A cute literary idea to know and love Paris
Les éditions [**INCIPIT*] ont lancé une collection autour de « la première fois » : une série de court récit qui, à partir d’une fiction, raconte un événement ayant marqué notre histoire. Dans les colonnes de [**Wukali*] je vous ai incité à lire Les délices de 36 de [**Nicolas Rey*] autour des premiers congés payés, il y a eu la première apparition de Johnny à la télé, le premier malade du sida, mais aussi le premier bikini ou la première femme à l’Académie française. Dans Paris n’est qu’un songe, [**Nicolas d’Estienne d’Orves*] raconte le premier trajet du métro le 19 juillet 1900 à 13h, de la première rame (en bois) qui va jusqu’à Vincennes où va se dérouler la seconde édition des jeux Olympiques moderne.
Le héros de Nicolas d’Estienne d’Orves vit à notre époque, ingénieur de génie, il a inventé une machine à remonter le temps qui lui permet de remodeler la capitale à son goût, ou plus exactement il fait en sorte que les auteurs des bâtiments qui, à ses yeux, défigurent Paris ne puissent sévir : ainsi il tue le petit [**Georges Pompidou*] et le Centre Beaubourg, le Front-de Seine et Jussieu n’existent plus ; il arrive à changer la destinée d’[**André Malraux*] et la tour Montparnasse n’est jamais érigé. Mais il a conscient qu’il ne peut moduler la capitale comme il voudrait qu’elle soit : pour lui l’île de Cité est un désastre mais [**Haussmann*] n’a pas fait que du mal au niveau de l’urbanisme, il hésite à éliminer[** Viollet le Duc*] car, comme votre serviteur, il n’apprécie que très modérément le pastiche néo-gothique qu’il a fait à Notre-Dame. Il décide donc de préserver le Paris invisible, celui du sous-sol, celui qui est chamboulé par le métropolitain. Il choisit le jour non de son inauguration (il n’y a jamais eu d’inauguration officielle du métro parisien) mais du premier voyage pour commettre son acte. Mais en aura-t-il la force morale ?
Au-delà de l’histoire Nicolas d’Estienne d’Orves nous replonge au début du XXème siècle, à la « Belle époque », quand la France retrouve sa fierté après le désastre de 1870 et les ravages de la Commune ; fierté qu’elle montre au monde entier dans l’Exposition Universelle de 1900. Mais l’auteur nous interpelle aussi sur la philosophie de l’histoire : est-elle « une fuite, un refus pour nier le présent. Une peur de l’avenir, un déni de modernité » ou « une porte creusée dans la paroi même du temps » ? L’histoire doit-elle déboucher sur la nostalgie ou vers l’avenir ? En une période de crise des valeurs et de repli plus ou moins identitaire, c’est cette question que tous les électeurs doivent se poser : vivre dans un passé fantasmé ou aller vers un futur inconnu, sans jouir des avantages du présent.
Comme dans tous les livres de cette collection se trouve à la fin un court mais précis rappel historique sur l’événement décrit. Ici, l’évolution du métro parisien, [**Fulgance Bienvenüe*], les projets d’avenir.
Nous replongeant dans l’atmosphère de la Belle époque, [**Nicolas d’Estienne d’Orves*] signe un récit pétillant d’intelligence en faisant preuve d’un vrai talent d’écriture.
[**Émile Cougut*]
[**Paris n’est qu’un songe
Nicolas d’Estienne d’Orves*]
éditions INCIPIT.12€
WUKALI 29/10/2016
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