Origins of contemporary Islamist terror


Après les attentats islamistes de Paris, retour sur les origines de cette mouvance fanatique et assassine. Immense est le corpus de l’Islam – et l’on y peut trouver quasiment tout… et son contraire ! Ainsi l’islamisme radical a-t-il à sa disposition quelques textes sacrés fort incitatifs : « Tuez tous les mécréants, où que vous les rencontriez » (Coran, sourate 2, verset 191), « Ce n’est pas vous qui les avez tués, c’est Allah ! » (Coran, sourate 8, verset 17)… Reconnaissons toutefois que, pour inciter à la violence, l’Ancien Testament n’a rien à envier au Coran : il n’est que d’entendre nos évangélistes étasuniens retrouver aujourd’hui les saints accents de l’Inquisition.

L’exégèse du Coran était, jusqu’à présent, réservé aux oulémas – hommes sages et lettrés… Or il est malheureusement évident qu’Al-Qaïda a fait un hold-up sur son interprétation – s’inspirant, en cela, de la pensée de deux théologiens : le Palestinien Abdallah Azam et l’Égyptien Sayed al-Qutb. Mais qui étaient ces personnages ?

• À la différence de Ben Laden, d’al-Zawahiri et d’al-Zarqaoui [tous trois autodidactes au plan religieux], le Palestinien Abdallah Azam aura longuement étudié la Charia à l’université. Et d’affirmer que le jihad est l’affaire de tout musulman, lequel se doit de prendre les armes contre les mécréants ou, du moins, de financer la cause…

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• Mais il y eut surtout Sayed al-Qutb, radical Frère musulman, dont le monumental « À l’ombre du Coran » demeure, encore aujourd’hui, le texte-phare du jihadisme.

Al-Qaida et ses « franchisés »

Mouvement de mystique politique, al-Qaïda [i.e. Front islamique du jihad contre les juifs et les croisés] a été fondé, en février 1998, par le Saoudien Oussama Ben Laden et son inspirateur, le chirurgien égyptien Ayman al-Zawahiri.

Voici ce qu’ils écrivaient, dans leur texte liminaire : « Nous appelons chaque musulman à tuer les Américains, et à piller leurs richesses – où que ce soit, et dès que possible ! ». Autre sainte exhortation : « On peut toujours suivre dans la rue un Américain, et le tuer, puis brûler sa maison ». Pour ces deux fondateurs, l’Amérique était, en effet, la cible privilégiée, le terminus ad quem de la violence. Mais ce face-à-face haineux s’est bientôt élargi à tout l’Occident : Jihâd vs McWorld fut ainsi édicté – précisant qu’il faut tuer tous les kuffar [Kuffar signifiant « impies » et désignant aussi bien les juifs (« sionistes »), les chrétiens (« croisés »), les hindous (« polythéistes ») que les traîtres (« Chiites »).]

Al-Qaïda est désormais un label, un drapeau, une idéologie qui, jour après jour, se régénère – via notamment certaines chaînes de télévision [al-Jezira et, surtout, al-Manar – station fort écoutée, bien qu’interdite], via vidéocassettes ou DVDs, et les nombreux sites Web qui diffusent quotidiennement, en arabe & en anglais, l’Encyclopédie du Djihâd, manuel attribué à Al-Qaïda [voir: www.andreversailleediteur.com/upload/args/manuelterroristeextraits.pdf].

Son principal objectif étant de motiver les masses par des attentats spectaculaires – préemballés pour la télé -, de galvaniser les musulmans en terrorisant l’ennemi… Selon deux modalités : provoquer la stupeur par un acte inimaginable – tel qu’à New York, le 11 septembre 2001, ou à Paris, le 7 janvier 2015 – et demeurer si possible insaisissable, grâce à l’ubiquité des actions, voire le sacrifice des exécutants. Actions naturellement assorties d’un vocabulaire tiers-mondiste attrape-tout – visant à s’attirer les faveurs des laissés-pour-compte de nos sociétés…

Mais il est, à côté d’al-Qaïda, d’autres non moins explosives nébuleuses…

Ainsi de la Jemaah Islamiyah qui « franchise » à tout va en Indonésie, en Malaisie, à Singapour, dans les Philippines ou en Thaïlande du Sud (elle s’illustra notamment à Bali et à Jakarta) ou du nigérian Boko Haram, auteur de l’enlèvement des 237 lycéennes de Chibok…

Ainsi également du nouvel AQMI « Al-Qaïda au Maghreb islamique » qui, reprochant à la France d’avoir laïcisé le Maghreb, combat l’intégration des musulmans dans la société française – intégration considérée comme une trahison, une insulte aux souffrances de la Oumma, mythique communauté de l’Islam.

