Qui ne dira jamais ô combien la sérendipité est un facteur d’avancement de la connaissance et des sciences ! En termes simples, la sérendipité: tous ces facteurs réunis selon le hasard, et qui dans une tête bien faite (celle de Newton par exemple et la pomme), permettront de dégager paradoxalement, une vision scientifique qu’une introspection ou analyse rationnelle et bien construite, n’avaient jusque là point permis d’envisager, de concevoir même!
Tel est souvent le cas dans le domaine de l’archéologie. Il suffit de butter sur une pierre qui à peine affleure du sol pour découvrir ébloui des chefs d’oeuvre et parfois même des civilisations… Nous avons souvent vu cela dans WUKALI dans des articles consacrés à des fouilles archéologiques.
La technique reconnaissons-le parfois aide et notamment l’usage de sonars ou détecteurs métaux comme ce qu’il vient d’arriver en Pologne près de la ville de Biskupiec. Un trésor de pièces d’argent pas moins, mais voyons la suite car ce trésor semble bien posséder toute une histoire, et de celles que l’on aime dans WUKALI!
Tout dénote dans ces pièces, de la haute qualité du métal au schéma même du modèle, leur origine occidentale. Rares en effet, convient-il ici à ce stade de le préciser, la découverte de monnaies d’argent d’Europe occidentale en cet endroit de Pologne.
C’est la première fois que l’on trouve autant de monnaies carolingiennes en Pologne. Seules trois de ces pièces – d’un style distinctif avec des inscriptions latines et un crucifix central – ont été trouvées dans le pays auparavant. Rappelons pour mémoire que l’empire carolingien a été fondé par Charlemagne, roi des Francs – et s’étendait sur une grande partie de la France moderne, de l’Allemagne, de la Suisse et de l’Italie du Nord aux VIIIe et IXe siècles.
En quoi ce trésor est-il donc unique ?
En effet, jusqu’à présent, les monnaies trouvées consistaient en une collection d’une douzaine de pièces découvertes dans la colonie de Janów Pomorskie – la légendaire Truso à l’embouchure de la Vistule et de la rivière Elbląg. Ce trésor comprend : une monnaie frisonne du VIIe siècle, des émissions danoises et anglo-saxonnes des VIIIe et IXe siècles, et trois monnaies carolingiennes. La plus jeune des monnaies carolingiennes est le denier Lothar, daté de 840-855 ; les deux autres sont les deniers de Louis le Pieux dans le type de CHRISTIA RELIGIO, analogues à ceux trouvés dans le trésor en question. Deux des deniers découverts à Truso ont été frappés sous Louis le Pieux, et l’un d’eux a été utilisé comme pendentif. Il est considéré comme l’un des objets les plus anciens liés au symbolisme chrétien dans cette partie de l’Europe, une trouvaille unique à l’échelle de l’Europe centrale et orientale.
Une autre caractéristique importante est la structure homogène de la trésorerie. Cependant, il convient de souligner la différenciation typologique distincte des timbres, des frappes, ce qui laisse espérer l’examen de leur corrélation et de permettre ainsi l’identification des ateliers. Dans le contexte de l’ensemble, il y a le seul exemplaire frappé pour Charles le Chauve (en tant que roi des Francs), qui nous fixe actuellement le terminus post quem) du dépôt.
Amplitude des échanges commerciaux
Homogène en effet est ce trésor, comme nous venons de le signaler, car il ne comporte point de dirhams, cette monnaie abbasside qui avait afflué dans la région baltique au cours du IXème siècle et servait de monnaie d’échange, un moment où le métal arabe est massivement présent dans la région.
L’histoire de l’art et les avancées scientifiques et technologiques, donnent de l’histoire de l’humanité , une vision dynamique des populations et des échanges. L’archéologie agit là comme un révélateur. Le commerce entre territoires, entre pays, ainsi joue comme un facteur fondamental de civilisation, une énergie industrieuse en mouvement. Il est en soi un processus vital d’évolution et de connaissances. À cet égard, les minerais (cuivre, étain notamment) étaient particulièrement prisés et ce dès la période de l’âge de bronze ( 2700 à 900 av. J.-C.)
Le trésor de Biskupiec possède une caractéristique remarquable. En effet il est principalement constitué de pièces plus ou moins usées, déposées et enfouies rapidement, semblerait-il, une fois arrivées en Prusse.
La crise de la monarchie carolingienne sous le règne de Louis le Pieux coïncide avec l’intensité des invasions vikings sur l’État franc. Des attaques répétées sur Dorestad, un des ports de l’Europe les plus importants du Haut Moyen-âge, ont eu lieu (834, 835, 836, 837). Avec le temps, les expéditions rentrent dans les terres : en 841 Rouen est victime de l’invasion, puis Nantes en 843.
