Avec Goutte d’or de Christophe Peladan, franchissons les limites pour aborder le pays du rêve, celui de ces histoires d’enfance autour d’aventures dans les îles et sur les mers infestées de pirates. Une réminiscence de Peter Pan par exemple. Tout ce qu’il faut pour nous dépayser et nous attendrir.
Ainsi Goutte d’or réalisé par Christophe Peladan est une co-production franco-danoise, Happy Flyfish Production ApS pour le Danemark et ExFools Productions pour la France.
Tout au cours de ces rendez-vous que nous avons ensemble sur WUKALI chaque samedi sur le film d’animation, nous avons pu voir nombre de styles différents et nombre de manières de faire. Le champ de réalisation de ces films est ainsi très vaste et riche, partant du dessin à la réalisation de marionnettes ou de figurines de pâte à modeler par exemple pour arriver aux réalisations digitales plus contemporaines. Le film d’animation est donc un vrai langage qui s’exprime, selon chaque réalisateur, avec des moyens différents.
Voici un ensemble filmique parfaitement maîtrisé, images, animation, musique et narration, un petit bijou d’une durée de 10 minutes.
Goutte d’or est un film d’animation réalisé en stop motion selon la terminologie anglaise ou en volume en français. C’est à dire qu’une caméra va filmer image par image une fraction d’un élément visuel ( personnages, objets etc).
Pour créer le mouvement ou faire évoluer les formes, entre chaque fraction-séquence, l’élément à filmer (personnage par exemple), sera imperceptiblement déplacé ou évoluera dans sa forme, et l’addition de chacune de ces séquences ( comme la multiplicité des images cadencées sur une pellicule de film ) créera au stade final le mouvement. Il faudra donc un nombre énorme de prises de vue pour arriver à cette fin.
Par ailleurs, le réalisateur entouré d’une équipe de techniciens devra construire, comme dans un film classique, les décors et les maquettes qui peuvent atteindre de grandes dimensions allant jusqu’à plusieurs mètres par exemple. Cela nécessite une grande qualification artisanale et spécialisée de l’ensemble de tous ceux qui forment l’équipe technique. Chaque détail devra être très méticuleusement travaillé.
Le vilain pirate et la si gracieuse ondine devenue pieuvre de la mer
Le film. Nous voici tout d’un coup entouré de pirates, des gibiers de potence, pendus aux mats d’un navire fantôme. Un capitaine borgne et unijambiste, encore plus vilain que le capitaine Crochet, et une escouade de malfrats, mauvaise graine, qui s’agitent dans l’air au gré du vent qui souffle entre misaine et artimon.
Venue probablement des profondeurs de la mer, nul ne sait, une pieuvre projette ses tentacules sur le borgne chapeauté qui commande cette confrérie de malfaisants. Cette créature est féminine, c’est même une charmante petite femme, une donzelle au petit cul rieur. Du coup l’atmosphère change, cesse le vent, et les trois escogriffes, troupe lamentable et aux ordres, devient un orchestre qui joue musette. Des musiciens, gros bras attendris au coeur tendre, séduits par ce charme féminin quelque peu dénudé et charmant.
La musique tient dans ce film une place considérable, elle a été écrite par Dominique Cravic et Les Primitifs du futur. un air de valse musette joué par un banjo, un saxophone et un ukulélé. Une atmosphère très « parisienne », de ces bals populaires naguère rue de Lappe. Elle ressemble à celle devenue célèbre qui habille le film Le Fabuleux Destin d’Amélie Poulain, des similitudes en tout cas. C’est précisément l’inadéquation, l’anachronisme, entre le temps de l’histoire et cette musique qui apporte tant de charme à ce petit film. Une danse de séduction entre ce barbon qui pend au bout d’une corde de chanvre et cette délicieuse jeune créature qui joue de ses charmes pulpeux avec un érotisme d’une innocence quelque peu coquine!