Mystery of a Danish painter
Epure, chaleur, lumière qui frôle, un peu de mystère, le «Hygge» danois existe bien. Simplicité des évidences et complexité des nuances.
Je me souviens de 1997 de l’exposition à Orsay, d’une nuque de femme et de lumières Vermeeriennes, d’une lettre lue, d’une autre nuque.
Depuis, nos rencontres furent rares.
Quelques exceptions et des allusions, des réminiscences.
Il y a un an ou deux je suis tombé sur une édition des années 60 du « Diner de Babette » de [**Karen Blixen*]. Et comme il n’y a jamais de hasard ; quelques jours après la lecture, « Le festin de Babette » passait sur Arte. On a revu avec délice [**Stephane Audran*] préparer ses cailles en sarcophage, son bouillon de tortue et on a apprécié ses convives « qui rigolent quand ils se brûlent » dirait mon père esquissant ou réprimant un sourire en buvant du « Clos de Vougeoooot »…. Huuuum.
Personnages taciturnes, repliés sur eux-mêmes sur une île danoise (Nous y voilà !).
Lumière sculptée par les bougies, austérité, palette simple.
Simple ? Simple et pourtant si complexe. « Mais papa, la vie n’est pas binaire, elle est faite de nuances » dirait [**Inès*], ma fille. Oui je sais elle est douée ma, notre fille pardon ([**Hélène*], ma femme me lit).
Et nous voilà ce dimanche en fin d’après-midi au [**Musée Jacquemart-André*] pour voir l’exposition [**Hammershøi, le maître de la peinture danoise*] (Musée Jacquemart-André, du 14 mars au 22 juillet 2019).
Premier choc, en voyant cette toile monumentale Cinq portraits. Clair-obscur, lugubre, aucun regard ne se croise. Impression d’étrangeté … Comme sur une ile danoise.
On y est.
– [**Huit sections pour ce parcours d’exposition*].
1. Hammershøi et les siens
2. Premiers intérieurs, une empreinte personnelle
3. Entre Rêve et réalité, le paysage
4. Paysages citadins, le temps suspendu
5. Un nouveau regard sur le nu
6. L’art de l’épure
7. Silhouettes du quotidien, atmosphères étranges
8. Poésie du vide et de la lumière
Hélène qui rêve d’une « une ferme en Afrique » à la Karen résume : «Hammershøi ce sont des lignes et de la lumière, un photographe.»
C’est exactement cela. On apprend qu’il peint en grand puis replie ses toiles pour recadrer pour zoomer le motif.
Il soustrait et enlève les éléments du décor jusqu’à l’épure, il tord un peu le motif et change un peu les couleurs par touches subtiles et apporte des nuances à une palette austère. C’est Photoshop mais en mieux ! Cela confère aux tableaux, profondeur, illusion du flou et la lumière emplit le vide. Hammershøi nous fait entrer dans le tableau.
On y entre donc avec un peu d’appréhension.
C’est le peintre de l’intensité du mouvement suspendu. Une suspension, une tension qui crée de l’inquiétude. Un peu comme chez les symbolistes, un poil d’onirisme.
D’ailleurs, on ne connaissait pas les paysages ruraux et urbains de l’ami Wilhem (oui ça crée des liens) qui nous font entrer dans le rêve.
Les arbres disparaissent, la présence humaine est gommée et les paysages basculent petit à petit dans l’abstraction. La part du ciel (ou celle des anges ?) passe d’un tiers à deux-tiers.
On s’affranchit des déchirures du monde et le paysage devient introspection que la palette argentée favorise.
La distanciation d’avec le motif favorise l’apparition du paysage intérieur.
Ah oui quand même !
Ma femme m’avait bien dit de me calmer sur le Clos de Vougeot.
Paysages citadins torturés et des nus tout autant. C’est bien mais… passons.
[**Revenons sur les intérieurs. C’est ce qui a fait sa célébrité après tout.*]
On vous l’a dit, ce qui lui fait choisir le motif ce sont les lignes disait-il et cela dans une « logique architectonique ». Des lignes et la lumière.
Et on termine sur la 8ème section : poésie du vide et de la lumière.
Âme du vide et lumière le comblant. Je parlais plus haut de la sculpture de la lumière. Incroyable tableau conservé à la Tate (Intérieur, rayon de soleil sur le sol). Il résume tout.
Hammershøi était taciturne (lui aussi), sans doute un peu torturé depuis l’enfance (on nous dit qu’il dessinait si bien les monstres qu’ils lui faisaient peur), énigmatique et casanier à partir d’un certain âge. Sans doute ne voulait-il pas affronter le monde tel qu’il était et rester sur son île, son høme et profiter du Hygge danois.
Hygge (prononcer [y.ɡœ]) ) plus présent dans les tableaux de son beau-frère [**Peter Isled*] et de son ami [**Carl Holsøe*]. Joli tableau et émouvant tableau de cette jeune fille blonde de dos une cruche en terre cuite émaillée à la main. Très hygge.
Quoi ? vous ne lisez pas « Atmosphère cosy » ? « Happiness et cocooning » ou « Bene sere et tisane » ?
Séance de rattrapage rapide ! Car on peut parler architecture de la lumière et rire avec les [**Zozos migrateurs*] et être excité comme [**Fred Chesneau*] à l’idée d’un dîner partagé avec des amis comme hier soir et de la préparation en cuisine avec sa fille.
Et [**c’est ça*] qui est bon et beau !
[**Hammershøi, le maître de la peinture danoise*]
Musée Jacquemart-André. Paris
jusqu’au 22 juillet 2019).
Illustration de l’entête: Vilhelm Hammershøi ; Jeune homme lisant (détail)
– Pour tout savoir sur le Danemark et le«Hygge» bien entendu ! (prononcer Hu- gueu)
[**Les pérégrinations de l’ami Jean-René*]
[**Les Zozos migrateurs*]
et dans les pas de [**Fred Chesneau*]… !
Le tout avec convivialité, bière et recette danoise en prime !