Et que dire – en Syrie, aujourd’hui – de l’atroce Daesh, organisation autoproclamée « État islamique »… Triste ironie de l’Histoire : « Partant pour la Syrie » fut l’hymne national français sous le Second Empire !

Je n’aurais garde, bien sûr, d’oublier les Frères musulmans, confrérie qui demeure populaire grâce aux hôpitaux et universités qu’elle subventionne. Il y a également le Hamas palestinien, et les pakistanaises Armée de Mahomet [Khuddam-ul Islam] & Armée des Purs [Lashkar-e-Taiba] – formations prétendument dissoutes…

Toutes nébuleuses qui n’entendent rien négocier, ni d’ailleurs obtenir – sinon une utopique régression vers ce mythique paradis de l’Islam où règne la Charia. Loi islamique qui correspond – à peu de chose près – aux règles sociales de l’Arabie saoudite du VIIe siècle…

• Rêve d’une théocratie panislamique où seraient confondus public & privé, religieux et profane, où ce qui appartenait à César ne lui appartiendrait plus…

• Rêve d’une théocratie conduite par des « parfaits » [les djihâdistes se considèrent comme tels], possédant le permis de tuer juifs, croisés et mauvais musulmans [parmi lesquels sont naturellement rangés les Chiites, nommés « demi-juifs »].

• Rêve d’une théocratie où la culture n’a aucune part… Si, en effet, les islamistes n’ont aucun goût pour l’avenir, ils n’en ont pas davantage pour le passé… Ne rejettent-ils pas leur propre héritage culturel, notamment l’archéologie ? [Souvenons-vous de la décision du mollah Omar, chef suprême des talibans, de détruire toute la statuaire afghane – notamment les trois bouddhas géants de Bâmiyân.] Pour de tels intégristes, il n’est de transmission licite que cultuelle, de tradition que du Livre.

Aussi est-il indispensable de bien faire ici le départ entre ces visées salafistes de reconstitution d’un califat de type moyenâgeux, et celles de jeunes banlieusards endoctrinés – notamment via Internet – pour lutter contre l’injustice politique ou sociale faite aux musulmans [en Tchétchénie, Irak, Palestine, Afghanistan, Syrie… et dans leurs propres cités]. Si, pour ces jeunes gens, l’idéologie vient de l’extérieur, leurs motivations peuvent être locales [ainsi a-t-on pu parler, non de globalisation, mais de « glocalisation » – constituée de solidarités au sein de microcellules]. Ces « petites mains » du terrorisme étant ordinairement recrutées parmi les déshérités – petits délinquants aisément endoctrinables, heureux de se découvrir une importance sociale… Avec néanmoins – omniprésent – un fort sentiment d’humiliation…

Voici, d’ailleurs, la traduction de deux textes découverts sur Internet, sous la rubrique : The Why of Suicide Bombing :

• du Dr Jessica Stern, de Harvard : « Il y a de nombreux motifs différents à leurs suicides, mais ils ont un point commun : ils se sentaient tous humiliés et disaient être contraints à une position inférieure ».

• de Hany Abu-Assad, auteur du film Paradise Now : « Le motif le plus fort est un sentiment d’impuissance. Vous êtes prisonnier dans votre propre cité, vous ne pouvez rien y faire, vous n’êtes rien… En s’attaquant à la société, les Suicide Bombers se transforment en gagnants. Mais la religion n’est plus dès lors, pour eux, qu’une mise en scène, qu’une liturgie ».

Sentiment d’humiliation donc, mais parfois mâtiné de romantisme… Alors que, naguère, les gauchistes voulaient « la révolution pour la révolution » [on allait d’abord à Cuba, puis on intégrait Action directe ou les Brigades rouges], nos nouveaux romantiques proclament maintenant urbi et orbi, via Internet, « le jihad pour le jihad », et sa violence systémique. Autrement dit : « Les moyens justifiant les moyens »…

Ce radicalisme n’est plus, dès lors, qu’un réceptacle de toutes les révoltes – aimable alibi pour justifier nombre de passions destructrices : « Non pas changer le monde, mais le détruire ! » Et ce, au moyen de tous les outils disponibles – fussent-ils virus informatiques ou logiciels malveillants. Dans l’attente – non totalement improbable, désormais – de virus plus décisifs !

Mais cela s’appellerait-il encore… « l’aurore » ?

Francis B. Cousté.


WUKALI 09/01/2015


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