Who was Francesco di Assisi ?
La chronique de François DELMAS.
A l’occasion du premier anniversaire de l’élection du Pape François, les éditions Flammarion, viennent de publier une courte biographie de Saint François d’Assise écrit par Jacques Duquesne et préfacée par le regretté Jacques Le Goff qui vient juste de disparaître.
La vie de François est exceptionnelle à bien des égards, mais Jacques Duquesne la remet dans le contexte de l’époque, ce XIII siècle qui est un tournant important dans l’évolution des sociétés occidentales et de la catholicité.
François, fils de bonne famille, né dans une famille de drapier, c’est-à-dire de ces commerçants dont l’importance économique ne fait que s’agrandir et qui commencent à avoir des velléités politiques voulant s’affranchir des liens féodaux, ceux qui les lient aux nobles comme ceux qui les lient à l’église. C’est l’époque où en Italie apparaissent les fondements de ces « »républiques » au sein des cités. Il y avait déjà Venise, mais aussi Gènes, Pise et encore plus Florence où l’on voit les plus riches des marchands prendre le pouvoir au coeur de leurs cités. Plus près de nous, c’est l’époque de la république messine.
François est un jeune homme de son époque, de son milieu social, il vit dans opulence et l’insouciance de la jeunesse dorée d’Assise, plutôt belliqueux à l’égard des Pérugiens voisins, et il est même fait prisonnier par eux lors d’une escarmouche. François se convertit brusquement après avoir été au contact des pauvres. On raconte aussi qu’une rencontre avec un lépreux, dont il baisa la main, fut déterminante : « Quand j’étais encore dans les péchés, la vue des lépreux m’était insupportable, mais le Seigneur lui-même me conduisit parmi eux et je les soignai avec compassion. Et quand je les quittai, ce qui m’avait semblé amer s’était changé pour moi en douceur, pour l’esprit et pour le corps. »
François décida alors de se séparer de toute richesse, indigné par la pauvreté. Il renonce solennellement à l’héritage paternel en se déshabillant sur le parvis de la cathédrale ! Rapidement, quelques personnes le rejoignent et constituèrent la première forme de la « fraternitas ». Dès lors, l’essor sera constant, le nombre de frère augmentant de manière significative – ils étaient plusieurs milliers à la mort de saint François – ce qui ne manqua pas de poser des problèmes d’organisation et de fidélité aux engagements voulus par saint François. Vivre la radicalité de l’Évangile n’était pas chose facile et François lui-même se désespéra un peu de voir que l’exigence qui était la sienne ne fut pas tenue avec autant de force par ses disciples. Il souffrit, de son vivant, de voir les préceptes qu’il défendait, être détournés, contournés, voire occultés.
François, apôtre de la paix, partit avec la cinquième croisade et se retrouva à Damiette. Mais ce qu’il vit de ces croisades guerrières le rendit hostile à ces épopées. C’est là néanmoins qu’il aurait rencontra le sultan Al-Kamil qu’il aurait essayé de convertir.
De retour en Italie, François connait de nombreuses déceptions. Mais il finit par accepter certaines déviations par rapport à la règle initiale. On citera par exemple la possession de livres, coûteux à l’époque et donc signe de richesse et de pouvoir. Autrement plus forte est la déception devant la 3e règle validée et acceptée par le Pape Honorius III.. Règle toujours en vigueur, pré-rédigée par François, mais largement expurgée de certains éléments que la Curie ne voulait pas trop mettre en avant.
François fut, semble-t-il, tenté de quitter l’Église. Mais son attachement profond à l’unité de l’Eglise, son attachement aux sacrements, surtout à l’Eucharistie, l’inciteront à ne pas rompre avec l’église. De plus, à cette époque, se mettre en marge de l’église c’était tomber dans l’hérésie, or, l’occident était parcouru par de multiples mouvements considérés comme hérétique, le catharisme n’en étant qu’un parmi d’autres. Martin Luther fit quelques siècles après le pas que François se refusa toujours de faire.
Il se mettra alors en retrait, reçut alors les stigmates du Christ (se furent les premiers stigmates à être reconnus l’église). Il décédera en 1226 de maladie, de privations.
Déjà considéré comme saint de son vivant, il sera canonisé deux ans après. Sa figure tutélaire sera immédiatement récupérée par la papauté, quitte à déformer, trahir le message de François. Lui qui voulait être inhumé dans son lieu de méditation, le fut à Assise. Lui qui ne voulait prier que dans des églises pauvres, sans décors se retrouve dans une des plus belles basiliques construites à son époque. Son testament, les premières « vitae » ont été détruites et ce n’est qu’au XIX siècle que ces textes furent redécouverts. Grâce à eux, l’image de François apparait quelque peu différente de l’icône qu’en a fait l’église. Il ne parlait pas qu’aux animaux, il voulait vivre suivant les préceptes des évangiles, dans une totale pauvreté, ce qui heurtait le clergé et son mode de vie.
Si l’influence de saint François sur le XIIIe siècle fut majeure, comme le montre J. Duquesne il est aussi un saint de notre temps. Le pape François est un jésuite, mais surtout un prélat qui a vécu au contact d’une population déshéritée, victime de l’égoïsme des détenteurs de richesses qui ne veulent surtout pas les partager, l’Argentine étant avec le Guatemala un des pays où l’écart entre les très riches et une majorité très pauvre, victime entre autres choses de crises économiques causées par une spéculation sans règles ni morale, est un des plus important au monde. En prenant ce prénom pour la première fois de l’histoire plurimillénaire de la papauté, il a voulu le montrer que la figure de saint François est toujours, hélas d’actualité, et que l’Eglise doit montrer la primauté des valeurs évangéliques, et se défaire de trop d’apparat et de fioritures dans lesquels certains « Princes de l’église »continuent de se complaire.
Ce livre comprend une belle et exhaustive iconographie permettant d’appréhender les différentes représentations de François, au cours des différentes étapes de sa vie, dont bien sur les célèbres fresques de Giotto dans la basilique d’Assise.
En quelques 80 pages, dans une pagination aérée, le livre de Jacques Duquesne vous donnera un bel aperçu de la vie de saint François. Son livre se termine opportunément par quelques prières de saint François dans un chapitre intitulé « Cantique du Frère Soleil et autres poésies ».
Félix Delmas
(08/06/2014)
Saint François
Jacques Duquesne
éditions Flammarion 22€