The most famous Belgian writer ponders over French presidential elections
Nul doute, **Armel Job*] est le plus grand romancier belge d’aujourd’hui et nous lisons chacun de ses [romans avec gourmandise. Cette fois si Armel Job se pose comme l »observateur voisin et ami et nous scute comme Sirius, du bout de sa lorgnette avec nos turpitudes, nos faiblesses et nos petits ridicules mis en relief à travers cette campagne des présidentielles. Il a accepté pour Wukali de nous donner son point de vue, qu’il en soit vivement remercié.
[**Pierre-Alain Lévy*]
« Quand j’étais jeune, j’ai été, comme beaucoup, tenté par la politique. Ce fut une terrible déconvenue. Là où j’attendais humilité, honnêteté, courage, je n’ai trouvé qu’arrogance, corruption et rapacité. Tout cela répugnait à mon caractère, je n’avais pas été habitué à ce genre de pratiques. Pourtant, au milieu de ce marasme, trop jeune, trop faible, dévoré d’ambition, moi aussi je me suis laissé corrompre. »
Ceci n’est pas la confession d’un candidat d’aujourd’hui à Paris Match, c’est celle de l’historien latin [**Salluste*] dans les premières pages de « La Conjuration de Catilina » écrites en 41 avant notre ère. Impitoyablement, Salluste met le doigt sur les maux de la république romaine : présomption (audacia), corruption (largitio), cupidité (avaritia) des responsables politiques. Mais il avoue que lui aussi s’est laissé entraîner aux mêmes errements à cause du système (inter tanta vitia) : il a fait comme tout le monde.
En suivant la compagne présidentielle française, où les programmes semblent relégués à l’arrière-plan par la dénonciation des indélicatesses légales sinon légitimes de certains, on peut sans doute relire ce passage de Salluste, surtout parce que Salluste n’hésite pas à se mettre en cause lui-même. Salluste provoque la question : combien d’entre nous, modestes citoyens, ne se seraient pas servi une part du gâteau s’ils s’étaient trouvés à la table réservée des privilégiés ?
J’ai été faible (imbecilla aetas), avoue Salluste. À sa suite, ne pourrions-nous considérer que la chasse aux malversations à laquelle nous assistons pourrait bien résulter pour partie de la conscience secrète de nos propres défaillances ? Ne serait-ce pas le sentiment diffus de notre propre faiblesse qui nous pousse à remettre les rênes du pouvoir entre des mains de blanchisseuse ?
Peut-être assistons-nous, non seulement en[** France*], mais partout en [**Europe*], à l’émergence du constat cruel que c’est la médiocrité générale des peuples qui explique la médiocrité de nos politiques, et que la seule voie de salut réside dans un sursaut de dignité que nous espérons d’abord voir s’incarner dans nos représentants.
romancier
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WUKALI 09/04/2017