A subtle novel with heroes evolving between prisons and high hat society
Avec Pascal Martin nous allons du monde des malfrats et autres caïds des prisons à la Bourse ou au monde sophistiqué et snob des bling-bling.
Le titre de ce livre résume parfaitement le début de ce roman : Victor Corbus, un soir perd patience après avoir fait son plein d’essence et se retrouve dans la plus grande prison d’Europe : Fleury Mérogis. Rien ne le préparait aux conditions de vie qu’il allait connaître. Jeune trader, issu d’une famille très aisée de Neuilly, étouffé par son père banquier à qui il reproche le suicide d’une de ses sœurs aînées, propriétaire d’un grand appartement tapissé de marbre dans le XVIème arrondissement, d’une villa à Deauville, d’un chalet à Chamonix, amant dune femme splendide, grand consommateur de whisky et de coke, etc., il n’est pas pour autant totalement « bling-bling ». Depuis son enfance, il se réfugie dans ses rêves et a créé un personnage de fiction, Jack Wallace à qui il voudrait ressembler et dont il écrit les aventures dans des romans policiers à succès.
Victor tombe dans un monde de violence, de trafics, dirigé par un caïd qui a tous les droits : Sid Juvenal. Les gardiens de prison, leur chef en tête le laisse agir, car c’est de fait lui qui fait régner l’ordre dans l’établissement. Notre héros se voit proposer un marché dés le lendemain de son incarcération par le chef de détention : il va bénéficier de leur protection et d’un certain bien être (meilleurs repas, prostituée, coke, whisky, etc.) à condition qu’il fasse fructifier en bourse leur pécule de 31 000 euros. Or nous sommes en pleine crise boursière, ce qui est difficile, et qui plus est il a plus l’habitude de manier des dizaines de millions et non une somme aussi insignifiante pour les marchés boursiers. Mais il finit par avoir un renseignement qui va lui permettre de faire plus de 60 % de bénéfice en moins d’une journée.
Or il a fait la même spéculation pour le caïd avec des sommes autrement plus conséquentes ce qui provoque une enquête pour délit d’initié. Son régime de faveur va disparaître et il va se trouver plonger dans cette violence qu’il ne faisait que percevoir. Grâce à son avocat, un juif arabe qui est loin d’être un ténor du barreau, il va sortir de cet enfer complètement ruiné mais totalement transformé.
Du danger de perdre patience en faisant son plein d’essence, nous fait entrevoir la vie dans une maison d’arrêt avec ses codes et surtout ses trafics, sa violence. Le rôle des gardiens est très ambigu, au mieux ils « ferment les yeux », au pire ils participent à cet état de fait. Mais ils y sont obligés car vouloir être trop stricts a toujours pour conséquence une augmentation de la violence, le risque de mutineries qui se retournent contre eux.
Bien sûr, en lisant le roman de Pascal Martin, Du danger de perdre patience en faisant son plein d’essence, nous pensons tout de suite au « Bûcher des vanités » de Tom Wolf, la base est la même : un jeune riche se retrouve en prison après un délit de fuite. Mais le message que les deux auteurs veulent faire passer n’est pas le même et les systèmes pénitentiaires et judiciaires entre la France et les États Unis d’Amérique sont très différents.
Le style de Pascal Martin est clair, alerte ce qui lui permet de décrire cet univers carcéral et la vacuité de la vie de certaines personnes vivant dans un monde totalement artificiel qui fait qu’à la moindre anicroche ils deviennent des êtres faibles et totalement inaptes à survivre.
Émile Cougut
Du danger de perdre patience en faisant son plein d’essence
Pascal Martin
Éditions Robert Laffont. 18€
WUKALI 23/02/2015