez publier dans WUKALI
➽ redaction@wukali.com
Vous pouvez nous soutenir sur les réseaux sociaux 😇, merci
Notre meilleure publicité C’EST VOUS !