Voilà un petit livre comme on les adore, et son titre: Au bon vieux temps. Dans notre société médiatique où tout est déformé, où l’on célèbre ceux qui font le plus scandale même s’ils déforment la vérité, où les populistes savent grattouiller la nostalgie qui est en chacun d’entre nous, où les déclinistes assènent leurs vérités qui n’ont aucun rapport avec la vérité, quelle bouffée de bonheur ! Bien sûr il y a le sublime « C’était mieux avant », le dernier livre du regretté Michel Serres, mais il parlait avec son humour si mordant, avant tout de son enfance, de sa vie.
Si vous n’avez pas le temps (mais se sera difficile à faire croire), lisez l’avant-propos et la conclusion, tout y est dit. D’ailleurs on devrait obliger les « journalistes » à les apprendre par cœur, ainsi auraient ils des arguments faciles et non moins irréfutables à présenter à tous les populistes de tous bords qu’ils interrogent.
Toute la démonstration de Marion Cocquet et de Pierre-Antoine Delhommais, les auteurs de ce délicieux livre, est que non, au bon vieux temps, c’était pire qu’aujourd’hui, que nous avons la chance de bénéficier d’une avancée technologique, hygiénique, etc . Qui nous rend la vie bien plus agréable que celle de nos ancêtres. Bien sûr, au XVIIè siècle, Louis XIV avait la vie facile, lui, ses sujets nettement moins, mais on ne parle que du roi et de sa cour et surtout pas des 99 % de la population du royaume où on mourrait encore de froid ou de faim.
Ce qui est certain c’est que quand on parle du « bon vieux temps », on fait référence à sa jeunesse, à son adolescence, avant que la vie d’adulte ne nous attrape. On parle des sixties, de la musique, de l’insouciance qui régnait, en oubliant que ce modèle américain finit dans les rizières lors de la guerre du Vietnam et en France (et dans plus d’un pays) par la révolte de 68 où on demande plus de libertés, preuve qu’il y en avait moins qu’aujourd’hui, cqfd.
Et puis, on sait tous que quand on était jeune, tout allait bien, alors que les jeunes d’aujourd’hui se préparent un avenir bien sombre et vont détruire la société qu’on a construite. C’est d’autant plus vrai que ça ne fait que 3 ou 4 000 ans que les adultes assènent cette vérité ! De fait, tout un chacun voudrait avoir 20 ans mais pas dans la société de ses 20 ans mais dans l’actuelle, avec la voiture, la télé, la machine à laver, le téléphone portable, l’hôpital en chambre individuelle, le TGV et j’en passe des vertes et des pas mûres, enfin des meilleures et je m’arrête là ! C’est à dire en un mot, la culture de notre jeunesse, et les avantages de notre âge adulte. Sauf que ça ne marche pas, car avec l’évolution de la technologie, la société et ses codes évoluent aussi. Allez donc demander à une jeune fille de 20 ans aujourd’hui si elle trouve que l’inégalité des salaires, la pénalisation de l’avortement, les couches lavables (à la main), etc. c’était mieux. On connaît la réponse sans mal.
Comme le grand Jacques Brel (un chanteur du passé) avait raison quand il a composé Les bourgeois, avec son refrain : « les bourgeois, c’est comme les cochons, plus ça devient vieux, plus ça devient C.. »
Alors à travers 22 courts chapitres parfaitement documentés, vous passerez du temps des bonnes à tout faire à celui des enfants violentés, ou encore de la vraie malbouffe, des vies cloîtrées, de l’homicide ordinaire ou encore des morts de faim ou des morts en couches. L’éventail de la vie, d’une vie rude, violente.
C’est pour cela qu’il faut éduquer, enseigner l’histoire, pour avoir assez de connaissances pour prendre du recul face à ces déclinistes, ces nostalgiques qui essayent de nous vendre un monde qui n’a tout bonnement jamais existé !
Au bon vieux temps
Marion Coquet et Pierre-Antoine Delhommais
éditions de l’Observatoire. 8€
Illustration de l’entête/ Robert Doisneau. Les Halles. Café curieux
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