Elle est là, la génération montante. Les jeunes musiciens des Ensembles en Résidence étaient sur les routes de Provence du 8 au 14 août 2021. Ils ont suivi des Masters Classes durant cette semaine unique.
En effet, depuis 1982, le Festival de piano reçoit en résidence de jeunes ensembles (duos, trios, quatuors…) qui bénéficient pendant quelques jours de « Classes de Maîtres ».
En effet, il s’agit bel et bien de promouvoir une nouvelle génération d’artistes et de permettre aux étudiants invités en résidence chaque année de côtoyer des professionnels afin de bénéficier de leur expérience. Car elle est là la génération montante et les soirées des ensembles en résidence nous offrent la possibilité de découvrir de merveilleux interprètes.
Un florilège de musique annoncé oui, mais il y a quelque chose de grave et sérieux qui plane sur la scène. Certes ils sont prêts, mais l’auditorium du parc a de quoi impressionner car il s’agit de se produire devant un public de mélomanes, on s’en doute un peu, habitué des grands récitals. Ces jeunes gens savent qu’en général tout se joue dans les premières d’une carrière et chaque rencontre avec le public constitue un nouveau challenge.
Alors, ils sont là, les professeurs, ces musiciens expérimentés reconnus sur le plan international.
Ils ont accueilli ces excellents élèves, les ont encouragés, les ont aidés à progresser et à s’aguerrir… et ils ont partagé la scène ce dimanche soir. Tous étaient visiblement heureux d’être là.
Bien sûr, le trac chez certains jeunes musiciens s’est fait sentir. Légèrement perceptible toutefois, car la technique est là et les morceaux présentés étaient maîtrisés. Ils ne sont pas tombés du ciel ces jeunes gens ! Ils ont passé les concours internationaux et les ont brillamment réussis.
Ce qui est étonnant, c’est de pouvoir découvrir les personnalités de chacun. Déjà les tempéraments s’affichent.
Quatuor Magenta, un quatuor à cordes avec au piano, une « révélation », le toulousain Vincent Mussat dont on parle de plus en plus. Ensemble, ils ont joué Schumann, quintette pour piano et corde en mi bémol majeur opus 44, 1 er et 3èmemouvement. Il est beau ce piano qui apporte un supplément d’âme, une superbe sonorité aux cordes et décuple les effets de rythme. Les musiciens, dont on a particulièrement aimé le scherzo molto vivace, nous ont embarqué dans l’univers de Schumann entre fantaisie et rigueur.
Schumann encore, Bilder aus Ostern opus 66 N° 4, une sublime interprétation de deux musiciens qui s’apprécient et qui se connaissent bien. Claire Désert et Emmanuel Strosser nous livrent des « reflets d’Orient », dans une palette infinie de sonorités. On savoure toute l’éloquence et le charme de ce piano à quatre mains.
Chostakovitch, trio pour deux piano violon et violoncelle en ut mineur opus 67, autre moment fort de la soirée offert par le Trio Zarathoustra.
Que cette partition pourtant compliquée leur va bien ! On se souvient les avoir entendus en ce début d’année, dans une émission « Génération France Musique ».
On ne présente plus le Trio Wanderer, accompagné ce soir-là par l’excellente altiste, Louise Berthaud et le violoniste Olivier Charlier, un autre « passeur » de musique passionné et apprécié des jeunes générations. Le premier mouvement proposé est captivant, avec sa mélodie lente dans un premier temps, et qui s’élève, de plus en plus belle et soutenue. De superbes harmonies se font entendre dans ces longues lignes mélodiques des cordes, qui répondent au magnifique piano de Vincent Coq.
Brahms, variations sur une thème de Haydn opus 56b par le Duo Reflet. Deux pianos en vis-à-vis pour une impressionnante interprétation de ces deux jeunes gens, à la maturité musicale tellement évidente. Du grand art car l’œuvre est vraiment complexe. Si, d’où l’on est assis, on ne voit que les doigts délicats de la jeune femme, on est frappé par le visage si expressif du jeune homme qui lui fait face. La musique coule avec une évidence jubilatoire, et on a plaisir à voir le pianiste s’extasier littéralement dans certains passages.
Les choses vont se compliquer avec Messiaen, visions de l’amen pour deux pianos, des extraits
Une œuvre qui transporte et « gronde », et l’orage lui fait écho. Même une chouette au loin répond au Duo Petrouchka, ce qui amuse le public, tout de même inquiet, car il scrute le ciel. Quand on chante au piano la lumière divine et l’exaltation religieuse, il y a de quoi s’interroger !
Bravo, mille fois bravo d’avoir tenu bon et joué la partition jusqu’au bout.
Des capes arrivent, il pleut, leur distribution est inévitable, et parmi le public, certains quittent les gradins et partent se protéger. La météo n’avait pas prévu la pluie. Là encore, on salue les musiciens du Degas Piano Quartet, qui, imperturbables (en apparence tout au moins) nous ont interprété dans cette toute fin de soirée, un superbe Fauré, Quatuor pour piano et cordes n°1 en ut mineur. C’est du reste étonnant de noter la « sérénité » de leur style dans un climat aussi « électrisant ».
Soirée des Ensembles en résidence. La Roque d’Anthéron. Aôut 2021
Duo Reflet duo de piano
Duo Petrouchka duo de piano
Trio Zarathoustra trio avec piano
Degas Piano Quartet quatuor avec piano
Quatuor Magenta quatuor à cordes et Vincent Mussat piano