Behind The Scream by Munch, a natural and weather phenomenon ?


L’assemblée générale de l’Union des Géosciences (EGU2017) vient de se dérouler à Vienne en Autriche du 23 au 28 avril, ce fut l’occasion d’une communication originale sur une oeuvre phare de la peinture européenne, «[**Le Cri*]» d'[**Edvard Munch*], peint en 1893 ( il en existe plusieurs versions). Jusqu’à présent, les commentaires qui permettaient d’analyser ce tableau ne manquaient pas d’avoir recours à des considérations d’ordre médical pour ne pas dire psychiatrique mettant en quelque sorte en parallèle les démons qui hantaient Munch avec ceux que connaissaient Van Gogh. Les nuages orangés flottant comme des vagues et qui constituent le paysage arrière sur lequel se découpe le personnage emblématique du tableau, étant dans les analyses les plus freudiennes à rapprocher du climat psychologiquement et affectivement délétère dans lequel le peintre vivait.

[**Edvard Munch*] (1863-1944). Son père Christian Munch était un médecin militaire issu d’une famille protestante et puritaine, il était sujet à des crises dépressives. La famille déménage fréquemment suivant ainsi les affectations où Monsieur Munch, de par sa condition militaire, était nommé. Sa mère meurt de la tuberculose, le jeune Edvard Munch a alors cinq ans, il souffre d’une bronchite chronique. Sa soeur ainée Johanne Sophie (elle a un an de plus que lui) meurt aussi plus tard de la tuberculose, elle a quinze ans.

Arrivé à l’âge d’homme Edvard Munch entretient une liaison clandestine avec [**Oda Lasson*] (épouse Krohg). Il se lie d’amitié avec le dramaturge [**August Strindberg,*] leurs relations sont aussi marquées pour chacun d’entre eux par un délire de persécution. Chez Strindberg cela prend des dimensions paranoïaques, il pense qu’Edvard veut le tuer, «On dit que Strindberg soigne une maladie mentale – il avait du reste un tas d’idées bizarres- il affirmait qu’il fabriquait de l’or et que la terre était plate(…) il en est arrivé à croire que je voulais l’asphyxier avec du gaz» .

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Toute sa vie durant la dimension de la maladie, de la névrose le hante ainsi que ses proches et les femmes qu’il aime. Ainsi Edvard Munch entretient une liaison avec [**Tulla Larsen*],«Fru L» telle il la nomme dans son journal, leur relation est explosive. La nuit du 11 au 12 septembre 1902 Tulla feint de succomber à une overdose de morphine et Edvard Munch la découvre allongée dans un cercueil entouré de bougies allumées. Rapidement Munch s’aperçoit de la mise en scène mortifère, une dispute éclate entre les deux amants et Tulla Larsen blesse d’un coup de pistolet Munch à la main gauche.

En 1908 à l’occasion d’un séjour à Copenhague au Danemark, il retombe dans la dépression, il est hospitalisé dans une clinique neurologique où il reçoit des traitements par électrothérapie (probablement des électrochocs). Sa chambre se transforme en un véritable atelier. «Quand je peins la maladie et la souffrance, je ressens, au contraire, une libération bénéfique. C’est là une saine réaction qui m’apprend à vivre et à avancer», écrit-il dans son journal que l’on peut de nos jours consulter au musée Munch d'[**Oslo*]

Alors dans tout cela, quels liens avec un colloque consacré aux géosciences ? Il est probable que ces nuages oranges que l’on aperçoit dans Le Cri aient plus à voir avec des phénomènes à la fois climatiques et éruptifs plutôt qu’avec une art thérapie incongrue, d’ailleurs ne lit-on pas dans son journal: «J’observe les nuages enflammés, le fjord d’un noir bleuté».

[**Examinons les propositions scientifiques.*]

Déjà en 2004 des scientifiques américains de la Texas State University avaient suggéré que ces nuages oranges étaient à mettre en relation avec l’éruption du [**Krakatoa*], un volcan indonésien, survenue le 27 août 1883.

[**Helen Muri*], chercheuse à l’université d’Oslo a un point de vue différent. Pour elle, ces nuages s’apparenteraient davantage à ce phénomène, une iridescence que l’on nomme en météo les nuages nacrés ou mère-de-perle qui se forment en haute altitude entre 15 à 25 kilomètres de haut dans la stratosphère. En outre une éruption volcanique n’aurait aucune incidence sur la forme en vague de ces nuages. Qui plus est à la suite d ‘une éruption volcanique des couchers de soleil teintés d’orange demeurent assez communs et peuvent être observés pendant les années suivantes alors que le phénomène relaté et peint par Munch est circonscrit dans le temps. Ces nuages sont très fins et pour cette raison précise ne peuvent être observés qu’à des moments parfaitement définis, soit au lever ou au coucher du soleil et nullement durant le jour. Un scientifique norvégien au 19ème décrivant ce phénomène et cité par Helen Muri, avait écrit: «Ils sont si beaux, que vous pourriez croire que que vous êtes dans un autre monde».

Dans la conclusion de son intervention, la climatologue et météorologue de l’université d’Oslo ouvrit le champ du débat au sciences physiques, aux sciences de la nature et aux sciences humaines et la psychologie, nous ne saurions mieux dire!

[**Torbjorn Røe Helgesen*], correspondant de Wukali à Oslo et [**Pierre-Alain Lévy*]


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WUKALI 29/04/2017
Illustration de l’entête: Sotheby’s. Londres12, avril 2012, mise en vente dune version pastel du Cri (1895) © AFP photo

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