The complete history of Brasil


Michel Faure est journaliste, un journaliste qui fut grand reporter et qui a couvert à ce titre durant de nombreuses années l’actualité de l’Amérique latine. Et, c’est normal, il ne peut s’empêcher d’oublier son ancien métier, ce qui peut paraitre bizarre pour ne pas dire inattendu dans un livre d’histoire. C’est parfois un peu déroutant, pour ne pas dire énervant quand il «se» met en scène . Dans ce genre on ne se met pas en avant. Michelet dans son « Histoire de France », même dans la dernière partie, ne dit jamais « je ». Il faut être reconnaître cependant que Michel Faure quand il se met en avant ne parle que des personnes qu’il a rencontrées dans son cadre professionnel et, c’est tout à son honneur, il ne porte aucune appréciation, il s’efforce, avec succès, de rester le plus objectif possible, de ne porter aucun jugement. C’est ce que l’on attend du travail d’un historien, même si l’objectivité est impossible jusqu’au niveau historique. Le moins que l’on puisse dire c’est qu’un Michelet ou un Lavisse n’étaient pas d’une parfaite objectivité non plus. Mais le « factuel » était correct, le manque d’objectivité se situant dans la façon de présenter ce « factuel ».

A ce niveau, Michel Faure fait travail d’historien, et il le fait parfaitement bien !
Il retrace toute l’histoire du Brésil en nous donnant les éléments nécessaires à la compréhension des complexités de cette société. Il relate toute cette période commencée le 23 mars 1500 quand l’expédition portugaise dirigée par Pedro Alvares Cabral « découvre » le Brésil, à la présidence de Dilma Roussef, l’actuelle présidente de la République.

Le premier contact avec les indigènes font penser aux Portugais qu’ils étaient aux portes du Paradis tant l’accueil qu’ils reçurent des autochtones fut radieux. Mais trente ans après quand la colonisation commença, ils déchantèrent vite. En outre ils rencontrèrent des tribus cannibales (dont la victime la plus célèbre fut le premier évêque du Brésil Pedro Fernandes Sardhina), les indiens se révoltèrent refusant non le catholicisme mais l’esclavage. En plus les Portugais se heurtèrent aux velléités françaises de s’implanter au Brésil (la France antarctique et la France équinoxiale) et surtout hollandaise avec Johan Mauritius van Nassau qui au début du XVII siècle a créé à Pernambouc une colonie « humaniste » (avec par exemple l’érection de la première synagogue de tout le continent). Mais les Portugais surent garder ce vaste territoire dont au début ils ne connaissaient pas limites, d’où toutes les expéditions, dignes des meilleurs histoires du Far West, souvent entreprises par les « bandeirantes  » groupes d’individus, souvent métis, partant vers l’ouest pour faire fortune.|left>

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Une des particularités du Brésil c’est qu’il fut exploité avant tout comme une colonie, c’est-à-dire juste bon à donner des matières premières à la métropole portugaise : le sucre puis le café et surtout l’or et, plus tard, les pierres précieuses. Pour faire tourner cette économie, il fallait beaucoup de main d’œuvre, et, le moins que l’on puisse constater, c’est que les colons blancs volontaires furent très peu nombreux, d’’où le recours massif à l’esclavage des Africains. En trois siècles, se sont entre 3 ou 5 millions de personnes qui ont été ainsi déportées. Le Brésil fut le dernier pays d’Amérique à abolir l’esclavage en 1888 (la loi d’Or), un des derniers actes voulus par l’empereur Pierre II. Ce n’est que vers la fin du XIXè siècle que pour « contrebalancer » le poids numérique des noirs que l’immigration venant de l’Europe se développera rapidement.

Le Brésil est le seul pays des Amériques qui a connu une royauté. Un peu par hasard. Quand les Français entrèrent à Lisbonne en 1807, le régent puis roi Jean VI s’enfuit au Brésil. Obligé de repartir au Portugal. Il laisse son fils Pierre comme régent et ce dernier, poussé par les circonstances et les révoltes endémiques du pays, finit par déclarer l’indépendance du pays et se fait couronner empereur du Brésil le 12 octobre 1821, son père étant roi du Brésil. Contraint à abdiquer, son fils monte sur le trône avant d’en être chassé par un coup d’état en 1888. Le second et dernier roi du Portugal a été inhumé au Père Lachaise.|center>

Tous le XIXè siècle est marqué par des rébellions, guerres, massacres et surtout des crises économiques cycliques qui mettent le pays sous la coupe de son principal créancier : l’Angleterre. Les problèmes endémiques du Brésil commencent à apparaître : une classe politique corrompue, une administration toute puissante, une économie dirigée, une inflation parfois vertigineuse, une très grande pauvreté face à une minorité très riche et surtout une forte césure entre le monde urbain et le monde rural, représentant deux univers qui se côtoient mais ne se fréquentent pas.

Ces vices, la République va devoir plus ou moins bien les gérer. L’envoi d’une équipe médicale en France et d’une escadre à Gibraltar permet au Brésil de s’assoir dans le camp des vainqueurs en 1918, et il est à noter que le Brésil fut le seul pays d’Amérique latine à déclarer la guerre à l’Allemagne nazie même s’il n’en retira aucun avantage.
Le XXè siècle est marqué par la forte personnalité du président Getùlio Vargas, dictateur puis président, le « Perón » brésilien, qui se suicida quand il s’aperçut que ses alliés politiques (et américain) le lâchaient. Il y a eu aussi de 1964 à 1995 la dictature militaire, tout une succession de généraux ayant pour mission de leurs pairs de redresser l’économie, de combattre les communistes et de « rétablir l’ordre  ». Même si elle fut moins « dure » que dans les autres pays d’Amérique latine, ce fut une « chape » de plomb » qui pesa sur le Brésil et une absence totale de liberté.|center>

Au départ du général Figueirédo la transition démocratique se passa sans difficulté, les élections depuis cette époque se passent sans problème. Mais que se soit la « droite » ou la « gauche » qui est au pouvoir, les problèmes économiques sont toujours aussi présents dans le pays. Bien sûr il y a moins de pauvreté au Brésil, la classe moyenne est bien installée, mais malgré ses promesses, Lula a plus fait pour les capitalistes et les chefs d’entreprise que pour le peuple (ça fait penser à quelqu’un en France) et il en est de même pour la présidente Dilma Rousseff et la corruption est toujours aussi présente.

Michel Faure insiste, à juste titre à mon avis, sur les problèmes économiques que connait le Brésil depuis sa création, mais il n’oublie pas d’insister sur la spécificité de la culture brésilienne et sur tout ce qu’elle doit à la culture que les esclaves ont amenée avec eux et surent adapter sur ce territoire.

Michel Faure aime le Brésil, aime sa complexité, aime sa manière de vivre et à la fin de son livre, le lecteur ne peut qu’avoir envie d’y aller, sans se faire toutefois beaucoup d’illusions sur la bonne foi de sa classe politique.

Félix Delmas


Une histoire du Brésil
Michel Faure

éditions Perrin. 24€90


WUKALI 07/03/2016
Courrier des lecteurs : redaction@wukali.com


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