L’année de la percée viking est 845, au cours de laquelle la grande flotte conquiert Paris. C’est ainsi que Charles-le-Chauve est contraint de payer 7 000 livres d’argent (environ 2,8 t). L’image des Vikings chargés de butin, émergeant des sources écrites, n’est cependant pas associée au registre particulièrement massif des premières monnaies carolingiennes de la Scandinavie contemporaine.
Ainsi, si les pièces provenaient de Truso, il est possible qu’elles fassent partie d’une immense rançon d’or et d’argent payée par un roi carolingien pour empêcher les envahisseurs vikings de saccager la ville de Paris.
C’est ainsi que Mateusz Bogucki, archéologue et expert en pièces de monnaie à l’Université de Varsovie , laisse entendre que cette hypothèse peut être fondée, s’appuyant pour cela sur l’origine éponyme de ces pièces. Ce chercheur précise que le caractère distinctif de ces pièces soulève des questions intéressantes sur leurs origines.
En effet, à l’époque où le trésor était caché ou perdu, le premier royaume polonais médiéval n’avait pas encore été établi, et les tribus slaves de la région utilisaient principalement des dirhams d’argent arabes payés en échange d’esclaves par des commerçants du califat musulman, basés à Bagdad loin de le sud.
Des pièces de monnaie carolingiennes
En mars 2021, l’archéologue Luke Szczepanski et son équipe avaient déterré un total de 118 pièces de monnaie sur le terrain – 117 d’entre elles frappées sous le règne de l’empereur carolingien Louis le Pieux, qui a régné de 814 à 840 après JC, et une pièce frappée au cours de la règne de son fils Charles le Chauve, qui régna jusqu’en 877 après JC.
Or de telles pièces sont extrêmement rares en Pologne qui était bien au-delà des terres gouvernées par la dynastie carolingienne. Les trois seules pièces carolingiennes précédemment déterrées ont été trouvées sur le site archéologique de Truso, cette ville qui avait été établie par des commerçants scandinaves au VIIIe siècle et était célèbre pour son commerce d’ambre, de fourrures et d’esclaves.
Le professeur Mateusz Bogucki émet l’hypothèse suivante, il semble probable que le propriétaire du trésor de pièces trouvé près de Biskupiec les ait obtenues à Truso, mais il est aussi possible qu’elles soient venues d’ailleurs et aient été apportées à Truso pour y être échangées. Les pièces n’ont aucune marque indiquant exactement où et quand elles ont été frappées, mais les chercheurs peuvent en apprendre davantage sur leurs origines en étudiant des caractéristiques telles que la forme des lettres de leurs inscriptions latines, a-t-il déclaré.
La dévastation viking
Les archéologues ne savent pas comment le trésor de pièces d’argent a été caché ou perdu près de Biskupiec. La région était probablement une région sauvage inhabitée à l’époque, et les archéologues n’ont trouvé aucune trace d’une colonie à proximité
Les pillards nordiques attaquaient fréquemment au sein même de l’empire carolingien – particulièrement le nord de la France et l’ouest de l’Allemagne d’aujourd’hui – et cela après la fin du VIIIe siècle. Les documents historiques compilés par les moines suggèrent qu’en 845 après JC, une grande flotte de navires vikings a remonté la Seine et a assiégé Paris, alors situé sur une île du fleuve.
Aujourd’hui, au moment même où se reconstruit Notre-Dame de Paris dévastée par le feu, rappelons qu’à cet endroit alors évidemment vierge de construction, ont été bloqués les Vikings qui remontaient la Seine, à hauteur de ce qui est aujourd’hui le Petit-Pont.
Charles le Chauve aurait payé aux envahisseurs 7 000 livres, soit plus de 5 tonnes d’argent et d’or, pour les empêcher de saccager Paris, a déclaré Mateusz Bogucki, et il est possible que certaines des pièces trouvées près de Biskupiec fassent partie de cette rançon.
Cette découverte archéologique on ne peut plus intéressante, rend parfait compte de la porosité des populations et des échanges commerciaux en ce Haut Moyen-Âge. La monnaie comme facteur de civilisation ( ce qui est évident de toute la nuit des temps). Voila qui devrait clouer le bec à ces poussiéreux et confus agitateurs politiques des extrêmes, mais cela est une autre histoire!
Encore une fois, nous observons que l’histoire de l’art adossée aux avancées scientifiques permet donc de décoder en quelque sorte le temps et nous le rendre de fait plus immédiatement compréhensible et familier.