A heavyhearted novel written in a very clear and poetic French language.
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La Chronique littéraire d’ÉMILE COUGUT
. Une histoire courte, du moins dans sa durée : elle ne se déroule que sur trois jours. Mais une histoire forte, remplies d’émotions, des doutes, du mal être, du mal vivre de l’héroïne. On ne connait pas le prénom de la jeune fille, tout au plus son surnom qui donne le titre à ce roman : «Muette». Muette, car elle ne parle pas, elle se comporte comme une autiste, se replie dans son monde, car l’univers dans lequel elle se trouve non seulement ne lui correspond pas, mais en plus ne fait que l’agresser, du moins de son point de vue : les garçons de son âge, elle le sait bien ne sont que des menteurs, des manipulateurs qui ne s’intéressent pas à elle malgré leurs déclarations mais à son corps, et surtout sa famille : un père qui ne travaille à la ferme et n’a pour seuls loisirs que la vitesse en voiture et la télévision, et une mère qui, le lecteur le comprend vite est en souffrance : elle a eu sa fille alors qu’elle était mineur et passe son temps à gérer la bonne marche de la maison. Muette se sent exclue de ce cadre familial, de n’avoir pas été désirée, de n’avoir jamais eu d’amour, sauf peut-être une fois, de la part de ses parents. Le pire, c’est qu’elle ressemble de plus en plus à cette mère en grandissant, cette mère qu’elle perçoit comme une vraie sorcière digne de Blanche Neige. Cette mère qui la rejette, qui représente l’interdit, qui n’est jamais là quand on a besoin d’elle, qui ne l’aide pas à grandir, ne la conseille pas alors que son corps se transforme en femme. Alors, Muette part. Pas loin, dans une grange désaffectée près de la ferme familiale, grange où elle jouait toute seule durant son enfance. Elle y est seule, mais cette solitude ne lui pèse en rien. Mais elle est dérangée par les bêtes et les insectes et elle s’aperçoit vite que la nature peut être agressive et dangereuse. La structure de ce roman, un mélange de faits, de souvenirs, de la voix de ses parents qu’elle entend tout le temps est particulièrement précise, servie par un style dépouillé et clair. On trouve dans «Muette», tout le mal être, les inquiétudes, les questionnements de l’adolescence, ce sentiment de rejets, cette soif de liberté, cette volonté d’oublier tous les mauvais souvenirs qui minent alors que les bons sont oubliés. « Le vert paradis des amours enfantines » cher à Baudelaire est bien loin, s’il a jamais existé. Tout le roman est bâti autour de ces quelques journées autour du point de vue de Muette, celui de ses parents est totalement absent ce qui n’enlève en rien à la force de ce qui n’est, de fait que le long monologue d’une jeune fille en proie aux tourments de l’adolescence. Emile Cougut Muette Eric Pessan Éditions Albin Michel. 16,50€ Sortie librairie 22 août
Une histoire simple : une jeune fille de 16, 17 ans, fait une fugue.