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La Chronique littéraire d’Émile Cougut


Dans le cadre de sa collection Terres d’Amérique, les éditions Albin Michel viennent de publier Une fille bien de Holly Goddard Jones. Cette collection fait découvrir aux lecteurs français des jeunes auteurs américains qui montrent que la culture américaine est totalement différente que celle que veulent bien véhiculer les médias, surtout la télévision. Il est vrai qu’hélas Mac Donald et les séries américaines sont bien plus connus que la longue série des prix Nobel de littérature de Sinclair Lewis à Toni Morrison.

Dans cette nouvelle génération d’écrivain, Holly Goddard Jones mérite une place à part.

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Les huit nouvelles contenues dans une fille bien sont chacune de vrais diamants parfaitement taillés. En quelques phrases, tout un univers, cet univers Kentucky, s’offre à nous. Cet univers est la vraie Amérique, pas celle des côtes pacifiques ou de l’est, mais cette Amérique où le temps passe plus lentement qu’ailleurs, où les mêmes gestes se répètent inlassablement, où bien des personnes, surtout les jeunes, veulent partir vers un ailleurs qu’ils ont du mal à identifier sinon que ce n’est pas celui dans lequel ils vivent. Un univers où la violence est présente. Un univers où il vaut mieux être riche que pauvre. Un univers où la justice se fait à partir « d’arrangements », voire par l’application de la loi du talion.

Il y a du Simenon dans Holly Goddard Jones, avec cette sorte de fatalité qui pèse sur l’homme, fatalité qui a pour conséquence qu’il n’arrive que très difficilement à échapper à un destin qu’il subit et contre qui la révolte est presque impossible. Souvent, c’est un événement, souvent violent et dramatique comme un viol, comme un meurtre, qui va changer totalement la vie du personnage mais aussi de son entourage. Subir est devenir une victime, sans avoir rien fait si ce n’est d’être, vivre à un moment donné dans un endroit donné et faire une « mauvaise rencontre » ou connaitre celui ou celle qui fait cette « mauvaise rencontre ».

Pour autant, ces nouvelles ne sont pas empreintes de nostalgie et encore moins de pessimisme. Elles sont pleines d’une vraie lucidité de ce qu’est la vie des « gens ordinaires ». Il n’y a pas de héros et encore moins de surhommes chez Holly Goddard Jones, mais que le voisin ou la voisine que nous fréquentons quotidiennement, mais eux ont connu une rupture dans le cours de leur vie, rupture bien plus violente que celles que nous connaissons dans la nôtre.

Ces nouvelles ne laissent pas le lecteur indifférent, elles lui amènent des pistes de réflexions sur la nature humaine, sur la vie, sur le décalage qu’il y a entre ce qu’il veut faire et la réalité, entre ses rêves et ce qu’ils deviennent dans le temps, dans leur réalisation.

Une fille bien est une nouvelle pierre à l’édifice de la comédie humaine.

Emile Cougut


Une fille bien

Holly Goddard Jones

Éditions Albin Michel. 22,50€


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