Elle, c’est Carmen, enseignante, spécialiste de l ‘Amérique latine, et pour cause, ses parents, réfugiés, étaient d’origine argentine. Carmen est dépressive, a déjà fait des tentatives de suicide et connu un internement en hôpital psychiatrique. Elle a réussi à se construire un équilibre fragile autour de son mari et de sa petite fille.
Ainsi Carmen avait onze ans quand elle a vu sa mère, toujours gaie et souriante, devenir en un jour amorphe. Elle finira par se suicider. Carmen a perdu son père, un taiseux qui éludait toute discussion sur son passé, qui adorait sa fille qu’il a laissée avec ses questions et ses cauchemars.
Et un jour, Carmen apprend que son père louait un box dans un garde meuble, où elle ne trouve qu’un bureau et une clé. Dans un tiroir secret elle trouve photographies, lettres et sept carnets dans lesquels son père à raconté son histoire.
D’abord c’estl’ histoire d’un enfant élevé par un père d’origine française et ne connaissant que la violence contre son fils et sa femme d’origine indienne. Père qui les quitte du jour au lendemain. En premier lieu il assiste au viol et au meurtre de sa mère et réussit à se réfugier dans un orphelinat où il passera son enfance et son adolescence. Puis Carmen apprend que son père était un fervent croyant, lui qu’elle n’a jamais vu dans une église, qu’il s’est engagé dans l’armée avec son meilleur ami, un géant muet, armée qui devient sa véritable famille, où il rencontre un commandant qui a confiance en lui, qui est son mentor, son modèle.
C’est alors que survient le coup d’état des généraux et Carmen découvre la vérité : qui était sa mère, qui était vraiment ce père adulé, ce qu’il a fait, pourquoi, dans quelles circonstances ils sont partis tous les deux en France. Et, à travers l’histoire de son père qui l’amène au bord de la folie, elle comprend, enfin qui elle est vraiment.
Johanna Krawczyk signe son premier roman et pour un coup d’essai, c’est un coup de maître. Cette histoire est d’une profondeur, d’une beauté dans la descente dans l’horreur, à couper le souffle.
Au-delà de l’histoire rarement abordée dans la littérature française de la dictature des généraux argentins, des disparus, des enfants enlevés, elle nous questionne sur la vérité.
Alors faut-il absolument la connaître la vérité au risque de voir non seulement son univers être détruit mais aussi soi-même.
Mais quelle est donc la force de l’amour pour pouvoir sortir de l’horreur ?
Et puis l’amour peut-il en quelque sorte amener à la rédemption, au moins à nos yeux ?
Et finalement nous souhaiterions tous à Carmen qu’elle puisse s’épanouir dans sa nouvelle vie après la descente aux enfers dans laquelle elle a été plongée.
Avec une écriture serrée, sans fioriture, Johanna Krawczyk nous emporte dans son histoire, nous plonge dans son univers dont le lecteur a du mal à sortir. Un livre captivant de la première à la dernière ligne.
Avant elle
Johanna Krawczyk
édtions Héloïse d’Ormesson. 16€