A very special puss in boots !
Attention, je vous préviens, c ‘est du fort, c’est du lourd, c ‘est du très bon ! De quoi s’agit il ? Tout simplement d’un film d’animation russe ayant pour sujet le conte «Le Chat botté» de Charles Perrault. Enfin pas Charles Perrault tout à fait…, disons plutôt celui imaginé par le réalisateur Garri Iakovlevitch Bardine,( Гарри Яковлевич Бардин), marionnettiste de formation passé ensuite aux studios Soyouzmoultfilm.
Je sais, quand vous allez le voir, vous allez me dire à coup sûr : «Mais pourquoi mettez-vous un court-métrage , en russe, et pas sous-titré de surcroit ! Vous nous croyez à ce point polyglottes… !»
Certes, je conçois votre réaction ! Mais ne vous en faites pas, vous allez devenir très rapidement habile à comprendre les dialogues, en russe quand le jeune paysan qui s’appelle M. Karabasov dit «Russia» Россия où quand en français vous entendez : «Oulala, Pour commencer, Je vous en prie monsieur, Merde, Merci Madame, Commerce, Non-sens, C’est magnifique…» ! Quant à l’allemand, c’est encore plus simple puisque le personnage se définit comme « Ich bin Herr Kaput » !
Je ne m’attarderai pas davantage sur les qualités techniques et expressives des personnages en pâte à modeler au demeurant remarquables. Mais là n’est pas l’originalité de ce film.
La musique y contribue et c’est un véritable échantillonnage symphonique quelque peu réaménagé et guilleret, qui va du » Pont de la rivière Kwaï » à Bach et Mozart en passant par Donizetti etc…
Mais là n’est toujours pas de mon point de vue la raison principale.
Non, ce qui me plait dans ce film c ‘est tout à la fois cette ironie, cette caricature de Russe glaiseux attaché à sa terre et buveur invétéré de vodka comme une image de marque qui colle à sa peau. C’est au-delà de ce regard moqueur, sarcastique et détaché quelque peu voltairien, de cette Marseillaise cocasse, de ce récit qui procède du mythe et reconstruit à partir d’un conte de la littérature française, une métaphore de la situation de la Russie incapable de sortir de ses ornières, de s’affranchir et de conquérir la liberté du fait d’une vanité et d’un orgueil bouffi de nouveau riche qui la renvoie hélas à la glèbe et à la médiocrité dont elle s’était à peine émancipée. Détail non négligeable, ce film date de 1995, et la «pérestroïka» avait débuté en 1987 ! J’oublie peut-être l’essentiel, c ‘est cette liberté de ton, cette faconde qui séduit !
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Pierre-Alain Lévy
WUKALI 28/05/2016
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