Tout s’explique, tout est dit dans le titre du roman d’Anne Pouget: Le diable noir : l’horloge à l’envers…
Il ne fait pas bon, en ce début du XIIIème siècle, d’être un jeune orphelin juif errant, sans attache. C’est le bouc émissaire parfait, comme en fait l’amère expérience Samuel. Condamné pour un vol qu’il n’a pas commis, il est sauvé par Gédéon, surnommé dans le pays le diable noir, non seulement à cause de sa couleur de peau, mais aussi à cause de sa réputation sulfureuse. Ainsi Gédéon vit seul, dans un endroit isolé et ses activités sont proches de la sorcellerie.
Samuel se retrouve être le factotum de cet étrange personnage qui lui interdit l’accès à certains endroits de sa maison. En outre, il l’oblige à faire des choses plus que bizarres comme attraper trois mouches sans les blesser, calculer la vitesse de progression des insectes ou regarder la décomposition d’un morceau de viande. Que des choses qui n’ont aucun sens pour le jeune homme qui ne peut véritablement se rebeller car dehors l’attend la mort.
Pourtant il comprend, petit à petit, que Gédéon ne veut que lui transmettre son savoir, que lui faire découvrir les merveilles et les secrets de la nature, même s’ils sont quelque peu en contradiction avec les savoirs et surtout avec les mentalités de son époque. Une démarche bien en avance pour son époque, une démarche que nous nommons maintenant « scientifique » : « l’échec a cela de bon : c’est que compris avec humilité, il permet d’ouvrir la voie de la réussite. Tu dois apprendre la patience. « J’observe, j’analyse, je conclus » ; voilà les trois piliers d’un bon raisonnement ». Il lui transmet son savoir sur les insectes, surtout les nécrophages. Savoir repérer les larves, c’est pouvoir dater le début de la putréfaction, c’est remonter dans le temps grâce à cette véritable « horloge à l’envers ». De fait, Gédéon a une démarche de médecine légale.
Samuel fait la rencontre de leur voisine, Ambrine, dont la sœur a été assassinée, sans que cela puisse émouvoir les autorités, on ne va pas s’investir pour punir la mort d’une pauvresse.
Et puis Gédéon est accusé du meurtre d’un riche bourgeois et condamné à mort. Samuel, aidé par Ambrine et Héloïse la miresse, va mettre en application le savoir qu’il a acquis, en se heurtant au profond scepticisme des juges, pour découvrir l’assassin. Et les mouches vont lui être de précieuses aides.
Un roman policier historique sur un sujet rarement traité : la place des insectes dans la médecine légale et surtout un début d’explication au long défilé qu’ils entreprennent dés le début de la mort. Et le lecteur, non spécialiste comme moi, se voit vite très intéressé par un sujet que, de premier abord, il ne va pas aborder pour le plaisir. Avec un style clair, simple (Anne Pouget a commis bien des livres pour la jeunesse), ce roman se lit avec une grande facilité. En plus, certaines notes en bas de page expliquent simplement, sans pédantisme, les expressions, les us et coutumes du XIIIème siècle.
Le diable noir : l’horloge l’envers d’Anne Pouget, un livre pouvant être lu dès l’adolescence pour apprendre en se faisant plaisir. Et bientôt le Livre 2 que nous attendrons avec impatience !
Le diable noir : l’horloge à l’envers
Anne Pouget
éditions ScriNéo. 14€90