Un été nazi, un titre fort, dernier roman de Léon Cornec, un sujet qui revient hélas bien souvent à la une de nos journaux. Alex est un petit garçon de 10 ans qui va devoir passer ses vacances d’été, en cette année 1984, dans ce village du nord où il vient d’aménager. Son père est gendarme, il est souvent absent, alors il reste là, seul avec sa mère.
Alex partage l’idéologie de sa famille (parents, oncles, tantes, etc.) et de la population locale : le racisme. Dans cet univers perdu, la crainte de « l’arabe » (du « bougnoul ») qui va venir tout envahir et tout détruire est une musique de fond qui ne s’arrête jamais. Du haut de ses 10 ans, il voue une passion pour les nazis : surtout au niveau de l’esthétisme (la beauté des uniformes et surtout des bottes), sans oublier l’idée du surhomme, invincible et massacreur de « bougnouls ».
D’abord il rencontre deux jeunes de son âge, Dady et Seb, ce dernier ayant une vraie fascination pour la mort, voir la souffrance due à la torture. Ainsi tous les trois vont faire, en toute impunité, les 400 coups, toujours autour de cette idéologie mortifère et leur volonté de tuer des « bougnouls ». De fait, ils bénéficient de l’indulgence de la population et de la gendarmerie locale. Et quand ils dépassent les bornes avec l’incendie d’une grange, le marginal de la commune qui vient de décéder, fait un parfait bouc-émissaire. Peu importe que des croix nazis soient dessinées partout, que les dégradations continuent, personne ne dit rien, personne n’agit.
Mais Alex, va évoluer, enfin se poser des questions. Il y a d’abord le suicide de Dady suite à celui de sa mère, et puis il tombe amoureux d’Amélie, une petite fille de son âge dont la famille vient de s’installer au village. Mais, elle a une petite sœur, un bébé adopté au Sénégal. C’est qu’en effet il a du mal à comprendre la haine qui surgit autour de lui et qui aboutit au départ de la famille. Et en plus son père adoré est victime d’un AVC et revient alité et diminué. Mais un projet de ratonnade auquel Alex est associé, lui redonne force et vigueur.
Un été nazi est une sorte de « chronique de la haine ordinaire », du racisme dans ce qu’il a le plus imbécile, une chronique de la peur de l’autre, complètement fantasmée puisqu ‘absente, de la recherche du bouc émissaire, responsable du moindre tracas du quotidien. Sans compter les souvenirs totalement fantasmés de ceux qui ont fait l’armée.
De fait, ce qui doit interpeller, se sont les ravages que cette idéologie peuvent causer dans l’esprit en formation d’un jeune garçon. La pression familiale ET sociale sont si fortes, qu’il ne peut la surmonter. Bien sûr, il se pose des questions, mais son environnement le ramène toujours au même endroit. Et comme il se comporte en « bon soldat », sa participation à la « ratonnade » est perçue par tous, lui compris, comme un véritable acte d’initiation, comme son entrée par la grande porte dans le monde de ceux qui vont sauver la France et la race blanche.
Un été nazi est dans la droite ligne du film d’Yves Boisset : Dupont Lajoie : même « Français moyens », même racisme, même turpitudes, même recherche d’un bouc émissaire et donc même impunité pour les auteurs.
Ce livre porte sur l’histoire d’un petit garçon de 10 ans et sa lecture, par le style, par son découpage en courts chapitres qui représentent chacun une petite histoire, n’est pas sans faire penser aux aventures du Petit Nicolas, de Goscinny et Sempé. Et cela rend la lecture agréable, facile, mais aussi terrifiante quant au contenu.
Léon Cornec nous offre matière à réflexion et démontre que le racisme, le vrai, dans toute sa bêtise est vraiment présent dans tous les milieux, partout sur le territoire.
Un été nazi
Léon Cornec
éditions Robert Laffont. 17€ . (11€99 Ebook)