A good thriller, in the vicinity of secret services end terrorism


La chronique littéraire d’Émile COUGUT.


Il y a des amateurs de thrillers, romans d’espionnage et autres ouvrages de ce genre, mêlant enquête policière, services secrets, le tout plus ou moins liés à l’actualité, aux grands problèmes que l’univers connait à un moment donné de son histoire. Il y a eu les James Bond, les S.A.S., les romans de John Le Carré et je passe sur les OSS117 et autres Coplan qui sont quelque peu datés. Je laisse à chacun le soin de compléter cette liste avec leur auteur préféré. La liste est longue, le genre a eu de beaux jours dans les années 60/80, surtout grâce à la guerre froide. Les rayons des librairies en sont encore couverts.

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Tous ces romans sont loin d’être « bons », le plus souvent écrits en vitesse, le plus souvent emprunts d’un grand manichéisme, le plus souvent caricaturaux par rapport à la réalité (reproche que l’on ne peut faire aux romans de feu Gérard de Villiers, mais il y a d’autres reproches à leur faire). Au fil des temps apparaissent de plus en plus de « sensualité » (pour ne pas dire de sexe) et de plus en plus de descriptions qui fleurent bons les fantasmes sadiques de l’auteur.

En ce qui concerne le sexe, le lecteur des « Chiens enragés » restera sur sa faim, tout au plus y trouvera-t-il une allusion un peu appuyée à une « tournante ». Pour le côté sadique, par contre, on y trouve notre compte, quelques bonnes descriptions d’égorgements suivi de décapitations, sans compter le célèbre « Babylis » allumé dans un vagin. En soit rien de très original (tant en ce qui concerne les têtes coupés que l’instrument de capilliculture transformé en engin de torture), mais les descriptions sont précises, pour ne pas dire parfois, en faisant un assez mauvais jeu de mots, chirurgicales.

Toutes les ficelles de ce genre de roman se retrouvent dans les « Chiens enragés » : les services secrets, les « taupes », les fanatiques religieux (musulmans en la circonstance),la drogue qui sert à financer le terrorisme, les victimes innocentes sacrifiées au nom de la raison d’Etat, le journaliste intègre qui fait de la vraie investigation (ce qui est de plus en plus rare voire même en l’affaire assez irréaliste car le journaliste travaille au Courrier Picard et le moindre que l’on puisse dire, quand on a été un lecteur assidu de ce journal, c’est que les « grands reporters » qui peuvent se permettre de partir des semaines durant en reportage sur des théâtre de guerre ou en « immersion » sont si rares qu’ils sont inexistants…), la misère des cités de banlieues, les agents doubles à tous les niveaux, le cynisme des décideurs. Tout y est pour un résultat plus qu’acceptable.

Bien sûr il y a des éléments caricaturaux qui frisent le manichéisme de bon aloi reflétant les lieux communs (souvent distillés par les médias) faisant le terreau de l’intolérance qui monte dans notre société. C’est le cas, par exemple, dans la description des cités, de la façon de vivre de leurs habitants, ou de l’emprise de l’islam plus que radical en ces lieux. Bien sûr il y des erreurs ou du moins des positions, des situations qui n’ont rien à voir avec la réalité : la cellule renseignement de la Gendarmerie nationale actionnée pour faire des études sur l’islam dans les banlieues est plus qu’une vue de l’esprit, non seulement ce genre d’étude ne fait pas partie des missions de la gendarmerie, mais surtout, ces fameuses banlieues sont en « zone police », c’est-à-dire en des lieux où les gendarmes n’interviennent pas. Et que dire d’un major, toujours gendarme, d’une brigade territoriale, qui travaille avant tout pour les services secrets français et à un tel niveau qu’il peut fournir des informations sensibles aux américains. La gendarmerie nationale dispose d’un excellent service de relation publique que Marc Charuel, de par son métier de grand reporter doit bien connaitre, mais il montre qu’il a une faible connaissance de l’articulation des services de police et des militaires dans la lutte contre les extrémismes et dans la répartition des missions entre eux sur le territoire national. Par contre, il a une très bonne connaissance sur le terrorisme afghan, sur le réseau Al Kaïda, sur les luttes d’influence entre les services secrets.

Sylvain Verdier travaillait pour la DGSE. Cadre dans une entreprise, pour offrir une vie de luxe à sa famille, il communique des éléments confidentiels à ce service. Après son licenciement, il entre dans une bande de trafiquants de drogue, dont l’argent tiré du trafic sert à financer le terrorisme. Il se convertit à l’islam et suit les salafistes. Arrêté, il est condamné à 15 ans de prison, sort au bout de dix, en 2011, dix ans après les attentats contre les tours jumelles de New York, juste après l’élimination de Ben Laden par les américains. De fait depuis des années il n’a plus aucun contact avec les services secrets français, et il se trouve obliger d’exécuter les ordres d’un réseau terroriste lié à El Kaïda qui doit mettre en œuvre le testament de Ben Laden an France. S’ensuit toute une série de massacres, de trahisons, de manipulations.

Un bon roman, bien écrit se lisant facilement, auprès duquel le lecteur passe un bon moment quand il surmonte les quelques approximations s’y trouvant. Mais c’est un roman, pas un essai, pas une étude sur les problèmes liés aux banlieues, aux services secrets ou au terrorisme islamique.
Emile Cougut


Chiens enragés

Marc Charuel

Éditions Albin Michel. 22€


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