Reconstruction of a child abused, revenge ?
Steinunn Sigurdardottir est une femme écrivain islandaise, ayant habité en France et résidant actuellement en Allemagne. C’est d’ailleurs dans cette dernière ville que se déroule son dernier roman : Yo-yo.
Le héros, Martin Montag est radiothérapeute. Un jour, il reçoit un patient qui a une tumeur ayant la forme d’un yo-yo, rouge vif, comme celui qui a détruit sa vie alors qu’il était enfant, comme celui qui l’a fait l’homme qu’il est devenu : un robot comme il se plait à se décrire, une apparence d’homme. Un homme amoureux de sa femme, un homme passionné par son métier, par la course à pied, un homme fidèle en amitié, mais un homme détruit, vivant en apparence, mais mort en lui-même. Mais un homme qui ne veut pas d’enfant, qui est victime de « pédophobie » (peur des enfants) et qui s’avoue: « Il n’y a aucune garantie que je puisse garder et protéger suffisamment mon enfant des cannibales et des pirates : c’est pourquoi mon enfant est plus en sûreté en n’étant pas né, pour toujours ».
Ce court roman est essentiellement bâti sur son histoire avec Pétra, sa femme, et sur son amitié avec Martin Martinetti, un clochard français qu’il a sauvé d’un cancer des testicules. Un être improbable, malheureux, brisé, qui se suicide consciencieusement mais qui se transforme grâce à l’amour d’une soigneuse d’animaux du zoo de Berlin.
Le fil conducteur du roman est le dilemme qui mine Martin Montag car son patient n’est autre que l’homme qui l’a attiré dans un garage avec un yo-yo rouge pour le violer, pour le détruire comme, Martin va s’en rendre compte, il avait aussi poussé sa fille à la folie et son fils au suicide. Cet homme qu’il s’était promis de tuer alors qu’il n’était qu’un enfant. Doit-il accomplir sa vengeance ? Doit-il respecter son serment et le guérir ? Pour sortir de cette impasse, le plus simple n’est-il pas de retrouver les êtres chers qui l’ont aidé en les rejoignant au cimetière ?
Yo-yo est un livre dérangeant, angoissant mais teinté d’humour. Cet atmosphère lourde, pesante est accrue par un véritable refrain : le petit garçon qui rentre chez lui en traversant un parc et qui rencontre un homme lui offrant un yo-yo. Cette scène qui revient cycliquement, ce moment qui a détruit l’enfant et l’homme qu’il est devenu, ramène le lecteur à l’horreur que vivent les victimes des pédophiles.
Steinunn Sigurdardottir sait parfaitement changer de style : les passages sur l’enfance de Martin Montag sont écrits comme si c’est l’enfant qui tient la plume. Elle sait brillamment passer du « Je » au « Il » dans le même paragraphe, ce qui fait que le lecteur est emporté dans cette sorte de dédoublement qui caractérise le héros.
Yo-yo est une approche originale des ravages de la pédophilie perçues par une victime.
Emile COUGUT
Yo-yo
Steinunn Sigurdardottir
Éditions Héloïse d’Ormesson. 17 euros
parution le 31 octobre.